Et oui, que voulez-vous, la France, c’est un pays de merde, rétrograde et immobiliste. Oh, la France est loin d’être toute seule, vraiment très loin. Seuls quelques pays peuvent se vanter d’avoir une bonne longueur d’avance. Mais il se trouve que j’ai une idée de la France, une grande idée. Une France qui fut un temps à la tête des progrès sociaux, même si ce fut parfois au prix du sang, une France généreuse qui pouvait afficher sans honte sa devise : liberté, égalité, fraternité. Mais, force est de constater que ces mots ne tiennent plus aujourd’hui que du formalisme républicain et sonnent désespérément creux. La France se laisse distancer à cause d’une classe politique en déphasage avec la société, qui ne sait que grenouiller sous les lambris dorés et poussiéreux, et jouer devant les caméras la saynète du débat démocratique. La France sent le renfermé.
J’attends tellement mieux de ma patrie, nation qui ne fait guère preuve reconnaissance envers ses plus fidèles zélotes, où la citoyenneté est à plusieurs vitesses. J’ai rempli mes devoirs de citoyens, je me suis investi dans la société, je participe à ma mesure au développement national, mais je n’ai en retour que des demi-droits à un tel point que je suis aujourd’hui contraint à envisager l’exil.
Je me fais l’effet d’un amoureux trompé. C’est ça d’aimer avec trop de passion, l’amour rend aveugle et l’on attend trop de l’être aimé. Le retour au réalisme est cruel, alors, forcément, je suis aigri.
P.S. Que je sois clair, ce ne sont pas des passe-droits, ou des demi-droits auxquels j’aspire, c’est des droits pleins et entiers à vivre ma vie, comme les autres, dans le respect de ma personne et de ma dignité.
Le lapin qui braille dans la salle de bain, le visage dévasté, et qui dit sans un hoquet de douleur “J’trouve ça dur”.
Bien oui, c’est dur. C’est la vie. je suis bien placé pour en savoir quelque chose.
Mais l’important, c’est que nous sommes vivants, bien portants, puis il y a toujours ça.
Je passais ce matin dans un bureau, à la recherche d’un directeur artistique, mais il n’était pas dans les lieux. Seule sa collègue féminine était présente, me regardant d’un air interrogatif. Je lui dis alors : “il n’est pas là, beaucul ?”. Elle fit semblant de ne pas relever l’inhabituel surnom et me répondit qu’il était probablement à l’étage. Sans avoir à me le demander, elle avait tout de suite compris de qui je parlais.
Il faut que je précise que le jeune homme en question a un cul très mignon (entre autres) et que je sais fort bien que sa collègue est l’une des principales animatrices de Radio Couloirs. C’est donc tout à fait à dessein que je plaçais de façon badine et inopinée ce petit qualificatif, sachant bien qu’il ne serait pas perdu pour tout le monde.
De retour de déjeuner, voilà tout le monde de pouffer de rire dans les couloirs, de s’enquérir de Monsieur Beaucul à la porte du bureau des DA. Toutes les filles étant unanimes sur l’appellation : “comme cela lui va bien”. Comme un pantalon bien moulant, préciserai-je.
Et bien, figurez-vous que le principal intéressé ne prend pas du tout l’affaire d’un bon oeil. Il paraît vexé de se voir ainsi réduit à une partie peu glorieuse, mais ô combien palpable et aguicheuse, de son anatomie. J’y sens même une atteinte à sa virilité et une certaine trace de machisme blessé. Dire qu’il y a des filles qui supportent ce regard réducteur tous les jours…
En tout cas, Beaucul, cela va faire long feu dans l’agence… car, au vu de la majorité féminine, qu’il se prépare à l’entendre encore souvent. Les mâles n’ont plus le pouvoir.
P.S. Bien sûr, ce billet sur mon collègue callipyge entre en écho avec “Regardez-le dans les yeux”.
Après le coup des canards, Montréal remet ça une deuxième fois.
Poétique, simple, imaginatif, créatif et sans médiatisation excessive. Bill du New York City’s Mob Project disait à Wired : “Really, the idea is so simple that it’s hard to mess up. What’s really been cool is seeing the ways that organizers in different cities have interpreted the idea differently.” Clairement, à mes yeux, Montréal remporte la palme.
Par la voix de Melodius, les libertariens pur-jus se révoltent contre certains amalgames, et ils ont bien raison car cela leur fait un tort considérable. À lire ici.
Comment se fait-il alors que, sur le web francophone, il y a tellement de “libertariens” dont l’idéologie semble se résumer à un soutien inconditionnel aux néo-conservateurs américains défenseurs d’un impérialisme US et à la droite sioniste israélienne, le tout nappé d’islamophobie rabique ? Pourquoi diable ces gens qui professent, il est vrai, un certain libéralisme économique (ah, le libéralisme économique !) défendent-ils le USA Patriot Act, la guerre en Irak, la colonisation des territoires occupés, et j’en passe et des meilleures, le tout en lançant force anathèmes contre les libertariens américains, qui ont le mauvais goût de ne pas partager leurs vues.
Bonnes questions en effet.
À lire également chez Pierre, le libertarianisme pour les nuls.
merriadoc
D’une certaine manière, vous êtes une “génération sacrifiée”. Moins qu’il y a une centaine d’années, mais peut être plus que dans un siècle. Chacune doit jouer on rôle, pour la suivante, non ? Et l’exil, est ce la meilleure chose ?
zboob
Est-il plus courageux de partir ou de rester ? Doit-on continuer la “lutte” ou repartir à zéro ? Je n’ai malheureusement pas de réponse…
Billet reçu 5/5 et 100% d’accord avec toi. Je partage ta “mauvaise humeur” et là non plus, ma réflexion ne m’a pas apporté pour l’instant, de solutions satisfaisantes…
Guy
Je comprends ta douleur, Laurent. Mais si tu choisis l’exil, tu le sais bien, tu auras ton lapin pour te creuser un joli terrier. De plus, malgré ce qu’on peut dire du Québec, plusieurs Français arrivent et demeurent. J’en connais plein qui font leur niche et qui y sont heureux (le tout dernier en liste, Olivier: http://www.carnetsdimages.org/index.php?p=7&pb=128&debut=0). Le Québec est, dit-on, à cheval entre l’Amérique et l’Europe. Je crois plus juste de dire que le Québec est un pays d’Amérique parlant français. Il est rude, parfois ignare et inculte, il est cependant curieux, et n’a pas peur d’explorer (je parle ici des artistes, surtout). Nous passons pour des latins aux yeux des anglos, mais les Français qui débarquent nous trouvent joliment britannisés… Bref, peut-être le Québec est-il une terre d’exilés. Nous pouvons être rudes avec les étrangers, surtout avec les Français?, sans doute, mais j’imagine que, toutes proportions gardées, il y a plus de Français qui ont la chance de venir s’établir ici que de Québécois qui obtiennent la permission de le faire en France… Je dis ça à tout hasard, je n’ai pas vérifié, mais le cas du Lapin en est un bon exemple. Encore là, ce ne sont que des conjectures. On peut se poser la question suivante: comment se fait-il que certains y parviennent et d’autres pas? (et ce, dans les deux sens). Ce n’est pas tout le monde qui a la couenne assez dure pour vivre en exil. Point à la ligne?
Laurent
Guy : “il y a plus de Français qui ont la chance de venir s’établir ici que de Québécois qui obtiennent la permission de le faire en France”, c’est bien le noeud du problème. La bonne fée de l’hétérosexualité ne s’étant pas penchée sur mon berceau, je n’ai aucun droit dans mon pays à vivre ma vie et je me me fais jeter pour ce que je suis intimement. En tout cas merci pour le gentil message.
Guy
Laurent: « La bonne fée de l’hétérosexualité ne s’étant pas penchée sur mon berceau, je n’ai aucun droit dans mon pays à vivre ma vie et je me me fais jeter pour ce que je suis intimement. » De ce côté, en effet, c’est presque un jeu d’enfant de se faire accepter ici par le gouvernement provincial, et bientôt, Cour suprême oblige, par le fédéral. L’union civile vient d’être adoptée et offre protection légale aux couples homosexuels. Olivier est tombé en amour avec Jean-Marc. Jean-Marc a fait sa demande et a été accepté. Le processus aura duré moins d’un an. La même chose pour Marc, graphiste français, dont le copain belge est arrivé, neuf mois plus tard. Et même avant l’union civile, ces couples étaient considérés comme tels par l’immigration québécoise. Bref, si on vous considérait vraiment maudits, vous les Français! En passant, le terme « maudit » ici n’a pas le même sens qu’en France. Il se rapproche plus du « cré », « satané » que de « maudit ». En fait, il se situe entre les deux… On le dit souvent par indulgence. J’ai pour preuve un certain Philippe qui est venu s’établir ici. Le pauvre collait à ses habitudes françaises comme à sa petite culotte. Il était vraiment pauvre, au début, n’avait pas de quoi manger. Or, il refusait systématiquement nos invitations à venir partager nos repas parce que nous ne mangions pas à la même heure que lui!!!! Ça, c’est un maudit Français! :-) :-) :-) Et, bien entendu, il est reparti chez lui. Bref, il faut, un temps, conserver la tête basse, quand on arrive dans un pays différent (oui, le Québec est vraiment différent de la France, et n’est pas la terre d’accueil que plusieurs croient, oui, le Québec est rude, oui, nous n’avons que deux semaines de vacances officielles par année, mais, oui, le Québec s’éveille de plus en plus, s’invente son terroir, aime bien rire, aime être entre amis, nous avons du vin de tous les pays du monde, le confort occidental profite ici de la présence américaine, tout près même si nous détestons les maudits « amaricains », j’ai un oncle qui vit là-bas, il est pro-Bush, imaginez!). Tout se fait, et l’exil s’invente.
neige
La France est une vieille société où tout est plus long et lent à transformer. Ses habitants semblent moins ouverts aux valeurs pouvant remettre en question l’ordre des choses. C’est aussi une société statifiée, figée dans ses classes sociales, sa mâlitude et hétérosexualitude et le sentiment de privilèges qui leur correspondent.
Martine
J’ai voulu me prononcer plus tôt sur toute cette histoire du Québec et de son lien avec les maudits français mais j’ai manqué de temps. Je le ferai donc ici.
Je suis à 100% d’accord avec Guy. Le mot “maudit” au Québec, n’a pas de connotation lourde, bien au contraire. Ma mère me disait souvent “maudite Martine” quand je faisais quelque chose de très typiquement moi. C’est à la fois un terme d’attachement, de reconnaissance d’une différence et oui, probablement d’un peu d’impatience. Je ne dirais jamais “maudit Robert” si je détestais un certain Robert. Ça serait être trop gentil envers lui.
Quelqu’un d’autre l’a déjà dit avant moi dans un commentaire: le québécois sont souvent des gens complexés qui ont dans leur karma un sentiment d’infériorité assez fort (même si ça change), et se sentiment se manifeste souvent envers les français.
Ceci étant dit, je comprends qu’on puisse en avoir assez de se faire traiter de “maudit quelque chose” ou d’entendre les pires clichés à son propos. Je pense que je vais développer sur le sujet sur mon carnet parce que je vais prendre trop de place ici…
moimême
Bonjour,
Je partage votre avis d’autant plus que je suis venu de Tunisie pour faire mes études universitaires et actuellement je travaille ici. Aujourd’hui je suis très déçu de la conjoncture dans ce pays et de l’état d’esprit de certaines personnes. Beaucoup d’immobilisme … la roue ne peut pas tourner comme ça … je paye cher mes impots aujourd’hui + PV de stationnement + différentes taxes … je le fais avec plaisir, c’est le prix de la solidarité, malgré que vue mon statut d’étranger non communautaire, je n’ai droit à aucun privilège … mais si c’est pour que ça soit mal géré ou pour payer des gens qui trichent ou qui ne veulent pas travailler, là je dis non… je quitte prochainement ce pays, ça devient insupportable avec tout mon grand respect à ce beau pays !!
Anne Onyme
La France, est effectivement un pays rétrograde qui tente de se faire passer pour une démocratie, un pays qui a soutenu de nombreuses dictatures…un pays dont les citoyens semblent s’être résignés à se laisser gouverner par une poignée d’individus qui les méprisent plutôt que de prendre leur destin en main, un pays ou ne comptent que les apparences, où le fascisme sévit toujours il semblerait comme au québec, et où il est encore permis de dire qu’un être humain est inférieur à un autre… La France n’est plus. Rest in peace.
Olivier
“De ce côté, en effet, c’est presque un jeu d’enfant de se faire accepter ici par le gouvernement provincial, et bientôt, Cour suprême oblige, par le fédéral. L’union civile vient d’être adoptée et offre protection légale aux couples homosexuels. Olivier est tombé en amour avec Jean-Marc. Jean-Marc a fait sa demande et a été accepté. Le processus aura duré moins d’un an.” Attention, Guy, les critères d’immigration du Québec n’ont rien à voir avec notre relation. Jean-Marc a fait ses démarches comme tout nouvel immigrant, et a été choisi pour son expérience professionnelle, parce qu’il est francophone et qu’un officier de l’immigration de la Délégation du Québec l’a trouvé “bon pour le service”. Il n’a jamais été question de regroupement familial, en ce qui nous concerne. En revanche, ce sera sans doute plus facile pour nous de vivre “socialement” notre homosexualité, grâce à la Charte des Droits et Libertés. Sinon, je me demande comment va réagir l’officier de l’Etat-civil de ma commune de naissance, quand le consulat de France va lui envoyer la copie de l’acte de notre futur mariage, célébré à Montréal. ;o)
Olivier
“Guy : “il y a plus de Français qui ont la chance de venir s’établir ici que de Québécois qui obtiennent la permission de le faire en France”, c’est bien le noeud du problème. La bonne fée de l’hétérosexualité ne s’étant pas penchée sur mon berceau, je n’ai aucun droit dans mon pays à vivre ma vie et je me me fais jeter pour ce que je suis intimement.”
Tu sais, Laurent, je crois que c’est plus une question de nationalité que de sexualité. Nos Etats sont en retard pour tout ce qui touche aux relations “internationales”. Ton lapin est Canadien, tu es Français. Ma cousine est Française, son mari est Américain. Tous les quatre, vous êtes confrontés au même problème. Et bien qu’hétérosexuelle et mariée devant môssieur le maire avec son ti-gars d’Atlanta, ma jolie cousine n’a pas pour autant plus de droits que ton Lapin gourmand et toi. Elle attend son visa “d’épouse” depuis des mois à Paris, pendant que son mari l’attend de l’aiutre côté de l’océan. Une autre de mes cousines, mariée avec un Anglais d’Angleterre n’a pas eu ces mêmes soucis. Ton lapin serait une Afghane ou une Pakistanaise, je pense que ça serait beaucoup plus difficile, hétérosexualité ou pas.
En attendant, si tu passes par la Belle-Province, ça me fera plaisir de te rendre le souper que tu m’as offert, il y a déjà 4 ans, en Bretagne! ;-)
Olivier
Blah ? Touitter !