Carré rouge vu de France
Merci France 2. (Journaliste : Maryse Burgot.)
Merci France 2. (Journaliste : Maryse Burgot.)
La loi spéciale a fait monter la tension d’un cran. On ne connaît pas l’avenir, mais on sait qu’elle ne rétablira pas l’ordre. En tout cas, pas avant d’avoir transformé des milliers de jeunes en criminels.
« Vous n’aurez pas assez de juges, vous n’aurez pas assez de prisons », a prévenu une jeune fille.
Tout le monde le sait. La police. Les manifestants. Même notre ministre Jean-Marc Fournier le sait, lui qui fait semblant de confondre désobéissance civile et vandalisme, avec toute la subtilité d’un hippopotame essayant de jouer de la harpe avec ses pattes de derrière.
Les anglophones disent que la règle de base pour sortir d’un trou, c’est de commencer par cesser de creuser. Malheureusement, il faut constater que M. Charest et ses ministres n’ont cessé de commander d’autres pelles.
À quand une trêve ?
Le mot de la fin appartient à la pancarte d’un manifestant anonyme :
« Où s’en va le Québec, M. Charest? Je veux connaître votre itinéraire. »
Le Soleil, Jean-Simon Gagné : “La grande illusion du Québec”.
La Presse : “Près de 400 arrestations à la 30e manifestation nocturne”.
The Gazette : “400 arrested in nightly Montreal student protest”.
Et à Québec aussi. Même tactique policière qu’à Montréal : la souricière.
Journal de Québec : “Vague d’arrestations à Québec”.
En photo, “dangereuse marxiste” arrêtée dans la rafle de Montréal. [Photo Olivier Pontbriand.]
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P.S. Dernier bilan : 518 personnes arrêtées à Montréal, 176 à Québec.
Voilà que Richard Martineau nous joue la scène de la vierge effarouchée. “Qu’ai-je fait pour mériter ça ?”.
Pauvre Ti-Rico, avec sa compagne qui se pose la même question “On me traite de salope, pourquoi ?”.
J’ai simplement exprimé des opinions que plusieurs personnes partagent aux quatre coins de la province.
Je n’ai pas dit qu’il fallait appeler l’armée, jeter les leaders étudiants en prison ou interdire les manifestations.
J’ai seulement défendu l’ordre, la loi et le respect des institutions. Et pour mémoire, j’ai écrit à de nombreuses reprises que je partage l’écoeurement de la population face à la corruption endémique qui semble gangréner le Québec.
Or, parce que j’ai osé écrire ça, on m’insulte, on me harcèle, on me hue quand je marche dans la rue, on me menace, on me traite de tous les noms, on est même venu manifester devant ma demeure, où j’essaie de mener une vie tranquille avec ma femme et mes trois enfants de 16, 13 et 4 ans.
Ça va pas, la tête ? Que s’est-il passé pour qu’on en soit arrivé là ?
On n’est plus capable de discuter ?
Quelle différence y a-t-il entre la loi 78 qui tente de circonscrire le droit de manifester, et l’attitude de ces militants qui tentent de circonscrire mon droit de m’exprimer ?
C’est la même mentalité…
Je ne suis pas le seul à me faire traîner dans la boue pour avoir osé exprimer des opinions qui vont à l’encontre de celles défendues par une certaine élite autoproclamée.
Il faut savoir que Ti-Rico, c’est en fait Ti-Trollator. Il enflamme les débats avec des gros trolls, se fait rembarrer avec vigueur, et hurle ensuite à la censure des élites bien-pensantes (toujours de gauche, bien évidemment).
Il ose se poser la question du “pourquoi je me prends de la merde dans la face ?”, quelle impudence… Je crois qu’il le sait fort bien, mais qu’il use de la posture de la vierge effarouchée afin, encore une fois, de taper sur la vilaine “gogoche” qui voudrait brimer “sa liberté d’expression”. Il n’est cependant pas tout à fait exclu qu’il soit sincère, auquel cas, il ne serait qu’un con un peu trop visible.
Mais non, il n’est pas un idiot. Moi-même ayant un certain temps usé du troll, je sais reconnaître toutes les ficelles de l’Art. À le suivre depuis bientôt dix ans, je vois bien qu’il maîtrise avec brio toute la subtile gamme du troll. Comparé à un grossier populiste de droite comme Stéphane Gendron, Richard Martineau fait figure de véritable artiste.
Un seul exemple, ce “tweet” qui restera dans l’histoire :
“Vu sur une terrasse à Outremont: 5 étudiants avec carré rouge, mangeant, buvant de la sangria et parlant au cellulaire. La belle vie !”
Là, je suis comme un juge de patinage artistique qui se lèverait, malgré les bienséances de sa fonction, pour manifester son émerveillement devant un quadruple boucle piqué parfait.
Je crains toutefois que Richard Martineau, grisé de ses succès trollesques, ait un peu perdu le sens des limites. Nous sous souviendrons au début de l’année de l’incident avec Maître Jacques Vergès, où Ti-Rico a accusé l’avocat de ne défendre que des antisémites et a terminé piteusement l’entretien la queue entre les jambes sous la menace d’une intervention policière.
Richard Martineau écrivait en 2005, alors dans Voir, “Ce qui est amusant, quand on est chroniqueur, c’est de brasser la cage, de prendre un sujet à rebrousse-poil, d’amener les lecteurs à questionner leurs certitudes et à voir la réalité sous un autre angle”. Certes. Mais tout est une question de dosage dans le ton, dans l’expression, et il faut aussi avoir une certaine solidité de ses opinions pour garder sa crédibilité. Quand tu changes d’opinion au grè des saisons et que tu insultes les gens en vitupérant dans tous les sens, tu perds tout crédit et tu deviens un clown pathétique. Une girouette.
Toujours en 2005, quand Jean Charest, qui avait promis le gel des frais de scolarité pour les études supérieures (LOL), avait coupé dans le régime des bourses d’études, une grève étudiante s’était automatiquement déclenchée. Ti-Rico écrivait alors :
Afin de sauver de l’argent, un gouvernement a décidé de sabrer dans l’éducation. Pire: il s’en est pris aux étudiants qui en ont le plus besoin…
Me semble que c’est clair, non? C’est une décision dégueulasse, que les jeunes ont parfaitement raison de dénoncer. […] Quoi? Vous me dites que cette grève est controversée, et que plusieurs personnes condamnent la réaction des étudiants? Come on, vous me niaisez! Je ne vous crois pas…
[…] Ça me fait penser à ce qu’on dit sur les assistés sociaux. “Ils ont rien qu’à arrêter de fumer et de manger des chips…”
C’est fou comme on doit être vertueux quand on est au bas de l’échelle sociale! Quand t’es assis tout en haut, pas de problème, tu peux avoir tous les vices possibles et impossibles. Mais quand t’es en bas, tu dois être plus catholique que le pape. Pas fumer, pas sortir, rester de glace devant le matraquage publicitaire qui t’incite à (sur)consommer, jamais te fâcher. Un vrai petit ange!
Si les coupures du gouvernement Charest pénalisaient les étudiants riches, pas de problème. Mais elles pénalisent justement ceux qui ont le plus besoin de l’aide de l’État.
Et vous dites qu’il y a encore des gens qui se demandent si cette grève est justifiée ou pas?
Wow.
On vit vraiment une époque formidable.
Ça me fait penser très précisèment à ce qu’on dit des étudiants de 2012 : “Ils ont rien qu’à arrêter la sangria et le iPhone”, ces “enfants gâtés”…
On vit vraiment une époque formidable.
Dany Laferrière aurait dit : “Richard Martineau vit intellectuellement au dessus de ses moyens. Il dépense plus qu’il ne possède. Et je crois qu’un jour, il fera faillite. Un huissier frappera à sa porte!”
Je crois que le temps de la faillite est arrivé.
À trop tendre la ficelle du troll, parfois, elle se casse…
La grande révolution médiatique du moment au Québec, c’est vraiment l’irruption dans le paysage de Concordia University Television. Tous les médias d’information télévisuels vont devoir repenser leurs moyens et modes de travail pour couvrir ce genre d’événements. Premier signe de vacillement, on a vu à plusieurs reprises RDI, la chaîne d’information continue de Radio Canada, reprendre le flux CUTV en direct pour peupler son écran, ses moyens lourds via satellite étant empêtrés dans le chaos de la ville (en remplaçant toutefois le son de CUTV par des invités plateau ou des journalistes par téléphone).
Cette séquence de la dernière nuit illustre le travail de CUTV, la web-télé étudiante (et illustre par ailleurs le travail de la police…) :
La plupart des journalistes professionnels et les observateurs des médias, bien que soulignant les risques de l’immersion permanente, le manque de recul, et la vocation militante clairement affichée de la webtélé, saluent l’innovation et le travail opiniâtre de l’équipe de CUTV.
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[…] Biased and proud
The crew has become a minor celebrity of sorts amongst protesters and it’s not uncommon for them to be greeted with cheers of “CUTV! CUTV! CUTV!” when they arrive, gear in hand, at a protest site. (The Quebecor-owned TVA occasionally gets the less friendly, “Fuck TVA! Fuck TVA!”)
There’s no mystery to their popularity amongst protesters, many of whom feel unfairly represented by mainstream media outlets. The station is fervent defender of the student movement. In fact, they have been criticized by many who say their editorial stance goes too far.
Since the introduction of Bill 78, their reporters have referred repeatedly to being in a “police state” and living under “martial law.”
On the other hand, CUTV often skirts over instances of vandalism, or when bottles and rocks are lobbed at police. Some people online have said the coverage is best watched with the sound off.
But Marouf makes no apologies. He readily admits the station favours the striking students and their supporters.
“We’re not under any illusion that we are balanced,” he said. “We tell everybody that we are biased and we wear that bias proudly on our sleeve.”
Marouf said this approach is in keeping with the station’s mandate under the CRTC, which is to represent the student community. CUTV is now considering the possibility of livestreaming other events, such as the Charbonneau inquiry, which is examining allegations of corruption in the province’s construction industry and possible links with political parties.
If people want “the voice of the premier and the police and the university rector amplified a million times,” they can watch corporate media, he said.
“Our job is to give the other side,” he said. “There’s no shame in that.”
OpenFile, Benjamin Shingler: “How CUTV has become must-see TV during Quebec’s student strike.”
xave
Ils ont mis le temps, quand même…
Denys
Et comment.
Gilles
En gros, ça fait une semaine que les “gros” médias (RTL, chaînes TV historiques, etC.) en parlent, mais ça reste plutôt “neutre” genre : “Des étudiants ont manifesté contre la hausse de 80% des frais, ça fait 100 jours, la Police peut maintenant les arrêter grâce à une loi qui restreint le droit de manif.” et on a des chiffres d’arrestation. On entend un peu des étudiants parler (l’accent QC, ça gaillardise la ménagère je pense) et c’est tout. Ça prend 3 minutes chrono picétou.
Blah ? Touitter !