Journal de bord

mardi 21 janvier 2003

Logique aérienne

Je ne comprends vraiment pas la politique des compagnies aériennes qui fait qu’un allez simple est toujours plus coûteux qu’un allez et retour. Ainsi, pour aller à Fort-de-France l’année dernière, j’ai dû prendre un allez et retour. Alors que je n’avais besoin que d’un allez simple puisque que je revenais en métropole par la mer ! La préposée Air France a été incapable de me fournir une explication plus logique que “c’est toujours comme ça” et “vous savez, nous ne vendons généralement que des allez-retour”. Elle m’a donc vendu un allez-retour, moins cher qu’un allez simple, tout en savant pertinemment que je ne ferai pas usage de mon retour. Retour virtuel qui fut fixé à une date tout à fait arbitraire en fonction des tarifs.

La logique du transport aérien, c’est que la moitié d’un tout est supérieure à la totalité.

1. Le 6 février 2003,
Marie-Louise

Il s’agit de logique étatique et non pas aérienne ! L’explication est simple : éviter d’avoir des « blancs manqués », comme on les appelle à la Guadeloupe. En fait, l’état français s’assure que les métros ( = Français de métropole) qui vont aux Antilles françaises ont assez d’argent pour en revenir, et qu’ils ne finiront donc pas SDF là-bas. Seuls les résidants aux Antilles peuvent prendre un aller simple.

Marie-Louise P.S.: Je vous donnerais volontiers mon courriel s’il n’était pas automatiquement publié sur votre site.

2. Le 6 février 2003,
Laurent

J’ai observé le même phénomène sur d’autres destinations, aussi je ne pense pas que votre explication soit tout à fait exacte. D’autant plus que l’aller-simple est bien vendu, il est simplement plus cher.

Merci en tout cas de m’apprendre cette belle expression de “blanc manqué”. J’ai vu aux Antilles que ce ne sont pas les “blancs manqués” qui manquent…

Vous ne devez pas être une “métro” avec votre joli prénom…

3. Le 9 février 2003,
Marie-Louise

Désolée de vous décevoir mais je ne suis qu’une métro avec un prénom rétro.

Marie-Louise

Blah ? Touitter !

Troublant

Une création assez troublante.

http://www.alterfin.com/yariv/index.html (ADSL recommandé).

J’me souviens

Je prie aux lecteurs québécois susceptibles d’être heurtés par ce texte iconoclaste (provocateur ?) d’accepter par avance mes excuses.

Je viens d’apprendre (via la Grande Rousse) que le drapeau du Québec fêtait aujourd’hui ses 55 ans. Je le pensais beaucoup plus ancien en raison de sa facture très classique et très pure en regard des canons de l’héraldique (d’azur à la croix d’argent cantonnée de quatre fleurs de lys du même argent). Et ce drapeau fait tellement royaliste (bleu roy, croix et lys) qu’on le croirait volontiers de l’Ancien Régime.

Si je trouve le pavillon québécois simple et élégant, bien qu’à la symbolique marquée, j’ai toujours eu des doutes quant à la devise du Québec : Je me souviens.

La première fois que je l’ai vue, c’était sur une plaque d’immatriculation. C’était ma première visite à Montréal, et j’étais à bord du taxi qui me menait de Dorval au centre-ville. Je me suis alors dit que cela devait être une déclaration de foi du conducteur du véhicule. Il voulait sans doute dire “attention à toi, je t’ai à l’oeil”, comme d’autres ont des autocollants “bébé à bord” ou “Breizh atao”. Mais une minute après, je m’apercevais que tous les véhicules arboraient cette maxime. J’ai appris ce jour là que c’était la devise du Québec et je l’ai trouvée de prime abord dénuée de sens, et par la suite, évoquant un caractère revanchard et mesquin.

Je pense qu’il n’y a aucune grandeur de vue dans cette devise exclusivement tournée vers le passé. Elle exprime le ressentiment. Elle donne l’image d’un petit peuple renfermé, rancunier et intransigeant. De plus, elle n’a que peu de sens isolément, sinon un sens négatif. Pire encore, alors que je m’enquerrais du sens profond de cette devise auprès de québécois, je m’apercevais qu’elle était inexplicable par la plupart d’entre eux. Quelques uns m’ont dit qu’elle faisait peut-être référence au souvenir de ces maudits français (dont j’étais un vivant exemple, coupable par héritage), qui les avaient autrefois lâchement abandonnés dans leurs lointains arpents de sloche. D’autres m’ont évoqué le souvenir bien présent du “joug” anglais. En résumé : J’me souviens que l’histoire m’a fait bien des misères.

Peut-être devrait-il y avoir sur le drapeau du Québec un éléphant, animal qui symbolise la mémoire de maltraitances très anciennes ?

Le gouvernement du Québec a créé un site dédié aux armes et symboles du Québec. On peut y lire :

En concevant en 1883 les plans du Palais législatif de Québec (aujourd’hui l’Assemblée nationale), Eugène-Étienne Taché (1836-1912), architecte et sous-ministre des Terres de la Couronne, fit graver dans la pierre, sous les armes du Québec qui apparaissent au-dessus de la porte principale du parlement, la devise Je me souviens. Elle fut utilisée et désignée comme la devise du Québec durant plusieurs décennies. L’adoption en 1939 de nouvelles armoiries du Québec sur le listel desquelles elle figure, raffermit son caractère officiel.

En l’absence de textes où Eugène-Étienne Taché expliquerait ses intentions, c’est en se plaçant dans le contexte où il a créé cette devise qu’on peut en comprendre la signification. Taché a conçu la décoration de la façade de l’hôtel du Parlement comme un rappel de l’histoire du Québec. Il en a fait un véritable Panthéon. (…) D’autres éléments décoratifs évoquent des personnages ou des épisodes du passé et Taché avait prévu de l’espace pour les héros des générations à venir. La devise placée au-dessus de la porte principale résume les intentions de l’architecte : Je me souviens… de tout ce que cette façade rappelle.

En fait, personne ne sait au Québec ce que la devise veut réellement dire, et peu de citoyens sont au courant de cette conjecture architecturale. Je me souviens, oui, mais de quoi ?

1. Le 22 janvier 2003,
karl

Peut-être un “J’imagine” ou “J’improvise” ou “Je rêve” en remplacement de la devise actuelle.

Le problème de choisir une devise c’est qu’elle vieillit souvent.

2. Le 23 janvier 2003,
Martine

Je n’ai jamais vraiment eu de la difficulté à la comprendre, et je trouvais même ça poétique quand j’étais petite. Pour moi c’est “je me souviens”, dans le sens d’un devoir, d’une leçon à retenir, dans le sens de “je suis une personne qui se souvient”, qui ne renie pas son passé, qui le connaît, le reconnaît, avec ce qu’il a de bon et de mauvais, au lieu d’être paresseux et de ne tenir compte que de sa petite histoire récente.

Ça fait plusieurs fois que je lis sur le Web les commentaires de français qui trouvent que le drapeau québécois fait royaliste et j’en suis à chaque fois surprise. Il faut se rappeler que ces symboles de royauté ne valent rien dire pour nous, qui vivions bien loin de tout ça. Je pense que la plupart des québécois francophones associent simplement la fleur de lys au fait francophone, à leur héritage en terme de langue, et qu’ils l’opposent à la couleur rouge du drapeau canadien en affirmant ainsi leur différence.

Tout est toujours une question de perspective, bien sûr!

3. Le 23 janvier 2003,
Laurent

Merci Martine pour ce long commentaire.

Il n’y a pas d’étonnement à avoir. Pour un Français, la fleur de lys est le symbole indéfectible de la royauté. C’est ce symbole que le peuple en révolution à martelé sur les façades aristocratiques, c’est ce symbole qui était brodé sur le manteau bleu des rois de France et sur les étendards du pouvoir. Je t’invite à faire une recherche Google sur le terme “royaliste” et de visiter quelques sites au hasard, ils sont tous décorés de fleurs de lys, souvent à grand renfort de couleur bleue. Juste pour illustrer le fait que ce symbole a encore une forte prégnance et une actualité présente dans les esprits des hexagonaux. Pour nous, la fleur de lys est intrinsèquement liée à la royauté. C’est un héritage historique. Quand un Français découvre le drapeau québécois (et certains ignorent jusqu’à son existence), il pense instantanément : roi et Ancien Régime.

Pour un Québécois, il n’y a pas du tout ces référents, le fleurdelisé est le symbole inaliénable de la Belle Province. Nous n’avons pas du tout le même regard culturel sur ce symbole (et sur d’autres d’ailleurs). Comme tu le dis, c’est une question de perspective. Et le drapeau québécois ne soulève aucune question, le seul jugement que je peux porter, pour reprendre les mots de mon billet, c’est qu’il est simple et élégant. Et avec ses déjà 55 ans, tous ces moments forts de l’histoire du Québec qu’il a accompagné, il est non seulement légitime mais aussi porteur d’émotion.

En fait, je me rends compte que les symboles sont rarement universels. Les seuls qui peuvent vraiment l’être sont aujourd’hui les logos de Coca-Cola et de Nike…

Quant à la devise, c’est sans-doute aussi “une question de perspective” et je te remercie pour ton analyse poétique et morale, bien éloignée de mon sentiment assez négatif. Il demeure que cette devise mérite encore son explication et son exégèse.

Si quelqu’un a des textes de référence, qu’il m’en fasse part. Et, s’il vous plaît, ne me donnez pas l’explication “définitive” que j’ai trouvée sur quantité de sites Web comme quoi, ainsi que le disait Ernest Gagnon, “cette devise résume admirablement la raison d’être du Canada de Champlain et de Maisonneuve comme province distincte dans la Confédération”. Je trouve cette explication bien insuffisante.

4. Le 27 novembre 2005,
Ariane

Je viens de voir ce message en navigant à la recherche de l’histoire de mon “pays”. La devise du québec, sur son long : «Je me souviens que naquit sous le lys, je croîs sous la rose.» Cela représente bien le fait que nous avons conservé la langue française (quoiqu’un peu maganée)et le “mode de vie”, si je peux ainsi dire, français malgré que nous vivons sous un régime anglais. C’est ce qui nous distingue beaucoup du reste du Canada et qui fait que je suis extrêmement fière de ma province! Je n’ai pas peur de l’affirmer, j’ai même la devise du Québec symbolisé tatouer dans le dos ;)

5. Le 23 février 2006,
olivier

Amusant, j’ai toujours cru que ce “je me souviens”, découvert dans les mêmes circonstances que toi à peu de choses près (c’était en quittant Mirabel moi ;)), faisait référence aux paroles de la Claire Fontaine, autre fameux symbole francophone au Québec. Et je trouvais ça charmant, une devise tirée d’une chanson aux accents enfantins. Ton billet m’ayant interpellé, j’ai farfouillé et trouvé ce lien ma foi assez intéressant sur l’origine de cette devise.

http://www.vigile.net/dossier-histoire/index/4-jemesouviens.html

J’y ai perdu mes jolies illusions et gagné un poil de culture en plus. Pas sûr d’y avoir gagné à l’affaire :D

Olivier

Blah ? Touitter !

Useful Idiots

Je viens de lire dans plusieurs blogues américains des discours comme quoi ceux qui sont contre la guerre soutiennent ipso facto Saddam Hussein et les atrocités de son régime, voir pire encore. Je ne sais pas trop si c’est de la naïveté, de la bêtise ou bien de la désinformation volontaire.

Il semblerait aussi que la plus grande arme des va-t-en-guerre d’aujourd’hui est de faire l’amalgame entre pacifisme et extrême-gauche.

Moralité : il y a aussi des cons dans la blogosphère, comme dans la vraie vie.

Ce billet entre bien sûr dans ma catégorie “mauvaises humeurs”.