Pour pouvoir lire le Devoir en ligne, il faut être abonné du journal version papier. Cela tient du non-sens. Et pour moi qui n’aurait jamais le plaisir de “recevoir mon exemplaire du journal Le Devoir à ma porte, du lundi au vendredi avant 7 h 00 et le samedi avant 9 h 00”, on frôle l’aberration.
Pourquoi n’y a-t-il pas une formule d’abonnement à prix modique uniquement pour la lecture Web ? Hohé ! Y-a-t-il quelqu’un avec deux sous de jugeote au Devoir ?
Ou mieux encore, pourquoi le Devoir ne se penche pas sur les modèles économiques du Monde et de Libération, par exemple ?
Les Belges sont décidément surprenants : après avoir légalisé l’euthanasie fin 2002, ils autorisent le mariage homosexuel, et cela alors qu’ils vivent dans une monarchie où la religion catholique garde tout son poids. Et un projet de dépénalisation du cannabis devrait être adopté sous peu. De quoi faire méditer notre République laïque.
[ Libération ]
Discussion imaginaire :
Moi : Allo mon lapin, et si on allait vivre à Bruxelles, dans ce pays si progressiste et accueillant ?
Lapin : Il n’en est pas question.
Moi : Mais pourquoi, tu ne veux donc pas m’épouser ?
Lapin : Là n’est pas la question.
Moi : Alors, c’est quoi ton problème ? C’est le pays scindé dans une querelle linguistique qui t’effraie ?
Lapin : Tu sais, je te connais.
Moi : Ah ?
Lapin : Si on vivait à Bruxelles, tu mangerais à tous les jours des frites et de la bière, pis tu deviendrais obèse. Pis tu mettrais de la marie-jeanne dans ta pipe et tu serais complètement flyé.
Moi : Pfff, pour qui tu me prends ?
Lapin : Pour ce que tu es, ma marmotte.
Comme sur les vieux 45 tours, le tube “musique et Internet” a deux faces. Face A, il y a la ritournelle du piratage en train de tuer la musique, entonnée par toute l’industrie lors du Midem en janvier. Et puis face B, le refrain plus discret de l’incapacité de l’industrie elle-même à proposer une alternative légale sur l’Internet aux sites d’échanges gratuits de chansons. Catalogues parcellaires, services coûteux et limités, majors distribuant elles-mêmes leur musique : acheter de la musique légale sur le Net frise l’acte de foi.
(…)
Lambiner. En France, l’affaire est en train de tourner au pugilat. “Les majors ne peuvent pas à la fois se plaindre de la piraterie et refuser l’ouverture de leur catalogue à des plateformes de distribution tout à fait officielles”, a déclaré mardi Jean-Noël Rheinardt, le président de Virgin France, propriétaire de VirginMega.fr, version en ligne des Megastores.
(…)
De toute façon, selon Pascal Nègre, l’urgence n’est pas dans une offre exhaustive payante : “La première étape est de réduire la piraterie.” Pour lui, tant que les internautes auront le choix “entre un petit disquaire payant et l’équivalent gratuit d’un Virgin”, les offres commerciales n’ont aucune chance. Il préfère du coup réclamer, avec une bonne partie de l’industrie, un filtrage des sites comme Kazaa. Bref, en attendant que tout ce petit monde s’entende, les internautes désireux de musique sur le Net n’ont qu’une alternative : l’abstinence ou le piratage.
[ Libération ]
Sur le même sujet, à bord du navire :
Copie privée, bouc-émissaire.
Pascal Nègre ou le corporatisme moisi.
Le Québécois libre, chantre du néo-libéralisme, vient de publier aujourd’hui un texte d’une grande naïveté et qui démontre une méconnaissance certaine du monde maritime. Et croyez-moi, à bord de ce navire, la navigation, je connais.
L’auteur, Mickaël Mithra, s’insurge contre le chapitre sur le libéralisme dans l’encyclopédie Yahoo qui cite l’exemple du phare, en tant que bien collectif dont l’édification ne peut se faire que si une contrainte oblige les individus à coopérer.
L’auteur pense que dans une “société libre”, si un groupe d’individus a intérêt à construire un phare — “ce qui veut dire que le phare a de bonnes chances de rapporter plus au groupe que ce qu’il lui coûtera” —, ce phare verra forcément le jour.
Il illustre par un exemple avec un fictif Dumarin, propriétaire d’un port :
Or, le brave Dumarin, propriétaire du port en question (ou de la halle à poisson), réfléchit (lui aussi! décidément, il n’y a que les hommes de l’État qui ne le font pas…) et se dit :
“Si je construis un phare, il y aura deux, trois, ou dix fois plus de bateaux qui voudront venir dans mon port vendre leur marchandise, parce que ce sera beaucoup moins dangereux pour eux, donc moins coûteux. Je vais donc construire un phare et en répercuter le coût sous forme, par exemple, d’un droit d’entrée dans mon port. Je vais aller en parler à mon banquier.”
Il y a là des erreurs :
Le capitaine du navire est incité à aller vers le port suivant, certes sans phare, mais sans taxe. La taxe additionnelle rend le port de M. Dumarin moins compétitif.
Le port de M. Dumarin ne devient intéressant que la nuit, car le phare est d’une toute relative utilité par grand jour. Le capitaine fera le calcul de ce qui est le plus intéressant pour lui : arriver au port de jour comme de nuit, mais en payant une taxe, ou bien n’arriver au port que le jour et ne rien payer. Je gage que les armateurs indiqueront au capitaine de privilégier le deuxième port quand cela lui sera possible.
Les considérations économiques dans le monde maritime ne sont pas prises à la légère. L’histoire de la navigation démontre que la rentabilité a toujours prévalu sur la sécurité. La sécurité maritime ne se fait qu’à coups de réglementations, et la réglementation a toujours fait pleurer les armateurs (ceux qui ne sont pas sur les navires et qui engrangent à terre les bénéfices). C’est le cynisme de l’histoire de nos économies libérales.
Une autre histoire, supposons que je dirige un pays avec une portion de côte sans ports et très dangereuse. Les marins de mon pays fictif ne vont jamais dans ces parages, car il n’y a pas de port, juste des rochers, et qu’ils savent bien les dangers de la zone. Pourtant, chaque année, des bateaux étrangers, qui ne connaissent pas ce littoral, se font piéger et de nombreux marins meurent. Un phare éviterait ces catastrophes mais quelle utilité pour mon pays, quelle rentabilité ? En tant que président libéral cynique, je me fiche de ces métèques de pays sous-développés qui viennent crever sur mes rivages. Ils ne me coûtent rien.
On peut m’objecter qu’un phare aurait quand même une utilité pour mon pays en évitant des catastrophes écologiques. Sauf qu’à l’époque où l’on construisait des phares, la notion de catastrophe écologique n’existait pas et nous n’avions pas encore inventé le super-tanker plein de mazout.
La plupart des phares de nos littoraux coûtent beaucoup et ne font pas gagner d’argent, la notion de rentabilité d’un phare me semble oiseuse. La vocation première d’un phare, c’est de sauver des vies humaines (et aujourd’hui, d’éviter des catastrophes écologiques). Je vois bien ce que cela rapporte à la collectivité, mais pas en terme de rentabilité économique, car pour moi, la vie humaine n’a pas de prix. Si l’on ne raisonnait qu’en termes comptables, la plupart de nos phares n’existeraient pas. Car le coût économique des catastrophes provoquées par l’absence de certains phares de second rang serait souvent inférieur à l’édification et l’entretien de ces phares.
Imaginez un village de pêcheur qui n’a pas les moyens de construire un phare. Un phare qui ne servirait qu’à eux puisque la pêche serait la seule activité économique de leur petit port. Un village où chaque année, un ou deux pêcheurs se noieraient faute de phare. La pêche leur permet à peine de survivre, alors construire un phare… Si l’État n’intervient pas, avec l’argent des impôts de gens qui n’habitent même pas au bord de la mer, et bien, il y aura toujours des pêcheurs noyés et tout le monde s’en fout. C’est néo-libéral. Ça coûte combien un ou deux pêcheurs noyés par an ?
Pour terminer, à l’époque du GPS et du Radar, cette discussion risque de devenir obsolète…
karl
Sujet déjà discuté en bas de cet article
http://www.la-grange.net/2002/09/29.html#Internet
Laurent
La situation du Devoir est un peu stupide puisqu’aujourd’hui son site Web ne lui rapporte absolument aucun revenu bien qu’il doit lui en coûter de le réaliser. Merci du lien. Je reprendrai donc le cri de Karl : “Sauvez un arbre, mangez un castor… ou offrez un abonnement électronique uniquement !”. J’ajouterai, moins cher que la version papier… Enfin, Michel Dumais est un homme vraiment bien informé, puisqu’il nous indique que cela (l’abonnement Web) est en préparation [http://199.84.183.232/archives/000149.html].
Michel Dumais
Primo, une partie de la réponse se trouve ici: http://199.84.183.232/cgi-bin/movabletype/mt-comments.cgi?entry_id=149
Mais aussi, une seconde partie se trouve là: http://www.ledevoir.com/2002/09/30/10166.html
Évidemment, il n’y a rien de parfait en ce bas monde. Mais n’oubliez pas, le petit Devoir a des moyens très limités et peine à boucler son budget annuel sans déficit.
Laurent
Je sais bien que Le Devoir n’a pas le sou. C’est juste que je me désole de ne plus pouvoir le lire à Paris et que c’est agaçant de voir que les articles sont en ligne mais que l’accès en est réservé aux abonnés papier, ce qui n’a pas de bon sens (si je suis abonné au Monde en papier, je ne vais pas le lire sur le Web… ou exceptionnellement pour en copier une citation dans mon blogue).
Laurent
Mais bon, puisque tu me dis que ça s’en vient, il suffit d’être patient…
Gilles
Étant abonné au Devoir - papier - et n’ayant pas à m’en servir en ligne, je pourrais te donner mes droits d’accès !!
Plus sérieusement, j’espère que la formule que concocte le Devoir sera aussi intéressante que celle offerte par Le Monde : pour 5 Euros par mois, j’ai accès à tout le contenu, en plusieurs formats (HTML et PDF) du journal… C’est un prix qui me semble raisonable. Est-ce que cette formule a fait perdre des abonnés au Monde ??
Laurent
Autant que je sache (étant actionnaire de cette vénérable institution via la Société des Lecteurs du Monde), le quotidien n’a pas perdu de lecteurs de l’édition papier. Le Web conquiert principalement des nouveaux lecteurs. La plus grande difficulté qu’affronte le journal est la morosité actuelle des marchés publicitaires.
bmw
bmw rulezzz!
markiz
markiz cool! ;)
Touitter !