Journal de bord

samedi 22 novembre 2003

Mollesse

Est-ce un phénomène dépressif lié au raccourcissement des jours ? L’usure d’événements personnels pas toujours faciles à gérer, d’un avenir incertain et sans repères ?

Est-ce le contrecoup dû à la réception par une population toujours plus large, qui engendre des réactions déplacées qui fatiguent, la perte de la notion d’espace intime d’expression à destination d’un public choisi, d’un cercle de pairs, ou encore, le risque à s’exposer de plus en plus mal assumé ?

Est-ce la certitude d’être lu qui inhibe ? Ou la perte du plaisir d’écrire ? La crainte de ne pas répondre aux attentes (car figurez-vous que les lecteurs ont leurs attentes et ne ne privent pas de vous le signaler) ? Le souci de ne pas apparaître comme péremptoire ou infatué de son ego ? Une envie subite d’humilité et de discrétion ?

Est-ce l’exaltation de la découverte d’un nouvel outil qui est retombée ? Je me lasse vite de mes jouets. Peut-être aussi suis-je versatile et inconstant…

J’ai la nostalgie des débuts de ce carnet. Des joies de la découverte, de l’interactivité, du partage, de la rencontre. J’avais vingt lecteurs et je connaissais chacun.

Puis, je suis tombé dans les fossés du cybernarcissime, dont je connaissais pourtant déjà l’existence.

Aujourd’hui la flamme s’est éteinte. Je cherche d’autres pistes, mais je ne trouve pas. Je tente des diversifications, mais dureront-elles ?

Le billet qui m’a le plus marqué ce mois-ci est celui qui a signalé l’arrêt, qu’on ne se sait provisoire ou définitif, de Damelon Kimbrough :

While I will continue to blog in some fashion I am not sure it will be this blog. I’m going to take the next six weeks or so to think about what I really want to do. The one thing that’s certain is that when I do return my engagement on political issues will be close to, if not completely, non-existent. Keeping a journal is enjoyable, but rehashing material that will be beat to death on scores of other sites just strikes me as such a horrible waste of my time. I need to find a way to keep my experience a positive one even no one else bothers to.

Des paroles qui entrent étrangement en écho avec mes préoccupations du moment.

Ce qui m’a refait penser à l’arrêt des Autres, que je n’avais pas compris à l’époque, ou encore aux vacances prolongées d’Emmanuelle. Et puis, tant d’autres, comme Nacara par exemple.

La blogosphère me fait l’effet d’une cours de récréation où l’on vient faire son petit tour, où l’on s’amuse, et puis s’en vient le sentiment de vanité, et on quitte la salle du banquet en catimini.

La blogosphère personnelle est à géométrie variable, d’abord le cercle des amis et proches, des compagnons de route, centré sur vous, puis celui des relations. Et plus on s’éloigne de ce centre de gravité, plus grand est le risque de se brûler les ailes.

Je ne souhaite plus parler d’actualité, de débats. Je ne veux plus m’épuiser dans des procès sans fin à la bêtise. Je ne souhaite pas pour autant étaler ma vie, mon quotidien. Alors, que faire ?

N’est-ce encore qu’une grosse fatigue passagère ? Ou la cassure est-elle plus profonde ? Le soufflé est-il retombé ? Pour l’instant, j’attends l’étincelle qui va raviver la flamme et réfléchir, tenter de me consacrer sur l’essentiel et faire fi de ces divertissements qui, certes plaisants, m’ont sans doute éloigné d’un travail plus exigeant mais plus enrichissant.

Mais pour le moment, je suis fatigué. Chuis tanné.

1. Le 22 novembre 2003,
Thomas

Il y a de l’écho ? http://neiges.blogspot.com/20031101neigesarchive.html#106914077972404815

2. Le 22 novembre 2003,
Steph

Je vois tant de blogueurs autour de moi passer par ces phases de remise en question, d’envie de poser les plaques, de fermer boutique avec ou sans destruction des archives. Tant, que ça finit par donner l’impression que tout le monde y passe. Qui n’a jamais fermé son blog ou songé à le faire?

J’avoue pour ma part que ça ne m’a jamais traversé l’esprit. J’ai des periodes creuses et des périodes intenses, certes, mais en plus de trois ans, jamais je n’ai envisagé de fermer mon weblog. Du coup, je finis par me demander si c’est moi, l’anormale. Y a-t-il d’autres gens qui ressentent les choses ainsi? Quelqu’un a une théorie sur ce sujet?

Quoi qu’il en soit, toute ma sympathie, Laurent. Je te souhaite trouver une réponse qui te conviendra, quelle qu’elle soit!

3. Le 22 novembre 2003,
aqb

Je comprends bien ton sentiment Laurent, et le choix t’appartient tout entier. Peut-être est-ce une envie d’autre chose. Ceci-dit, les questions que tu poses et les pistes que tu esquisses sont interessantes. Et finalement un blog, n’a-t-il pas le droit, à l’image de son auteur, de connaître des moments de fatigue, de vide, des passages d’hibernation?

4. Le 22 novembre 2003,
Guy

L’acte de créer ne possède pas toujours le goût confortable d’un sucre d’abeille. Et même lorsque l’on mord à pleine dents dans le miel, l’ivoire retransmet l’écho apeuré de la pensée : qu’est-ce que je fous sur cette Terre, moi? Le cyber, ou la main, c’est du désir, et le désir, comme la mort, se répète sans cesse. L’humilité qui se pointe dans tes paroles est tout simplement le signe d’une belle maturité.

5. Le 22 novembre 2003,
François Granger

Je pense que c’est le propre des gens qui s’exposent d’être exposés ;-)

Le fait de démarrer un carnet n’est-il pas le signe d’un besoin d’être entendu ee écouté. Et plus le public s’élargit, plus le risque de “retours négatifs” s’accentue…

C’était ma théorie du jours à cent sous qui font cinq francs, donc pas tout à fait un Euro…

Courage, tiens bon !

6. Le 23 novembre 2003,
Isabelle

Je me posais la question du blog-blues hier chez Pierre Carion, eh bien me voilà servie ! Toutes ces hypothèses méritent d’être retenues. Mais je ne peux m’empêcher d’imaginer que le fantasme favori du blogueur qui s’est construit une existence dans la blogosphère et qui respire au rythme de ses posts quotidiens, est de se laisser tenter une petite mort : “comment le monde tournerait-il sans moi?” et “comment existerais-je hors de ce monde et à l’insu de ceux qui font exister ce monde?”.

On avance souvent que le blog est un moyen de dialogue, de convivialité, de démocratie. Finalement ça met peut-être en jeu des questions beaucoup plus existentielles.

Mais ces moments de retrait qui miment la mort sont sûrement nécessaires pour continuer de plus belle :))

7. Le 24 novembre 2003,
manur

pareil que Steph. (non tu n’es pas anormale ! ;o)

8. Le 24 novembre 2003,
Steph

merci manur :-)

et Isabelle, je suis assez séduite par une interprétation qui verrait la fermeture du blog comme une mort symbolique… réversible.

9. Le 24 novembre 2003,
mouche

Jamais eu l’idée de fermer, de toute façon je pourrais pas, je suis bien trop accros. ;)

Blah ? Touitter !

Net économie

Quand je vois cet enthousiasme que je qualifie de délirant, je me dis crûment qu’il faut arrêter la branlette. J’ai le sentiment de relire des envolées lyriques de la glorieuse époque de la “Net-Économie”.

Navré d’être si rabat-joie, mais le phénomène blogue est un microcosme, certes passionnant, mais qui n’a rien de révolutionnaire à grande échelle et Howard Rheingold me fait figure de gourou pathétique. (Si il y a révolution, regarder plutôt du côté de RSS).

Et quand je lis “ceux qui ne percevront pas l’ampleur de ce phénomène rapidement seront moins efficaces, moins rapides, moins informés. Ils seront exclus des nouveaux réseaux communautaires qui se forment constamment”, j’ai l’impression que l’on nous dicte notre façon de vivre pour le bénéfice de certains entrepreneurs, que l’on nous ressert le vieux culte de la performance qui me paraissait pourtant plus très à la mode. On peut très bien vivre sans blogue, comme je vis sans SMS et sans téléphone portable.

Vous voyez, je ne suis pas mort, j’ai encore la capacité de m’indigner…

PS. Un autre son de cloche par John C. Dvorak.

1. Le 23 novembre 2003,
Loic

Chacun son avis, je respecte parfaitement le tien et j’ai bien conscience du nombre de bloggeurs qui arretent de publier. Pensais-tu aussi que le P2P et des outils comme Napster n’allaient pas renverser des sociétés aussi puissantes en si peu de temps ?

Nous verrons bien, je me suis souvent trompé, mais je pense ce que j’écris et j’écris ce que je pense, 40% de croissance sur le nombre de blogs chaque mois m’inspire, forcément.

Restons en contact et voyons comment tout cela évolue.

2. Le 23 novembre 2003,
kone

cher monsieur nous sommes un groupement villageois regroupé au sein d’une coopérative dénommée CoopeTor (Cooperative desOrpailleurs deTortiya). Tortiya est un chef-lieu de Sous-Prefecture situé à environ 180 km au nord de Bouaké et à environ 850km d’Abidjan la capitale. Notre site (Sangadjokaha)à environ 42km au sud du chef-lieu de Sous-Prefecture produit entre 25 et 30kg d’or en poudre de natif brut de 22 carats par mois avec une téneur de 916eme/1000. Depuis bientôt un an notre pays,la Côte d’Ivoire,subit une rebéllion qui a divisé le pays en deux:la partie Nord,sous contrôle des rebelles et le Sud sous contrôle gouvernemental. cette situation nous a fait subir des rackets de la part des rebelles. . Pendant un an donc,notre production n’a pu etre ecoulée du fait de l’inaccessibilité de notre region.Aujourd’hui,à l’heure de la normalisation,notre produit est frappé par une interdiction(officieuse) de vente du fait que le pouvoir en place soupsonne l’or de notre region pour le ravitaillement en arme et en logistique pour le compte des rebelles . C’est donc dans cet etat d’ esprit que nous nous sommes dit qu’en cherchant des partenaires etrangers et surtout occidentaux nous pouvions mieux vendre nos produits . Nous avons actuellement un stock de 178kg d’or que nous avons pu deplacer à la capitale et que nous proposons au prix de 7100euros/kg. Si notre proposition vous interesse,veuillez nous contacter. Nb: Nous ne disposons que de la licence d’exploitation de notre Cooperative,l’Etat ne nous fournissant aucun autre papier nous permetant d’écouler notre production à l’étranger.Mais,nous disposons de differents systemes pour passer notre marchandise dans un pays voisin où la vente de l’or est plus libre. Dans l’attente de vous lire,veuillez agréer monsieur, nos sinceres salutations.

M KONE KAFANA

tel:00225 07 42 71 14

3. Le 23 novembre 2003,
Guillermito

J’allais écrire quelque commentaire désabusé de vieux con qui a déjà vu un certain nombre de “next big things” mordre le bitume amer des autoroutes de l’information, mais après avoir lu le commentaire de type “nigerian scam” ci-dessus, je ne peux pas contrôler un fou rire hystérique :)

4. Le 23 novembre 2003,
mattico

Le p2p et Napster n’ont rien renversé du tout … Sauf si tu considéres une baisse de 5 % des ventes de disques comme une évolution majeure de notre société.

5. Le 23 novembre 2003,
Le lapin

Le blog n’est pour qu’une évolution d’outils internet déjà existants à mi-chemin entre le site personnel et le forum de discussion. Son seul vrai avantage comme outil de diffusion d’information demeure sa grande facilité d’utilisation. Plus besoin d’être un spécialiste en HTML pour publer en ligne.

La grande révolution c’était l’arrivée d’Internet dans les foyers et c’était hier.

6. Le 23 novembre 2003,
koni

D’accord avec mattico et le lapin. Le prix d’un disque est super élevé. Les majors se sont sucrés sur le dos des gens et si aujourd’hui les gens se “vengent” grâce à l’Internet tant mieux. Le P2P ne m’a pas empêcher d’acheter des CDs. Par le passé j’enregistrais les titres à la radio ou copiait des CDs “à la mode” sur K7, aujourd’hui je me constitue une MP3thèque, parce que c’est plus pratique et me permet de vivre des moments de Nostalgie en les réécoutant. Je ne les aurais pourtant pas acheté dans les bacs ni même en ligne …

Bref je m’écarte du sujet initial. Ce qui est important c’est que 20 Millions de français sont sur le net et cela change la donne. Mais les blogs ne sont pas une révolution en soi, peut être un catalyseur ou un moyen de se perdre dans les méandres des liens et rater l’essentiel: la vie.

koni

7. Le 23 novembre 2003,
Guy

Un phénomène ne se mesure pas tant dans son émergence que dans sa survie. On a dit énormément de choses sur l’arrivée du Net et il est fort possible que ce qui naîtra de tout ça sera différent de ce que l’on croyait. Par exemple, le fait que les communautés de blogueurs se limitent généralement à 20 personnes relève de la nature humaine. Un individu normalement constitué n’établit en même temps pas plus de 20 liens plus ou moins durables. Ce cercle peut s’atrophier ou s’élargir, mais la moyenne serait de 20. En moment de “crises” toutefois, lorsque le momentum se crée, ces multiples microcosmes peuvent se joindre et se défaire. Une expérience intéressante a été effectuée en Alberta (je crois). En construisant un quartier tout neuf, on a installé un système intranet dans les maisons. Les banlieusards partagent le même réseau, forment une communauté d’office. Au départ, les gens y ont vu un gadget, sans plus. Mais, après un an, on s’est rendus compte que les gens se visitaient beaucoup (en vrai), étaient beaucoup plus conscients de leur voisinage, s’étaient créé une communauté d’entraide, etc.. Ils s’étaient “découverts” par le net. Un projet similaire en France existe, dans un petit village. Loin d’isoler les gens, l’Internet rapproche. L’être humain a besoin de contacts et ces liens ne se feront pas à travers un gros village global anonyme, mais bien par la jonction de petites alvéoles indépendantes et riches. Le blogue ressemble à ça, il me semble.

8. Le 23 novembre 2003,
neige

Guy … «…» Ça rapproche… En autant que chacun trouve dans l’autre une part de lui-même, tous et chacun très égoïstement très affairés à se complaire ou s’haïr mutuellement. La blogomite est une maladie transmise virtuellement qui se guérit.

9. Le 24 novembre 2003,
Conrad

Clairement les blogs sont un microcosme, une petite communauté de plus, enfin plutot un ensemble de micro communautés. Un petit nombre va en vivre peut-être comme ailleurs (les passionnés de 4x4, de voitures anciennes ETC) et d’ailleurs ces gens ne feront pas que des choses bien investis de leur pouvoir. Certains se sentiront (se sentent) des stars. Rien de nouveau sous le soeil. Un endroit de plus à squatter pour le marketing mais qui ne détronera pas les autres.

Pour le p2p personne ne semble avoir remarqué que 1) c’est un peu la crise économique 2) les jeunes et les parents et tout le monde en fait avant n’avaient pas de forfait téléphone, internet, satellite et j’en passe. Que je sache les salaires n’ont pas augmenté de 50% dans ce pays en quelques années. Les clopes si.

Blah ? Touitter !