João Alves Menezes
Ses torts : avoir la peau légèrement basanée et paniquer devant une escouade de policier. La sanction : 5 balles dans le dos la tête.
Un témoin, Mark Whitby, a vu l’homme monter dans un wagon du métro. « Il est monté dans le train et j’ai regardé son visage. Il regardait de gauche à droite, mais il avait vraiment l’air d’un lapin, d’un renard » traqué. « Il avait l’air absolument mort de peur », a-t-il ajouté. Les policiers, explique-t-il, étaient à moins d’un mètre derrière lui. « Ils ont déchargé cinq coups sur lui. Je l’ai vu. Il est mort, cinq coups, il est mort ». [AP.]
“One of them was carrying a black handgun - it looked like an automatic - they pushed him to the floor, bundled on top of him and unloaded five shots into him,” he said. [BBC.]
Dans un pays réputé pour ses policiers flegmatiques et sans armes, la bavure semble d’autant plus grave. J’ai tendance à y voir un peu une victoire du terrorisme. Si les gens cèdent à la paranoïa, à l’affolement, si nous modifions nos modes de vie, nos valeurs, nos droits… ce sont les terroristes qui gagnent.
On fera également remarquer qu’il est définitivement suicidaire de tirer sur un homme suspecté de porter une ceinture d’explosifs tout en étant à un mètre de lui. La victime comme les agresseurs n’ont pas réfléchi un instant dans ce moment de pure panique. Cf. commentaire François Briatte.
Cependant, il y a des gens pour trouver cette regrettable méprise exécution sommaire “tout à fait justifiée” :
Tout devient dès lors beaucoup plus complexe, même s’il est évident que le fait que l’homme sortait d’un lieu suspect, sous surveillance policière, et était habillé d’une manière qui pouvait légitimement faire craindre qu’il dissimule de quoi se faire sauter de la manière la plus meurtrière possible, justifie ainsi à mes yeux pleinement l’intervention de la police tant sur la forme que sur le fond. [Un Swissroll.]
La mort d’un innocent n’est jamais justifiable, en tout cas, à mes yeux.
temps
La bavure n’est pas policière, La bavure est individuelle. Nous sommes dans un pays ou le cas de conscience est reconnue depuis Charles de Gaule. Ainsi chacun est responsable de ses actes. Je ne connais pas de loi en France qui autorise à tuer un innocent, la police est composée de gens qui font un métier difficile, mais ces gens sont des hommes. Des hommes avec leurs qualités et leurs défauts comme tous les hommes. Certains sont de sexe féminin, d’autres blanc ou bazané, tous égaux. Le corps policier ne chasse pas le bazané en france. Cordialement
Laurent
“Le corps policier ne chasse pas le bazané en France.” Hummm… Pas officiellement bien sûr, mais nous avons aussi notre lot de bavures. Doit-on rappeler la mémoire de Malik Oussekine et des motocyclistes-voltigeurs ? (Entre autres…)
François
Si j’ai bien suivi le suspect est décédé d’un tir à la tête (mais en même temps cinq tirs à la tête ça me semble beaucoup). Tu peux préciser, même si c’est un peu morbide : est-ce que la victime a pris des balles dans le caisson et dans la caboche ?
Laurent
Je n’avais pas de précisions là dessus. Ouch… sa tête ne devait pas être belle à voir… Je corrige en conséquence.
Eolas
“Le corps policier ne chasse pas le basané en France”. Non, pas du tout. Pour ma part, j’ai pris le métro quotidiennement pendant 20 ans. JAMAIS on ne m’a demand mes papiers. Jamais. J’ai des amis un peu basanés. Ils ont cessé de compter.
Je ne suis pas d’accord avec le swissroll (et vais le lui faire savoir en commentaire). La seule réserve que j’apporte est que la bavure, on ne sait qu’après si c’en est une ou pas. On ne peut exiger une obligation de résultat. Mais face à une menace comme le terrorisme, il y a toujours le réflexe de durcir la législation, de donenr des pouvoirs extraordinaires, et ça donne les lois scélérates, le Patriot Act, les lois d’exception sur le terrorisme en France. Et c’est une victoire du terrorisme, qui hait les démocraties et la liberté qui est son essence.
Celui qui sacrifie sa liberté à sa sécurité ne mérite ni l’un ni l’autre.
Eolas
Temps : “Je ne connais pas de loi en France qui autorise à tuer un innocent”.
Elle existe. C’est l’article 174 du décret du 20 mai 1903. Si les policiers ne peuvent faire usage de leur arme qu’en cas de légitime défense, la gendarmerie peut ouvrir le feu dans 4 cas : Lorsque des violences ou des voies de fait sont exercées contre eux ou lorsqu’ils sont menacés par des individus armés ; Lorsqu’il ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent, les postes ou les personnes qui leur sont confiés ou, enfin, si la résistance est telle qu’elle ne puisse être vaincue autrement que par la force des armes ; Lorsque les personnes invitées à s’arrêter par des appels répétés de : “Halte gendarmerie”, faits à haute voix, cherchent à échapper à leur garde ou à leurs investigations et ne peuvent être contraintes de s’arrêter que par l’usage des armes ; Lorsqu’ils ne peuvent immobiliser autrement les véhicules, embarcations ou autres moyens de transport dont les conducteurs n’obtempèrent pas à l’ordre d’arrêt.
Notez que dans les trois derniers cas, il n’y a pas légitime défense (faute de menace sur la personne des gendarmes et de proportionnalité dans la riposte), et qu’il n’est pas exigé la preuve que la personne ait effectivement entendu les sommations ou vu les signaux lui intimant l’arrêt. Un innocent peut parfaitement se faire cribler de balles.
Tor
En tout cas, Bon débarras.
Damien B
Eolas, une remarque et un question. La remarque : on parle d’utiliser des armes, pas de tuer. Aussi vrai qu’on peut tuer sans arme, on peut ne pas tuer avec arme. La question : qu’est-ce qu’un innocent ?
Pascal
“Le corps policier ne chasse pas le bazané en france”. Il faut être blond aux yeux bleus pour écrire une connerie pareille. Comme Eolas le dit quelques commentaires plus haut, pour ma part j’ai arrêté de compter le nombre de contrôles d’identité plus ou moins musclés et plus ou moins polis auxquels j’ai dû faire face depuis mon adolescence. Le dernier remonte à moins d’une semaine.
Hoedic
Ce qui est intéressant c’est qu’immédiatement après l’annonce, plusieurs témoins ont dit avoir reconnu en lui une personne d’apparence pakistanaise ou sud-asiatique en gros.
Bien entendu je n’ai pas vu à quoi ressemblait ce pauvre homme, mais ça donne fortement l’impression que l’on voit ce que l’on veut bien voir. À partir du moment où il a, par reflexe, décidé de fuire devant la police, sa vie en était surement joué car suspectant l’attentat suicide, les agents ont tout de suite décidé de viser la tête pour l’empêcher dans la mesure du possible de le laisser se faire sauter.
Pour avoir déjà fuit devant des flics (du métro), ça porte à réfléchir…
Eolas
Damien B. : L’usage de l’arme implique le risque direct et immédiat de tuer quelqu’un. Je crois même pouvoir affirmer que les armes sont conçues dans ce but, et qu’une balle ratant sa cible est considérée comme “perdue” et le coup tiré “raté”. Je ne distingue donc pas, et la loi ne le fait pas non plus.
Qu’est ce qu’un innocent ? La réponse est : un non coupable. Je me permets de rappeler que l’innocence est présumée e nFrance, seu lu ntribunal légalement constitué pouvant briser cette présomption. Un gendarme armé d’une arme de poing n’est pas un tel tribunal. Ergo, par définition, c’est un inocent qui est tué. Et comme la mort met fin à l’action publique, le décédé ne pourra jamais être considéré comme coupable. C’est donc forcément un innocent qui est tué.
Damien B
La loi aurait pu dire aussi que les armes servent en premier lieu à dissuader, en second lieu à blesser et en dernier recours à donner la mort avec intention quand il s’agit d’un gendarme… mais bon, ma connaissance du droit est très limitée, et cette nuance n’existe apparemment pas.
Eolas
Il n’y a pas à connaitre ou non le droit pour cette discussion : la raison suffit amplement. En effet, l’usage d’une arme est un acte unique : on provoque le tir d’un projectile qui risque d’être léthal s’il rencontre quelque chose de vivant sur sa trajectoire. Comment dire qu’un acte unique doit d’abord dissuader, ensuite blesser, enfin tuer si aucune des deux premières possibilités n’a fonctionné ? Tirer une balle en tir tendu est prendre le risque de tuer. Pas essayer de dissuader. La loi exonère le gendarme qui a tiré dans une des quatre circonstances pré-citée de toute responsabilité pénale. Peu importe qu’il ait voulu tuer ou non. Peu importe que le résultat ait dépassé sa volonté (de dissuarder ou seulement blesser) ou soit conforme.
Blah ? Touitter !