Journal de bord

mardi 8 avril 2003

Classification, catégorisation & taxonomie

Grâce à JLR, j’ai découvert qu’il existait une rubrique blogues chez Yahoo.fr. Enfin plus exactement une rubrique blogs.

Les choix taxinomiques sont toujours très révélateurs d’une conception du monde, ainsi, voici l’arborescence de la catégorie blogues chez Yahoo :

Accueil >Art et culture >Littérature >Genres >Essais et récits biographiques >Journaux intimes >Blogs

Pour Yahoo.fr, le blogue est un art, un sous-genre de littérature qui appartient au récit biographique, c’est une variation du journal intime. Voilà, tout est dit. C’est la conception du blogue qui prévaut dans la francosphère.

Le point de vue américain chez Yahoo.com est différent :

Directory > Social Science > Communications > Writing > Journals and Diaries > Online Journals and Diaries > Web Logs

Le blogue n’est plus considéré comme un art et n’appartient plus au taxon littérature (Art >Humanities >Literature). C’est un outil de communication basé sur l’écriture (au même titre que les babillards, les forums), mais c’est toujours proche du journal intime même si la catégorie supérieure est plus large (Online Journals and Diaries). Le journal intime est une manifestation sociale mais n’est pas un art (contrairement à la vision française).

En Espagne, Yahoo.es opte pour cette approche :

Inicio >Ciencias sociales >Comunicación >Escritura >Diarios >Weblogs
(Départ >Sciences sociales >Communication > Écriture > Journaux > Blogues)

Cela est proche de la conception anglaise, à l’exception du fait qu’il existe en espagnol une sous-catégorie Personales à la catégorie Weblogs alors que son équivalent anglais Individuals est au même niveau que Weblogs.

L’annuaire Dmoz.org apporte encore une voix différente :

Anglais : Top >Computers >Internet >On the Web >Weblogs
Français : Top >World >Français >Informatique >Internet >Weblogs

La position de Dmoz est plus neutre. Le blogue, tant en anglais qu’en français, est une partie de l’Internet et se définit donc avant tout par ses aspects techniques et est plus proche de la définition originelle du weblog, “journal de bord de navigation sur la toile”. Dans l’arbre anglais, il apparaît que le blogue est une sous-partie du Web (>On the Web), nuance qui n’existe par dans l’arbre français.

À noter que Dmoz anglais exclut les diaristes de la famille blogues et les reporte dans :

Top >Arts >Online Writing >Journals

Le Dmoz français tente la même dichotomie, de façon un peu plus détaillée :

Top >World >Français >Arts >Littérature >Inédits en ligne >Chroniques et journaux intimes

Les concepteurs d’annuaires se heurtent eux aussi à la définition et la généralisation du concept de blogue. Les errements des choix taxinomiques d’un annuaire à l’autre sont le reflet de la difficulté à définir le phénomène.

1. Le 8 avril 2003,
Thomas

Cette comparaison des approches des différents annuaires est fort intéressante.

Sur les choix de l’Open Directory Project (Dmoz), francophone et anglophone, il est intéressant de noter que l’effort de classement est associé à un effort de définition.

Pour les francophones, le weblog est « un mélange de journal en ligne et d’e-zine qui comprend des liens vers d’autres sites et offre souvent la possibilité pour l’internaute d’ajouter des commentaires. » ( voir la description de la catégorie World/Français/Informatique/Internet/Weblogs ).

Chez les anglophones, on est très proche de cette notion de « journal de bord de navigation sur la toile » (voir la description de la catégorie anglophone, qui parle de « personal surfing diaries »).

Il faudra poursuivre les comparaisons lorsque le nombre de blogs classés justifiera un développement de l’arborescence ;-)

Peut être la comparaison entre les répertoires et annuaires de blogs existant donnerait-elle déjà des résultats intéressants et des idées sur les choix de chacun ;-) .

2. Le 8 avril 2003,
karl

Plus facile que cela, on établit une taxonomie des carnets Web en fonction de mots clés possibles, on aide chaque personne à développer son fichier FOAF, et on fait tourner un moteur d’indexation qui établit un répertoire de sites automatiquement en fonction de la taxonomie choisie par les gens pour se représenter.

3. Le 8 avril 2003,
Gilles

« on établit une taxonomie des carnets Web en fonction de mots clés possibles », facile ça ?

Déjà si on arrive à s’entendre sur une liste de mots clés… encore faudra-t-il « aider chaque personne » à l’appliquer à son carnet !

Mais, effectivement, si ça remplaçait l’inscription de nos carnets dans les différents catalogues et moteurs… ce serait un gain.

C’est de là que doit venir la proposition standardisée, non ? Ou encore de deux ou trois logiciels de carnets influents…

On pourrait séparer le travail à la manière ’open source’ et travailler d’un côté sur l’ontologie et de l’autre sur la mécanique et son interface avec Radio, MT et Blogger…

5. Le 9 avril 2003,
Houssein

Je pense qu’il est presque impossible de catégoriser les blogs. Ca prendrai un temps fou pour décortiquer chaque blog et voir de quoi il parle le plus!

J’aime beaucoup l’idée de FOAF et de RDF en general, ca permet d’automatiser cette procédure de classification (cf. semantic web). Mais le pb avec les standards, c’est qu’il faut que tout le monde les adopte… Ca viendra.

6. Le 9 avril 2003,
Houssein

Est ce que quelqu’un serait interessé par la création d’une ontologie des weblogs ?

7. Le 12 avril 2003,
daniel

Classification de système ?

voyez ici : http://www.iaslash.org/

8. Le 15 avril 2003,
Biz

Déjà si on arrive à s’entendre sur une liste de mots clés…

Il suffit de ne pas definir a l’avance les mots cles, et de laisser chacun choisir ceux qu’il ou elle prefere. Tiens c’est deja fait la ;-) http://pages.joueb.com

Blah ? Touitter !

Winston le chimique

Les bombardements britanniques en Irak, ce n’est pas nouveau :

En principe, on doit prévenir la population avant un bombardement. En principe, les objectifs sont les maisons, les troupeaux et les guerriers, et non les vieillards, les femmes et les enfants. Mais, dans la pratique, les choses ne se passent pas toujours ainsi. Le premier rapport de Bagdad décrit une frappe aérienne créant la panique parmi les indigènes et leurs familles. « Beaucoup essayaient de fuir et sautaient à l’eau, devenant des cibles tout indiquées pour les mitrailleuses.”

Churchill demande à ne plus recevoir de tels rapports : “Je suis extrêmement choqué par le passage sur le bombardement, que j’ai marqué en rouge. S’il était publié, il déshonorerait l’armée de l’air. (…) Tirer délibérément sur des femmes et des enfants qui tentent de se réfugier dans l’eau d’un lac est un acte scandaleux, et je m’étonne que vous n’ayez pas traduit les officiers responsables devant un tribunal militaire…”

[Le monde Diplomatique, au sujet du livre de Sven Lindqvist]

C’était en 1920… après que le Royaume-Uni ait chassé l’occupant turc de l’Irak, au prix de 40.00 soldats britanniques tués.

Les Britanniques avaient décidé d’innover en Irak : pour tenir le pays, plutôt que d’employer des moyens d’occupation conventionnels, lourds en hommes et en matériel, il fut décidé de maintenir la population dans la terreur de bombardements aériens. Tout le pays devenait ainsi un terrain d’exercices pour la toute nouvelle Royal Air Force.

“Les Arabes et les Kurdes savent maintenant ce que signifie un vrai bombardement. En 45 minutes nous pouvons raser un village et tuer ou blesser un tiers de sa population” disait en 1919, le lieutenant-colonel britannique Arthur Harris, qui se rendra célèbre sous le surnom de “Bomber Harris” lors du bombardement de Dresde en 1945.

[En 1992, une statue fut érigée à Londres en mémoire de Arthur Harris (Church of the Royal Air Force, St. Clement Danes — statue qui devrait, à mon avis, subir ce traitement, ou pire encore)]

Laurence d’Arabie (celui-là même qui fut immortalisé au cinéma par Peter O’Toole) avait déclaré après la révolte de 1920 “C’est dommage de ne pas avoir utilisé des gaz de combat à cette occasion”. Oui, c’est vraiment dommage a dû penser Winston Churchill à cette époque.

Mais on s’est rattrapé plus tard : les historiens font état de l’utilisation de gaz mortels par l’aviation britannique en 1925 à Souleimaniyah, dans l’est du Kurdistan. Ali Hassan al-Madjid dit Ali le chimique n’a rien inventé, il a juste suivi les enseignements britanniques.

[réf. British Use of Chemical Weapons in Iraq.]

Secrétaire d’État à la Guerre, Winston Churchill se déclarait “fermement favorable à l’usage de gaz empoisonnés contre des tribus barbares”. “Il n’est pas nécessaire, nuance-t-il, d’utiliser uniquement les gaz les plus mortels : des gaz provoquant de sérieux troubles et créant la panique mais sans effets irréversibles pourraient faire l’affaire.”

À lire : BBC, Patrick Cockburn, Britain’s role in shaping Iraq.

On comprendra alors aisément que les Britanniques ne sont définitivement pas les bienvenus sur le sol irakien.