Journal de bord

samedi 16 octobre 2004

100 % américain

Lu dans Libé :

Le journaliste du New York Times Magazine a rendez-vous avec John Kerry dans un hôtel de Santa Monica, Californie. Il y a des bouteilles d’eau d’Evian sur la table. Le candidat les voit. Aïe ! Evian… France… Pas bon. Il s’empresse de demander à son attachée de presse : “Puis-je avoir de mon eau ?”, et précise au journaliste : “Je déteste ce truc, ils la bourrent de minéraux.” Le journaliste, Matt Bai, demande quelle eau il préfère. “De la bonne vieille eau 100 % américaine”, répond Kerry.

1. Le 16 octobre 2004,
karl

Au passage fait intéressant, la Une du monde en PDF n’est pas celle de la vignette vers le PDF. Deux maquettes semblent avoir été préparées, une en priorité sur les élections, une en priorités sur le projet des Halles.

Blah ? Touitter !

Retour sur Blog Story

Lu chez le trentenaire Chryde :

Ils avancent avec prudence, mais réussissent tout de même à faire un livre somme, un livre qui n’est pas aussi complet qu’eux mêmes le voudraient, est loin d’être exhaustif, mais est essentiel. Un livre qui est aujourd’hui utile pour comprendre un phénomène, pour nous préparer (sans présomption, sans jamais trop s’avancer) à ce qui arrive, mais qui sera sans doute utile demain pour regarder un moment clef dans l’Internet aujourd’hui.

Quelque part, ça me rassure de voir que d’autres ont aussi apprécié le livre Blog Story. (Même l’éternel râleur d’Olivier a écrit un billet finalement presque positif.)

On peut également observer que les pires critiques émanent de gens qui n’ont pas lu le livre et qui se permettent des procès d’intentions faciles. J’ai même lu des appels au boycott (je ne sais plus où). Quand ce n’était pas la rengaine “ça pue, c’est pas libre” (comprendre gratuit et sur le Web), venant, entre autres, d’une personne qui a eu par le passé des velléités de faire carrière littéraire et de vendre des livres.

Blog Story est le premier livre français sur le phénomène et mérite d’être salué comme tel. Bien sûr, avec un sujet aussi complexe et riche, cette entreprise était forcément condamnée à être partiale, partielle et rapidement obsolète. Cependant, et il faut lire le livre pour le savoir, Blog Story est bien écrit, pas ennuyant, et constitue une excellente introduction aux néophytes à qui s’adresse cet ouvrage de vulgarisation.

Ite Missa Est. Alors, si ça vous amuse de chier dans la soupe pour le plaisir, vous pouvez toujours. Mais cela ne vous donnera pas vraiment l’air mature et intelligent.

J’aurais pu écrire un billet sarcastique du style : ce livre est trop centré sur des réalités américaines, il fait l’impasse sur trop d’aspects du blogue, et ses auteurs ont osé mettre LLM dans les “20 meilleurs blogues personnels en français”. Et me limiter à ça. Mais je ne l’ai pas fait, parce qu’en regard du reste, cela aurait été tout simplement injuste.

D’ailleurs, je regrette sincèrement que Blog Story ne soit pas un livre nul, car cela me prive de la publication d’un billet “tir à boulets rouges” dont j’ai le secret et que j’aime tant écrire.

Et ça me fait tellement de mal d’écrire des compliments sincères, que je n’avais pu m’empêcher d’y ajouter une grosse touche d’ironie (du style, ce livre est forcément excellent puisque qu’il parle de moi). Mais l’ironie ne passe pas avec certains lecteurs, qui vous lisent au premier degré ou en diagonale, tout excités qu’ils sont de tirer à vue.

P.S. Et oui, WordPress et DotClear sont artisanaux. Enfin, l’un plus que l’autre. ;-)

P.S. bis. À lire aussi chez Lithium : Blog Story 2, le retour.

PS. ter. Lire l’article de La Tribune de Genève (grâce à IFeedYou).

P.S. quarter. 15/20 à “Blog Story”. “Et ben je suis obligé de dire que ce livre est bon. Pourtant je m’étais préparé à être critique, à sortir du lot, à être celui qui a dit NON. Mais non, je suis celui qui dis OUI aussi, comme les copains.”

Synthèse des articles sur CraoWiki.

“Mais j’l’ai diiiit qu’j’étais de mauvaise humeur ce jour-là ! Donc pour répondre : quand je dis que je ne vais pas hurler, c’est que je ne hurle pas. Je me ferai un plaisir de juger sur pièce. A vrai dire c’est le post de Laurent qui m’a fait réagir : lui qui d’habitude a tant d’esprit critique, là on aurait dit que tu l’avais acheté à coups de livres. On aurait dit la copie élargie du billet de Loïc Le Meur (je l’ai dit ? oui je l’ai dit, Laurent ne me pends pas par les ovaires s’tep’). Etant totalement frustrée par un consensus d’autant plus mou qu’apparemment personne n’avait encore lu Blog Story, j’ai boudé, et posé une question qui méritait d’être posée.”
[Maia, dans les commentaires.]

Alors, je vais dire enfin la vérité, oui, Cyril m’a acheté. Oui, il a couché pour que j’écrive un billet dithyrambique sur son bouquin ! Voilà, zêtes contents ? (Corollaire, je n’ai pas parlé du bouquin de Maia, car je n’ai aucune envie de coucher avec elle.)

Plus sérieusement, si Cyril a fait une erreur, c’est celle de m’avoir envoyé le bouquin. Certains ont pu croire que c’était pour m’acheter (mais, on ne m’achète pas avec 15 euros, ne me faites pas injure, je coûte vraiment beaucoup plus cher…). Il l’a fait par gentillesse pour me remercier d’avoir consacré un peu de mon temps à répondre à ses questions par courriel. Du coup, il a en plus raté une vente, car je l’aurai acheté… Et d’autres ont exprimé un certain ressentiment (du style “pourquoi lui et pas moi”).

1. Le 16 octobre 2004,
cyril

C’est une bonne idée de ponctuer les billets avec du latin. Je propose qu’on généralise ça. Mes remarques, donc :

“Et oui, WordPress et DotClear sont artisanaux.” Cave canem !

“les pires critiques émanent de gens qui n’ont pas lu le livre” O tempora, o mores…

““ça pue, c’est pas libre” Veni, Vidi, Dormivi

“ses auteurs ont osé mettre LLM dans les 20 meilleurs blogues” Tu quoque, fili mi :)

Et pour conclure : rosa, rosae, rosam… (je sais, ça ne vaut pas ça, mais l’attention y est ;)

2. Le 16 octobre 2004,
M LeMaudit

Timeo Danaos et dona ferentes…

3. Le 16 octobre 2004,
karl

Pour ma part, je ne connais pas le contenu du livre, donc je ne juge pas le contenu dans ce commentaire à part peut-être le chapitre 4 que j’ai trouvé chiant à lire… mais j’en viens à mon commentaire principal.

Pourquoi j’ai dit de façon ironique qu’il ne fallait pas en parler, parce-que l’idée d’un livre sur le sujet de la blogosphère m’ennuie profondément. Quelques articles de temps en temps oui, pourquoi pas. Mais un bouquin ? De même je n’ai pas lu les livres américains respectifs sur le sujet, enfin je les ai feuilleté dans les rayons des librairies locales, et… c’est chiant.

La deuxième chose qui me hérisse, c’est le viral marketing déguisé derrière la promotion du livre. Ca me fait vomir et en effet, cela ressemble à une bonne vieille technique appris dans une classe de cyber-marketing… comme dirait un ami à moi cyber-blaireau et techno-beauf.

noté que je ne suis pas particulièrement agressif en disant tout cela, juste un manque d’intérêt total pour l’objet et le sujet. Quant à l’autre nouveau de la blogosphère, il repartira aussi vite qu’il est venu. Et je ne suis pas d’accord avec Cyril qui commente sur le carnet d’Olivier en disant qu’il “apporte des débats intéressants”. C’est à mourir de rire ou d’affligements si ce n’est pas carrément oui oui décroche la lune de temps en temps. A collectionner dans le « mur du çon » du canard enchaîné : « Sometimes I worry about globalization too »

4. Le 16 octobre 2004,
karl

rha les fautes…

5. Le 16 octobre 2004,
rosalie

Moi j’adore “blog story” tout simplement parce qu’il s’adresse à des néophytes comme moi, les 2 auteurs ont réussi leur coup: donner envie d’avoir envie de bloguer. J’ai reçu ce livre en 48 heure chrono donc très bonne campagne……… je dis ça pour les provinciaux qui font leurs achats sur le web!

6. Le 16 octobre 2004,
Laurent

Karl : Si un livre sur le sujet de la blogosphère t’ennuie profondément, n’en dégoûte pas les autres. Je crois que ce genre de livre a un public, ce que laisserait penser le commentaire enthousiaste de Rosalie ci-dessus. Et il ne s’adresse pas aux blogueurs, mais aux gens qui pourraient s’intéresser au phénomène pour en avoir vaguement entendu parler. Pour le marketing viral, vraiment, je ne vois pas. Le livre eut été mauvais qu’il aurait été descendu en flammes par ses lecteurs blogueurs, et que ceux qui auraient assuré sa promotion pour des rasions occultes se seraient couverts de ridicule. Quant à LLM, oui, son blogue est lisse et sans intérêt… C’était plus marrant à ses débuts. :-)

7. Le 16 octobre 2004,
lithium

L’espace d’un instant, j’ai cru entendre le son d’une chaise passant au travers de la pièce, mais j’ai dû rêver… Ex nihilo sequitur quod libet…

8. Le 16 octobre 2004,
rosalie

Je n’ai pas eu la chance de connaitre LLM à ses débuts, ça ne me rajeunit pas!mais son blog est dans mes favoris: j’aime bien le coté technicité meme si je n’y comprend bien, en tout cas chez lui ça bouge et c’est toujours sympa et c’est ce que j’exige d’un bon blog.

9. Le 16 octobre 2004,
karl

rosalie: j’aime bien votre sens de l’humour :)

laurent: La critique est normale. Je n’en dégoute pas les autres. Je donne mon avis. :) Quand je serais en France (bientôt), je passerai faire un tour dans une librairie et regarderai le contenu sans a priori et si je me suis lourdé sur la qualité narrative et analytique, j’en ferais mention. Promis.

marketing: ce n’est pas une question de commentaires positifs ou négatifs. C’est justement cela le principe du marketing, et le fait que j’en donne une opinion négative sur le sujet même d’un livre sur la blogosphère, je suis sur que cela permet d’ajouter à la publicité. Il n’y a que le titre que je trouve bien choisi… Loft Story… Blog Story… le niveau des épanchements et des vapeurs de la blogosphère sont de ce niveau. Nous sommes une micro-communauté et non, nous ne changeons pas le monde par nos weblogs, et non nous ne sommes pas journalistes.

Cyril est une personne que j’ai un peu cartonné à ses débuts sur PointBlog, mais qui je trouve s’est amélioré.

Le message de Dr Dave dans tes commentaires, c’est cela que je trouve intéressant, tout comme Netlex. Je trouve qu’il y a des gens qui méritent vraiment de s’arrêter. J’en ai discuté avec quelqu’un aussi récemment. Nous avons tendance à vivre en vase clos. Il y a pleins de bulles dans cette blogosphère qui sont assez peu perméables en fait.

J’ai l’impression qu’on regarde bien trop souvent les reflets changeants de notre ombre sur les murs d’une caverne où l’écho de nos voix nous offrent l’opportunité de nous parler. C’est bien on a l’impression de ne pas être seul. :))

10. Le 16 octobre 2004,
cyril

(Désole, je répond principalement à Karl)

Karl, je trouve que tu te contredis pas mal dans ce que tu dis. Tu questionnes le principe même d’un livre qui cherche avant tout (avec un peu de prosélytisme, je l’avoue) à expliquer et à convaincre des néophytes, donc à élargir potentiellement la blogosphère. Et dans le même temps, tu sembles regretter que la blogosphère tourne en rond, ou soit en “vase clos”. C’est assez paradoxal, non ?

En outre, Loïc, dont je trouve un peu gonflé que tu l’appelles le “nouveau de la blogosphère” (il faut arrêter de croire que parce qu’on avait ouvert son blog 6 mois ou 1 an avant d’autres, on est forcément plus intéressant), a au moins un mérite : il a apporté quelque chose dans la blogosphère qui n’existait pas auparavant. Certe, on peut trouver ça inintéressant, et se répandre longuement sur le côté “bizness”, et tout et tout. Mais la blogosphère y a gagné en DIVERSITE. Et franchement, je trouve cela très bien. Le concept de blog n’appartient pas aux ayotallah de l’OpenSource, pas plus qu’aux chefs d’entreprise. Chacun peut s’en emparer, et faire avec des choses variées. Et s’il est bien une vertu qu’il faut reconnaître à Loïc, c’est de donner envie à un tas de gens de s’essayer au blog, contrairement, précisément, à beaucoup de “big blogueurs” qui se regardent le nombril et veulent garder pour eux “le joujou blog” en étant persuadés de faire partie de la nouvelle élite underground.

Sinon, sur le nom “Blog Story”, j’avais en effet pensé à l’association “Loft Story”. mais bien avant ça, j’avais aussi pensé au titre d’origine qui lui a donné naissance : “Love Story”. Dommage que tu n’es pas percuté là-dessus.

Quant à la pseudo-campagne de “marketing virale” que tu évoques, tu es franchement à côté de la plaque. Comme je l’ai dis plusieurs fois, nous n’avons rien fait pour inciter les blogueurs à parler du livre. Et franchement, le fait qu’ils le fassent (aussi vite et aussi bien) a été une excellente surprise. Je ne vois pas en quoi c’est mal.

11. Le 17 octobre 2004,
karl

cyril: Je ne dis pas que la blogosphère tourne en rond. je dis qu’elle est composé de bulles à fortes résonnances internes et qu’il y a peu de communications entre ces bulles. Ne pas se méprendre sur mon propos.

Le fait est que je me fous complètement de la notion de club justement. :) Je suis heureux quand de nouvelles personnes ouvrent un carnet Web, pas parce-qu’elles rejoignent un club privé, mais parce-qu’elles ont trouvé un moyen d’expression qui leur conviennent. Je suis toujours heureux que de nouvelles personnes qui publient des choses intéressantes avec un contenu riche publient sur le réseau. Et cela n’a pas besoin d’être de la littérature, cela peut-être très simple.

La diversité oui oui oui et encore. Et pas de concours d’entrée, Et surtout ce n’est pas obligatoire d’ouvrir un carnet Web.

Quant à LLM, je pense que je vais m’arrêter là, parce-que je pourrais devenir méchant et cela serait totalement absurde. Il faut arrêter de croire qu’il a apporté quelque chose dans la blogosphère. La connerie a des limites tout de même.

Pour le bizness, retour aux débats avec Christophe, il y a 3 ou 4 ans. Là c’est une opinion personnelle, mais qui ne s’applique pas qu’à la blogosphère. C’est justement le gros problème de cette notion de “blogosphère”. Un carnet Web est un moyen parmis tant d’autres de s’exprimer. Avoir des idées exprimées sur un carnet ne veut pas dire qu’une fois dans la vie courante, on débranche et on pense autrement. Enfin je ne fonctionne pas comme cela. Donc ce que j’exprime contre une certaine façon de prendre les gens pour des cons dans le monde du business sur les carnets Web, j’ai exactement le même discours à l’extérieur.

Cyril: Le concept de blog n’appartient pas aux ayotallah de l’OpenSource, pas plus qu’aux chefs d’entreprise.

Complètement hors sujet… disons que je n’ai rien lu.

12. Le 17 octobre 2004,
Loic

Ah enfin un peu d’animation ! Heureusement que ce blog la n’est pas lisse et sans intérêt, on rigole au moins.

13. Le 17 octobre 2004,
lithium

Oupla, encore une chaise volante !! LOL

14. Le 18 octobre 2004,
Fogara

Vous me faites plaisir. Ma perception du blog est belle et bien ce que j’y ai vu initialement. Un carnet de note sur sa façon personnelle de voir le monde. Une possibilité d’échanger ces points de vus. Le hic, c’est que, comme le monde réel, j’ai l’impression qu’il faut convaincre les gens de SON point du vue. C’est tellement plus beau d’exposer chacun le sien et de pouvoir les consulter à loisir. Ça ouvre tout grand le monde. Continuez comme ça, vous me cultivez.

15. Le 21 octobre 2004,
Xavier

Hé hé, cela sent l’aigreur et la jalousie par ici ;-)

D’abord il est pas honnête ce Cyril. Il a envoyé un livre dédicacé à Laurent qui est capable de créer une polémique même quand il est d’accord. C’est pas du jeu.

A propos Karl, depuis quand cela fait-il vomir qu’un auteur défende son livre et essaye de le vendre ?

Blah ? Touitter !

And the winner is…

Lu sur une Carte postale suédoise :

Deux issues possibles donc, le 3 novembre au matin aux quatre coins de la planète : un grand ouf qui pourrait se traduire par un sursaut politique ou alors un immense dégoût qui pourrait cette fois-ci ne plus se limiter au président américain mais également aller à ce peuple qui a choisi à plus de 50 % de le réélire.

Oui, la ré-élection de Bush légitimera d’une certaine façon l’expression de l’anti-américanisme. Mais les demeurés qui votent Bush se contre-foutent de l’opinion du reste de monde.

1. Le 16 octobre 2004,
O.

Je persiste et signe : ça ne changera que l’emballage. Le fond reste le même. Les divergences profondes entre leurs deux programmes sont … mais qu’est-ce que je raconte moi ? Il faudrait en plus croire qu’ils vont faire ce qu’ils annoncent ?

Dites, on n’a plus quinze ans, hein.

2. Le 16 octobre 2004,
Laurent

Franchement, j’aime pas trop ce discours. Ça me fait trop penser à la dépolitisation en France sur le thème “droite ou gauche, tous pareils, tous pourris”. C’est foncièrement pas juste. Si cela ne changera peut-être pas grand chose sur les rives de l’Euphrate ou du Jourdain, pour le quotidien des Américains, cela changera quelque chose. Parle-en à des gens comme SaleBête.

3. Le 16 octobre 2004,
dr Dave

M. O.: Si vous n’arrivez pas à voir des différences fondamentales entre les conséquences d’une élection de John Kerry ou de George Bush, vous ne devez pas avoir étudié de très près leur plate-forme respectives: Bien sûr, comme beaucoup de personnes, je ne suis pas du tout enthousiaste sur les positions politiques de Kerry dans de nombreux domaines (notamment économiques), et l’entendre se plier aux contorsions rhétoriques semi-totalitaires (“nous contre les forces du mal” etc) imposées par les conservateurs depuis 911 me donne la nausée…

MAIS, l’enjeu de cette réélection, ce n’est pas la guerre en Iraq: tout le monde sait bien qu’il est trop tard, le mal est fait. Même les opposants les plus farouches de la guerre savent bien qu’un retrait unilatéral des troupes US, ce serait catastrophique. Et je ne crois pas que les Nations Unies sont prêtes à se précipiter pour aller nettoyer derrières les US…

Le point crucial c’est que le prochain président des États-Unis va presque certainement être en position de nommer un, deux voire trois juges à la Cour Suprême des Etats-Unis. De plus, une réélection de Bush s’accompagnerait très probablement d’une majorité suffisante au sénat pour donner les pleins pouvoir au président dans le choix du ou des remplaçants.

Compte-tenu du fonctionnement des institutions fédérales américaines et de la répartition actuelle de la Cour Suprême, le remplacement d’un seul juge pourrait avoir des conséquences catastrophiques sur de nombreux aspects de la vie politique américaine: Roe vs. Wade, séparation de l’État et de l’Église, droits des homosexuels, sans oublier des cas ponctuels comme une certaine décision sur le recompte des élections, il y a de cela 4 ans, qui a hissé les Etats-Unis au statut de première république bananière au monde.

Ces changements seraient aussi dramatiques que durables: les juges sont nommés à vie et contrôlent dans la pratique, le véritable pouvoir législatif aux États-Unis.

En ce qui concerne le décalage entre promesse et action et la “naïveté” de ceux qui croient à ces déclarations électorales: Précisément, peut-être serait-ce une bonne idée de se pencher sur la question et de se demander dans quel sens les deux candidats ont le plus intérêt à enjoliver leur discours pré-électoral (par rapport à leurs véritables convictions et à leur mise en application effective).

Les indécis sont des électeurs de centre-droit (voire complètement de droite, mais troublé par un aspect ou un autre du bilan de George Bush), en conséquence il serait entièrement stupide et naïf de s’offusquer que Kerry ratisse très largement vers la droite: il n’aurait aucune chance sans cela.

Aucun doute en revanche sur la véritable direction que prendra la politique de Bush. Il ne s’est pas embarrassé de la moindre tentative de consensus alors qu’il traînait le poids d’une élection controversée, c’est dire s’il va se tourner vers la modération en si cette élection s’avère être un plébiscite de sa politique. A tout cela s’ajoute la valeur particulière du sacro-saint “Mandat” populaire dans la société américaine: un président élu reçoit automatiquement le soutien de la grosse majorité apolitique du pays, jusqu’à l’élection suivante.

En conclusion, constater tout deux ne sont pas terriblement éloigné l’un de l’autre à l’échelle du spectre politique mondial (ou en particulier pour la France): soit. Mais affirmer qu’il n’y a pas de différence et que les deux se valent, c’est au mieux ignorer des aspects importants du système américain, au pire, faire montre d’un poujadisme peu constructif, comme le note Laurent…

[Désolé Laurent d’avoir accaparé ta page pour mes longues dissertations sur ce sujet…]

4. Le 16 octobre 2004,
Christophe

Maintenant que les débats sont terminés, les sondages repartent en faveur de Bush:

http://www.realclearpolitics.com/bushvskerry.html

http://128.255.244.60/graphs/graphPres04WTA.cfm

En plus, les grands électeurs restent très favorable au président sortant: http://www.electionprojection.com http://www.electoral-vote.com http://www.federalreview.com

5. Le 16 octobre 2004,
Laurent

[C’est toujours un plaisir, cher Dr Dave, de me faire accaparer par toi…]

6. Le 17 octobre 2004,
O.

Dr Dave, je peux naturellement me tromper, mais pour moi il n’y a véritablement pas de différence fondamentale.

Deux raisons me font penser ça : - les positions de Kerry en ce qui concerne le Proche-Orient, et notamment la question palestinienne. Il a avalé l’hameçon, la ligne et le bouchon et soutient la dialectique israélienne sans question ni détail. De là je peux déduire sans trop me tromper que sa politique extérieure aura les même effets que la précédente, avec un emballage différent. Pour être brutal, disons qu’il dira “s’il vous plait” avant de nous la fourrer profond. Mais il nous la fourrera profond si il y voit un intérêt.

La Cour Suprême ? On s’en fout. Sisi. Pourquoi ? Parce que dans certains états la sodomie est illégale, voire criminelle, même entre adultes consentants. Idem pour la fellation. Sans que la cour suprême y trouve à redire, ou ait même son mot à dire. C’est important pour les Américains sur place, je te l’accorde. Mais mon point de vue sur l’élection américaine est celui d’un européen.

Le deuxième point qui me fait dire qu’on ne verra pas de changement, c’est que même si Kerry n’est pas autant inféodé à certains groupes économiques que son concurrent (et, entre nous, ça reste à démontrer), je ne l’ai pas vu annoncer qu’il allait s’arranger pour que dorénavant la politique US se décide à la chambre, et non dans le “lobby” de la chambre.

Appelle-ça du poujadisme si tu as besoin de mettre des épouvantails sur les idées qui ne te plaisent pas, mais tu ne m’as pas fourni de raison de changer d’avis.

Aux États-Unis comme quasiment partout ailleurs, la vie politique est tout sauf politique au sens propre (jeu de mots) du terme.

Je me réjouirai si Bush dégage, ne serait-ce que parce que je n’aime pas sa tronche. Mais je n’attends pas une seconde de Kerry qu’il rende la vie des Américains meilleure.

Ça, ce sera le boulot des Américains. Si ils le veulent.

7. Le 17 octobre 2004,
O.

Tiens, ça m’apprendra à faire mes devoirs avant de parler en public : la cour suprème a invalidé les “sodomy laws” en… 2003 - sous Bush.

http://www.sodomylaws.org/usa/usa.htm

Comme quoi, hein…

Ça ne change pas grand chose au fond de mon discours , qui est —je le rappelle— que je n’attends rien de plus de Kerry que de Bush.

8. Le 17 octobre 2004,
Christophe

L’effet “débats” s’estompe:

http://www.gallup.com/election2004/

9. Le 18 octobre 2004,
dr Dave

Cher M. O.,

Je suis désolé, c’est très très long, mais promis, après, je passe à autre chose…

1) La position de Kerry sur le proche-orient: Il n’existe à ce jour pratiquement pas un seul homme politique américain (mettons, parmi ceux siégeant au congrès) qui oserait ou désirerait prendre une position anti-israélienne en public. Il y a de nombreuses raisons et explications plus ou moins valable à cet état des faits, mais je pense que ca dépasse largement le cadre de ce blog… A défaut, je ne vois pas comment cela peut permettre d’en tirer des conclusions négatives sur Kerry et sa probable politique étrangère en cas de victoire: il a très clairement émis le voeu de regagner le crédit perdu par Bush auprès des nations “aliées”. Encore une fois, sur ce sujet comme bien d’autres, il faut être raisonnable et accepter une langue de bois incontournable s’il veut avoir la moindre chance de l’emporter. Il n’y a pas de raison qu’une fois élu, Kerry dévie énormément de ses convictions politiques modérées en matière de coopération internationale.

2) La Cour Suprême Comme vous l’avez justement noté dans votre second commentaire, la Cour Suprême peut forcer les états à amender leur constitution pour se conformer au droit fédéral, et l’a fait. Le cas des lois statutaires sur la sodomie (et bien d’autres en matière de liberté sexuelle) en est un exemple récent.

Quelques remarques (désolé d’avance s’il s’agit d’évidences): - le fait que Bush ait été président lors de cette décision n’avait absolument aucun poids (dans un sens ou dans l’autre): il lui est strictement interdit, ainsi qu’à tous membre de l’exécutif, de chercher à influencer les décisions de la Cour Suprême. En revanche, le président est en mesure de nommer, en coopération avec le sénat, les remplaçants.

  • Comme l’indique la décision de 2003, la composition actuelle de la Cour balance très légèrement vers le coté progressiste (“libéral” américain). Mais cette majorité est extrêmement serrée, elle repose en fait souvent sur le soutien aléatoire de l’un des nominés républicain modéré de la faction conservatrice. Le changement d’une seule tête suffirait à donner la majorité absolue à la faction conservatrice, qui compte dans ses rangs des membres très extrémistes.

  • Parmi les très nombreux domaines où la Cour Suprême est l’ultime recours, qui affectent la vie de tous les Américains (et donc, que vous le vouliez ou non, du monde entier, car si les Etats-Unis redeviennent une espèce de régime fondamentaliste totalitaire, cela ne peut qu’être néfaste pour les autres pays), l’une des controverses récurrente est celle qui oppose les partisans du pouvoir fédéral contre ceux du pouvoir local (au niveau des états). Ce domaine est primordiale, car il est celui sur lequel repose toute application des autres décisions, en particulier dans des cas comme les lois sur la sodomie, où seule une poignée d’états ultra-conservateurs refusaient de se plier à la décision de la majorité du pays. En clair, à défaut de pouvoir faire marche arrière sur des points tels que la liberté d’orientation sexuelle (ce qui ne serait pas réaliste, même sous un second mandat Bush), une Cour Suprême plus conservatrice pourrait très bien donner le droit aux états de faire appliquer leur propre constitution à l’encontre de la constitution américaine dans un certain nombre de domaines. Et ça, ce ne serait pas une bonne nouvelle pour les homosexuels du Midwest (ainsi d’ailleurs que les femmes, les minorités raciales et religieuses etc).

  • Encore une fois, c’est aussi la Cour Suprême qui aura le dernier mot sur de très nombreuses décisions cruciales de la société américaine: le fait qu’elle ait mis tant de temps à imposer l’annulation des lois que vous mentionnez n’est en rien un signe de sa faiblesse, simplement un reflet de sa composition actuelle très peu progressive (avec un potentiel énorme pour s’aggraver). Il serait une erreur, je pense, de considérer la Cour Suprême des États-Unis en songeant à son équivalent français: elles ne fonctionnent pas du tout de la même manière, et n’ont pratiquement pas le même rôle. Pour les gens à tendance légèrement paranoïaque, il faut insister sur le fait qu’un changement drastique dans l’exercice démocratique américain (déjà amorcé depuis trois ans, selon certains) est tout à fait dans les capacités de la Cour Suprême. Et inversement, elle est aussi le dernier (voire le seul) obstacle face à un président aux velléités totalitaires élu à la majorité absolu du Congrès.

3) Kerry et les lobbies

Loin de moi l’idée de présenter Kerry et le DNC comme des modèles d’intégrité et d’indépendance: il suffit de connaître le fonctionnement des élections américaines pour savoir à quel point il est utopique de penser qu’un candidat ne disposant pas de fonds vertigineux (donc liés aux lobbies et groupes d’intérêt) ait la moindre chance dans le contexte actuel.

En revanche, contrairement à ce que vous pensez, il se trouve que Kerry avait, à l’époque, pris une position très ferme contre ces pratiques, dénonçant précisément “le monnayage d’influence” (influence peddling) et appelant à plus de clarté dans ce domaine. Il en avait fait, si je me souviens bien, l’un de ses principaux chevaux de bataille lors des primaires. Et pour en revenir à ce point, si je devais me fonder une idée réelle des opinions politiques des candidats, je regarderais bien d’avantage du coté des primaires, où les candidats n’ont pas à craindre de s’aliéner les indécis. Cela n’a certainement pas fait partie des sujets ressassés lors des débats: ce n’est pas particulièrement la faute de Kerry (ni même vraiment celle de Bush), c’est celle des média qui préfèrent disséquer ce que l’un et l’autre faisait il y a 30 ans et rester soigneusement hors de tout sujet vaguement sérieux.

Pour la mention du “poujadisme” de telles critiques, je n’avais nul intention de blesser qui que ce soit, et je pense en fait sincèrement qu’il s’agit plus de méconnaissance (tout à fait naturelle: je doute que beaucoup de citoyens américains en connaissent plus sur la France) du système et des enjeux internes de cette élection. Peut-être aussi d’un ras-le-bol face aux défauts de ce système qui ne sont certes pas en voie d’être corrigés. En revanche, quand vous concluez par: “Aux États-Unis comme quasiment partout ailleurs, la vie politique est tout sauf politique au sens propre (jeu de mots) du terme.”, il est difficile de ne pas penser à du poujadisme, c’est à dire la justification d’absence de nuance politique par le fait que l’exercice politique est presque vicié par nature.

Comme vous le dites, les choses changeront “si les Américains le veulent”, mais, pour mettre les choses de manière un peu sèche et brutale: d’un point de vue purement statistiques, les Américains sont des cons; des cons ignorants et facilement manipulables.

Le citoyen “moyen” de la plupart des pays n’est probablement guère mieux. Partant de ce constat que la politique des Etats-Unis est décidée en dernier ressort par des gens qui sont rarement sortis de la limite de leur comté et seraient incapables de placer l’Europe sur une carte du monde, la question est de savoir lequel des deux candidats offre la moindre chance d’améliorer les choses et lequel se complaît à cultiver les plus bas instincts grégaires de la populace pour s’assurer que personne ne s’intéresse de trop près à sa politique (question purement rhétorique).

Je suis entièrement d’accord qu’il y a quelque chose de fondamentalement pourri dans le système bi-partiste des E.U., hérité d’une constitution anachronique et cultivé par une oligarchie socio-économique… se désintéresser de la question entièrement (ou choisir un troisième candidat qui ne peut pas, en l’état des choses, affecter l’issue démocratique du scrutin) ne va d’arranger quoi que ce soit.

10. Le 18 octobre 2004,
dr Dave

Tiens, justement, il y a un article dans le SF Chronicle d’aujourd’hui à ce sujet: http://sfgate.com/cgi-bin/article.cgi?file=/c/a/2004/10/18/SUPREMES.TMP

11. Le 18 octobre 2004,
O.

Plus j’y pense et plus pour moi il y a quelque chose de pourri dans tout système qui ne met pas de contrôle permanent des représentants par les représentés.

Trop de lois passent dans une assemblée vide par 12 voix contre 11. En France. Par exemple.

MrDave, vos arguments sont intéressants mais ne répondent pas à mes doutes.

Et je n’ai jamais prétendu me désintéresser de la question, mais ne rien en attendre. Les bonnes intentions du Kerry ne pèseront pas lourd devant les réalités. Ça serait bien que je me trompe, hein. On verra.

Blah ? Touitter !

Petite mort

C’est payant, plutôt cher, mais le concept est intéressant : Beautiful Agony, facettes de la petite mort. Exemples ici et .

En fait, je trouve ça bouleversant de beauté et d’humanité. Quelqu’un pour monter le même projet, mais gratuit ?

1. Le 16 octobre 2004,
karl

L’auteur du site m’a dit, il y a quelques mois que si tu envoies ta petite agonie et qu’elle est sélectionnée, tu as le droit à un accès gratuit. :)

Blah ? Touitter !