Journal de bord

mardi 29 juillet 2003

À quoi servent les nobles ?

Loin de défendre une forteresse assiégée par l’usure du temps, les aristocrates apportent une patine aux valeurs traditionnelles qu’ils incarnent tout en épousant la modernité.
[Figaro Magazine, Stéphane Bern].

Il n’y a que dans le Figaro Magazine qu’il est possible de traiter de questions aussi oiseuses, et il n’y a qu’un Stéphane Bern pour s’atteler à la tâche.

Si un nom à rallonge permet de briller dans les relations publiques - où il véhicule un préjugé de bonnes manières, d’élégance et de savoir-vivre, à moins que ce ne soit une référence en matière de relationnel et de carnet d’adresses -, il est un paratonnerre à moqueries dans une cour de récréation. Certes, on comprendra que “l’aristophobie” ne soit pas une priorité des associations antiracistes, mais un nom à particule sera montré du doigt plus sûrement qu’un patronyme à consonance juive ou maghrébine.
[Figaro Magazine, Stéphane Bern].

Au secours !

Pour réussir en France, tu préfères t’appeler Farida Ben Soussan ou Hermine de Clermont-Tonnerre ? D’ailleurs, c’est une telle honte de s’appeler Isabelle de Truchis de Varennes qu’il y en a une qui se fait appeler Zazie.

Si jamais nous remettons en fonction la guillotine place de la Concorde, je propose d’envoyer Monsieur Stéphane Bern pour l’essayer en premier, car même si le lèche-cul des fins-de-race, aux regards énamourés pour la moindre pucelle à particule, n’a pas un globule de sang bleu, son abnégation à la cause de la loi du sang mérite récompense, et qui sait anoblissement. Il serait même capable de frémir de plaisir à l’idée d’un tel honneur et d’en souiller son caleçon de popeline fait sur mesure à Saville Row.

Post-scriptum. Anecdote personnelle : figurez-vous que j’ai cotoyé plusieurs années Stéphane Bern au lycée! Il se trouve que c’est le même lycée que celui où Jacques Chirac a usé ses culottes, le jeune Chirac qui se voyait ainsi noté par l’un de ses professeurs : “parle beaucoup pour ne rien dire” [À l’occasion de la préparation d’une exposition sur l’histoire du lycée, dans le cadre d’un projet pédagogique, nous étions tombés sur les carnets de notes du Jacquot dans les archives. Authentique…].

1. Le 29 juillet 2003,
loïc

J’ai un nom avec une particule, je viens d’une vieille famille, vous savez la noblesse d’épée. Il y a un côté pratique à être noble, l’esprit de famille est souvent fort, le soutien des membres entre eux toujours présent. Si cela se vit libéré du carcan des “bonnes manières”, c’est très agréable. Mais cela peut être vécu dans toute famille qui favorise la communication vraie et l’entraide entre ses membres. Si cela se vit comme étant une distinction par rapport aux autres, alors oui cela devient un anachronisme pour fins-de-race.

Autre petite chose amusante, vous savez que les nobles reçoivent une chevalière, pratique pour se positionner dans une soirée mondaine, avec - sans. La superficialité est une raison de vivre des fins-de-race. Pour moi je retiens plus ce que mon grand-père m’a dit au moment où il m’a remis cette chevalière : “Un chevalier ne devrait pas être quelqu’un qui s’impose aux autres par sa force ou son rang, mais quelqu’un qui est là pour défendre les autres et se mettre à leur service.” Vision idéaliste d’un grand-père vous allez me dire… mais cela donne deux approches de la noblesse, la première étant la plus répandue :

  • Je suis noble, donc ayant droit à [mettre ici les illusions perdues de certains].

  • Je suis noble, donc j’ai une raison de plus de servir la société, après avoir été un poids pour elle pendant “un certain temps”.

Rassurez vous, j’écris cela maintenant puisque notre marin tire du canon fort à propos, mais dans ma vie de tous les jours, la noblesse est bien le cadet de mes soucis.

J’oubliais, la noblesse cela permet de faire vivre des magazines et faire réver des gens avec des histoires de Roi, Reine, de fortunes dillapidées, … vous savez le magazine, chez le dentiste, juste avant de passer à la roulette :o)

PS: Pour connaître les fins-de-race, veuillez consulter la rubrique néchrologique du Figaro. Les “grandes” familles informent le monde de leur fin dans ces pages.

2. Le 29 juillet 2003,
Laurent

M. Loïc, sans doute descendant de la vieille noblesse bretonne, est un homme bien informé, puisque justement : j’étais chez le dentiste ce matin et qu’il n’y a que chez le dentiste que je rentre en contact avec des publications aussi sulfureuses que “Figaro Madame” et “Gala”. Et que si je n’avais pas eu de problème de dents, je n’aurais jamais publié ce billet !

3. Le 29 juillet 2003,
Jean-Philippe

Si tu entends parler des notes de Jean Charest, me prévenir.

4. Le 29 juillet 2003,
glazou

Comme disait un de mes officiers supérieurs quand j’étais à l’armée, et il était noble lui-même, “Tu es noble ? Parfait. Alors tu seras de Corvée de Nettoyage de Chiottes Demain Matin”.

Blah ? Touitter !