Journal de bord

mardi 15 juillet 2008

LePost bashing

Avec un article, dans sa première mouture, digne des pratiques les plus mauvaises en la matière : article pondu très vite, lapidaire, absence de vérification des faits, et manque assez fondamental de mise en perspective. On y annonçait que j’étais premier du classement wikio, et un « le blog le plus influent de la sphère française ». Il s’agissait manifestement de publier rapidement, un peu comme pour l’annonce de la mort d’une célébrité.

Deuxième étape, sur LePost.fr, une journaliste tente de me joindre plusieurs fois. Je finis par lui répondre en lui disant que je ne souhaite pas lui accorder d’interview. Elle aligne quand même les questions où, volontairement, je ne réponds pas, ne souhaitant pas donner d’informations à cette rédaction dont j’estime peu l’esprit (et dont je n’ai pas apprécié le premier traitement). L’interview est un modèle du genre : je n’y réponds à rien. Elle sera quand même publiée. On est en droit de se demander s’il y a un travail de sélection de ce qui constitue une information, dans ce nouveau média qu’est LePost.fr, si une interview ne contenant rien est publiée (la déontologie reste, toutefois, respectée : il n’y a pas de déformation de mes propos lapidaires). Ce fut là une erreur de ma part : plutôt que d’envoyer valser la journaliste, j’ai fait l’erreur de dialoguer avec elle, comptant sur son intelligence pour ne pas publier mes réponses.

[Nicolas Vanbremeersch : “Retour sur un arrêt (1) : traitements”.]

C’est le Post qui la poste. En la remixant à son goût (on ne soulignera jamais assez cette drôle d’habitude, assez habile, mais pas très très élégante, qu’à lepost.fr de balancer son logo en bas de toutes les vidéos qu’ils pompent chez leurs collègues). Hop, vidéo balancée, au milieu des autres billets rapides sur la prestation de la première dame (Carla et Nicolas au défilé, Carla et Nicolas très fiers par Fullhdready). Reprise du rien, sans commentaires, sans rien.

C’est la promesse du Post. Et je l’avoue, elle m’emmerde, cette promesse. Cette promesse du non-journalisme, du vide, du rien, du bruit à n’en plus finir. Je ne doute pas un instant que « cela marche ». C’est évident. Dès qu’il se passe quelque chose, laisser tout le monde créer quelque chose sur le sujet, choper tout ce qui est produit ici et là et en récupérer l’essence, la base. Mettre son logo dessus, et balancer, avec les bonnes combinaisons de tags, et d’optimisation du titre pour bien apparaître dans un moteur.

[Nicolas Vanbremeersch : “Mise en abîme du vide et du bruit”.]

1. Le 15 juillet 2008,
Eolas

LePost.fr serait-il un blogueur influent ?

2. Le 15 juillet 2008,
Superman

C’est lassant.

3. Le 15 juillet 2008,
Nicolas/versac

Là, c’est un peu simple et bas, que de reprendre uniquement les passages concernant ta publication préférée, et pas la mise en perspective…

4. Le 15 juillet 2008,
Laurent Gloaguen

@Nicolas : ce sont les passages qui ont retenu mon attention :-)

5. Le 15 juillet 2008,
Nicolas/versac

@Laurent : je n’en doute pas. Mais enfin, ces blogueurs influents, vraiment, avec leur ego hypertrophiés et leurs guerres contre les journalistes, ils sont vraiment fatigants.

6. Le 15 juillet 2008,
Laurent Gloaguen

@ Nicolas : attention, tu passes du côté obscur de la force et tu fais du “zinfluents-bashing”… :-)

7. Le 15 juillet 2008,
Mry

côté obscur de la farce… attention, je vais écrire un truc énorme : “nous allons tous mourir”. On va voir comment Le Post digère cette information.

8. Le 15 juillet 2008,
Nicolas/versac

@Laurent : je me demande, quand même, comment on peut être blogueurzinfluent et en même temps fumer la pipe. Enfin, je pose juste la question, hein.

(ah zut de zut, c’est pas le concours de trolls, là ?)

9. Le 15 juillet 2008,
dagrouik

Tiens le post.fr fait la même chose que Morandini et d’autres : ils postent des vidéos d’information en mettant un gros logo partout, sans rajouter un seul contenu même pas un mot. Et certains pensent même qu’ils s’agit de resucage de vidéo et de renvoi avec logo sur la même plate-forme.

10. Le 15 juillet 2008,
Laurent Gloaguen

@Nicolas : ne m’entraîne pas sur le terrain glissant de la pipe… :-)

11. Le 15 juillet 2008,
bituur esztreym

glissant : rhââ… oups… à quoi se raccrocher ? 8-O

12. Le 15 juillet 2008,
Dominique

Versac bashing, avec l’aide des lecteurs du Post qui ne lisent jamais les originaux. La guerre continue :

http://www.lepost.fr/article/…

13. Le 15 juillet 2008,
Guillermito

Oui, bon, j’aime bien Versac, mais il faudrait qu’il arrête. Vraiment. “Retour sur un arrêt”, “Pourquoi je ne blogue plus”, “Comment vraiment finir de bloguer”, “Vraiment arrêter son blog”, “Juré c’est mon dernier billet”, “Analyse de la fin de mon blog”, “Pourquoi LePost ne comprend pas les blogueurs”, “Le film de la fin de mon blog”, “Rapport de gendarmerie le jour ou j’ai décidé de ne plus bloguer”, “Les vraies raisons qui expliquent mon abandon du blog”, “Une interview de moi dans le journal Truc apres la fin de mon blog”, “J’arrête d’utiliser le pseudo Versac : pourquoi, comment”, “Billet invité chez Embruns : oui, je quitte définitivement les blogs”, “Retour sur les raisons qui font que j’ai arrêté mon blog il y a un an”, “L’importance de signer de son nom”, …

Les faux départs avec longues explications larmoyantes et déchirantes, c’est un peu pathétique. Ca fait un peu “Merde, j’ai décidé d’arrêter sur un coup de tête, et maintenant que je n’ai plus de public, je le regrette”.

Quand on choisit le silence, on s’y tient.

14. Le 15 juillet 2008,
Nicolas/versac

Guillermito : le truc, c’est que je n’ai jamais dit que j’arrêtais de bloguer. Désolé. J’ai juste dit que je fermais mon blog, et que j’allais bloguer ailleurs.

Et ce billet était juste un exemple de traitements, un prétexte à parler de rédactions et de journalisme en ligne. Ceci-dit, j’entends. Je vais changer de sujet.

15. Le 15 juillet 2008,
Troll de premier choix

“Je finis par lui répondre en lui disant que je ne souhaite pas lui accorder d’interview. Elle aligne quand même les questions où, volontairement, je ne réponds pas, ne souhaitant pas donner d’informations à cette rédaction dont j’estime peu l’esprit (et dont je n’ai pas apprécié le premier traitement). L’interview est un modèle du genre : je n’y réponds à rien. Elle sera quand même publiée.”

Avec des réponses du cru de l’interveweur à la place des blancs ? Dans l’affirmative, ça me ferait irrésistiblement penser à la série “Le Prisonnier” et plus précisément à l’épisode “Liberté pour tous” où le journaliste intervieweur rédige lui-même les réponses, là où l’interviewé avait répondu “pas de commentaire !”

Sauf à la dernière question où, alors que la réponse d’origine ne convenait pas, le journaliste écrit “pas de commentaire” à son tour.

Nicolas/Versac et n°6, même combat !

16. Le 16 juillet 2008,
narvic

@ Guillermito

Tu ne vas un peux trop loin à propos de Nicolas, non ? Moi j’ai bien lu dans la post sur la fin de Versac, que Nicolas n’arrêtait pas de blogueur, mais voulait le faire ailleurs et autrement.

C’est une question intéressante tout de même : quand un blog devient une place publique, le simple dialogue n’est plus possible. Un blog ne sert même plus à rencontrer des gens, apprendre à les connaître, à échanger. Ça devient un champs de bataille.

Parmi les blogs, ou même les sites, à forte audience, il n’y a guère que chez Laurent, que la conversation reste possible (comme celle que nous avons en ce moment). Partout ailleurs, c’est la terre brûlée des trolls. Faut avouer que Laurent a su fédérer ici une équipe de super-trolls qui ne va pas se laisser manger la laine sur le dos par les trolls amateurs… ;-)

Une réflexion intéressante de Vicastel au sujet de la “commentosphère”…

C’est une réponse efficace finalement de fermer un blog, pour aller causer ailleurs… Tiens, si Nicolas me ramène trop de trolls à la maison (d’autant qu’il va carrément les chercher dans leur nid à trolls du post.fr !), je lui laisse les clés de la maison et j’ouvre un autre blog ! Où alors je me contente de venir troller ici… :-))

17. Le 16 juillet 2008,
Guillermito

Narvic : oui, je n’ai pas été très gentil dans mon commentaire ci-dessus. Ca m’arrive parfois, et puis je suis un peu loin pour qu’un offensé me mette un pain au prochain Paris Carnet, alors j’en profite :) Que Nicolas blogue encore, très bien, comme je le disais, j’apprécie souvent ses billets. Mais qu’il en finisse une fois pour toute de disséquer le cadavre de ce personnage qu’il a tué. Versac est mort, il faut maintenant passer a autre chose, tourner la page, aller de l’avant. “Changer de sujet”, comme il le dit lui-même. Je parlais de silence, mais j’aurais du préciser “silence en ce qui concerne Versac qui n’existe plus”.

(A propos, ton pseudo a quelque chose a voir avec Narvik en Norvège ? Très beau fjord. La ville n’est pas très jolie, mais elle a quelque chose de spécial. Bref).

18. Le 16 juillet 2008,
narvic

@ Guillermito

(chut, je suis un viking !)

Blah ? Touitter !

Prénom breton

Je n’ai pas de prénom breton parce que, dans les années 60, les officiers d’état civil refusaient la plupart et que, hors de la Bretagne, être “trop marqué” breton passait pour une tare congénitale… mes parents craignaient d’handicaper mon avenir avec un prénom breton, Erwan en l’occurence. Le syndrome Bécassine fonctionnait encore. Depuis, les Bretons ont reconquis leur fierté.

Breton, fils de divorcés, homo, j’étais mal barré dans la vie. Aujourd’hui, tout cela parait si anedoctique et indifférent.

À lire chez Baptiste Coulmont, “Y a-t-il autant de prénoms bretons en Bretagne que de prénoms basques au Pays basque ?”.

1. Le 15 juillet 2008,
Celui

Imagine les pauvres provinciaux avec un prénom breton, ils en bavent ;-)

2. Le 15 juillet 2008,
Aymeric Jacquet

Pas de problèmes pour ma part au début des années 70, mais bon, Aymeric, peut être qu’ils ne savaient pas d’où provenait ce prénom étrange.

3. Le 15 juillet 2008,
Abstrait ≠ Concret

Pas la moindre anecdote désobligeante en 24 ans de vie estampillée à la sauce Loïc…

4. Le 15 juillet 2008,
eustazio

Probablement aussi pourquoi je ne parle pas corse. etat de merde.

5. Le 15 juillet 2008,
LOmiG

Quoi de plus beau qu’un prénom breton, pourtant ? ;)

6. Le 15 juillet 2008,
LOmiG

Heureusement, avec ton nom de famille, on risquait pas vraiment de les oublier, tes origines bretonnes !

7. Le 15 juillet 2008,
Quentin

Breton et fils de divorcé. Hétéro. Mais ça se joue à deux syllabes. Je marche sur vos pas, monsieur Gloaguen. Enfin, façon de parler…

8. Le 15 juillet 2008,
Pierre Carion

De toute facon, un prenom qui n’apparait pas dans la bible ou le calendrier de la poste ne vaut rien. Et toc.

9. Le 16 juillet 2008,
Bob Marcel

allez je tente le Godwin : Adolphe est-il un prénom Français ?

Blah ? Touitter !

Élégie

On reconnaît les bons blogs à ce qu’ils nous apprennent. J’ai beaucoup appris chez Versac, et d’abord ce que pouvait être un exercice libre et éclairé du blogging. J’ai beaucoup aimé ça. Cette curiosité-là, que ne guide nul consensus, nulle obligation, juste celle qui vous mène d’elle-même au bon endroit. Cette générosité-là, celle qui donne en partage, non du haut d’une autorité ou pour justifier un salaire, mais en toute gratuité. Cette disponibilité-là, si étrange pour celui qui ne sait que toiser, si étonnante par son respect, sa patience. Cette humanité-là, toute prête au doute, à la faille et même à l’emportement, dans l’absolue confiance qu’elle fait à la sincérité du moment – et à ses lecteurs. C’est tout cela que j’ai découvert chez Versac, soir après soir, matin après matin, par les petits touches discrètes de l’impressionnisme du blog. Ce que ne comprendront jamais ceux qui font du blog comme ils parlent dans leurs micros, c’est que dans ce nouveau monde qui se redessine chaque jour, il y a tant à apprendre. Voilà pourquoi, oui, Versac aura été pour moi l’un de ces phares, trop rares, dans la brume d’internet.

[André Gunthert : “Ce que Versac m’a appris”.]

1. Le 15 juillet 2008,
Off Topic

Puisqu’on parle de phares, voilà du Louis Cozan par deux fois. Plus de lui sur Hisse-et-Oh.

La vague

Louis Cozan, Kéréon, Février 74.

A nouveau plus de quarante nœuds. On s’y attendait, le bulletin météo de Conquet radio ne laissait guère de doutes quant à la suite des événements.

Il est treize heures, Christian a terminé son quart, il va monter à la sieste.

Pour l’instant il s’est campé devant la fenêtre du suroît.

« Six mètres à peu près, ça commence à déferler ! » Il essuie la buée qui s’est déposée sur les deux grands hublots et voile sa vision du Fromveur en colère.

Depuis les premiers jours de janvier les dépressions se succèdent avec une constance désespérante ; nous entrons dans notre septième semaine de mauvais temps.

Même l’image des vagues folles qui nous faisaient regretter de ne pas avoir de caméra à bord ne nous fait plus nous exclamer et nous lever de nos chaises pour les regarder filer dans le nordet après avoir brisé sur le phare.

L’humidité est partout ; notre pauvre chaudière archaïque n’y peut plus grand’ chose…

…Christian est monté se coucher, c’est encore là que l’on est le mieux dès que la chaleur animale a réussi à remonter en température l’habitacle étroit du lit clos. J’ai tenté, sans grand succès, de m’intéresser à une émission de radio racontant les diverses étapes permettant de transformer un paisible canard en animal malade dont le foie cirrhosé deviendra l’objet de rites religieux agaçants qui me font penser aux simagrées entourant l’usage du pinard, puis j’ai recalé le poste sur la gamme marine, feuilleté quelques vieilles revues… et suis retourné vers les hublots.

Cette fois c’est parti ! Cinquante nœuds, peu être même soixante, et surtout, des vagues dont l’attitude a changé.

Fini les bataillons bien rangés qui défilaient comme à la parade sous les confettis blancs de leurs panaches d’écume, maintenant la guerre est déclarée et ce sont les solitaires qui passent à l’attaque, les forces spéciales de la mer, les commandos !

Chacune d’elle en veut au phare et tentera de démontrer qu’elle est la meilleure !

Celle qui vient de se lever à l’instant, au-delà de Bannec, retient toute mon attention. Elle s’est lancée en soufflant vers notre tour, et je la regarde avancer, fasciné par tant d’inquiétante beauté.

Oeuvre unique, façonnée par le souffle de la tempête, je me dis que je suis le seul à la contempler et que personne ne la reverra jamais. Inestimable privilège…

Une… deux… trois fois, je pense qu’elle va s’écrouler, qu’elle n’arrivera pas jusqu’à nous, qu’elle est trop haute pour tenir encore debout !

Sa crête n’est qu’un rictus de bave haineuse, son ventre de plus en plus creux semble se durcir encore pour soutenir, au-delà des lois de la physique, la masse monstrueuse qui veut nous frapper.

Même Christian, que rien ne semble pourtant pouvoir effrayer, est incapable de regarder en face un tel monstre, de rester jusqu’au bout devant les hublots pourtant épais de plusieurs centimètres.

Il parie, jure que cette fois ci il ne bougera pas ! Mais rien n’y fait. L’instinct de survie est plus fort et au dernier moment, il s’écarte en jurant.

Justement il est redescendu, sa sieste gâchée par le vacarme et les infiltrations d’eau sous pression qui inondent le beau parquet de chêne de sa chambre.

« Tiens ! Regarde celle là », je lui dis.

Il se colle dans l’encoignure de fenêtre, prêt au duel…

-…

« La salope ! »

Il a encore perdu, il s’est jeté derrière le frigo !

Aussitôt passé le choc, alors que le bruit de vaisselle s’entrechoquant et le grincement des meubles s’atténuent, tout devient vert dans la cuisine et le grand silence de l’apnée s’installe pour une petite seconde. Les yeux écarquillés et la bouche ouverte pour évacuer la surpression, nous nous regardons comme deux poissons perdus.

Puis le niveau d’eau redescend et le fracas de la vague remplit l’espace qui nous sépare de Korn a Men, la roche voisine.

Tel un plongeur a bout de souffle, le phare émerge du bouillon, bien droit sur le Men Tensel, symbole de la forfanterie des hommes.

Là bas, derrière l’horizon, une autre vague s’est levée…

2. Le 15 juillet 2008,
Nicolas/versac

blush

3. Le 15 juillet 2008,
Off Topic

Phare, deuxième. Même auteur, même phare, Janvier 73.

C’était un norvégien

C’était un norvégien et c’était l’hiver. Un sale hiver bien dur où le vent, balayant l’Iroise sans discontinuer, avait pétri des vagues si hautes et si noires que la mer était devenue méconnaissable.

Et, ce dimanche, alors que nous allons nous attabler devant un pot- au- feu, une silhouette sombre se détache dans les déferlantes qui roulent entre Men Korn et chez nous.

JP est devant la gazinière, il m’appelle : « Viens donc voir un peu celui-ci, il est gonflé ! »

Depuis le début de la matinée deux cargos, et pas des petits, sont en relâche dans la baie du Stiff, attendant que le jusant ait fini de s’opposer au vent pour franchir le Fromveur.

Des cargos en relâche au Stiff, c’est plutôt rare !

Cela souligne l’état d’exceptionnelle démence de la mer en ce moment ; et là, voici qu’un caboteur, c’est-à-dire un cargo au moins deux fois plus petit que les deux qui s’abritent dans la baie, un caboteur, donc, a entrepris de passer !

Poussé par le courant, machine en avant toute, il défonce d’une étrave effrontée les montagnes liquides qui courent dans le Nordet du phare.

Lorsqu’il s’élève à la lame, nous montrant ses dessous dégoulinants avec une magnifique impudeur, nous ne pouvons qu’écarquiller les yeux devant le spectacle de son audace.

Le pot-au-feu attendra, nous décidons de monter jusqu’à la lanterne pour mieux suivre cette incroyable lutte du David Norvégien contre le Goliath Ouessantin!

Au passage dans la salle d’honneur nous mettons en chauffe notre radio, des fois que…

Depuis notre observatoire, à quarante mètres au dessus de l’eau, notre excitation devant la beauté sauvage de ce duel se transforme peu à peu en angoisse…

La taille des lames, et celle du bateau, sont particulièrement visibles d’ici.

Et il est clair que la mer est énorme et le bateau bien petit.

Pour nous il est déjà en danger, les tonnes d’eau qui s’abattent sur son pont doivent l’ébranler durement.

Pourtant le pire est à venir!

Il ne le sait peut être pas mais l’endroit le plus malsain du Fromveur par ce temps, c’est le passage, entre le phare et Men ar froud; passage qu’il atteindra dans quelques minutes.

Il semble d’ailleurs s’en être rendu compte car il a ralenti, essayant ainsi d’atténuer la violence des impacts sur son étrave.

Mais ça ne suffit pas, le coefficient de marée est supérieur a cent et le courant l’entraîne à une vitesse excessive.

De surcroît le risque de se retrouver en travers est réel maintenant qu’il a diminué la puissance sur son hélice.

Les instructions nautiques expliquent que dans une telle situation la seule manœuvre à tenter est de mettre l’arrière dans le vent et de capeyer face au courant en attendant la renverse.

Encore faut il pouvoir faire demi tour!

Le tenter maintenant parait suicidaire; continuer sa route tel qu’il le fait en ce moment n’est guère plus raisonnable, la mer est trop dure, quelque chose va casser sans tarder…

Les minutes s’écoulent, lourdes de tension; il arrive maintenant dans le plus mauvais endroit du passage et la première lame dans laquelle il tape s’écroule sur son pont et le balaye intégralement avant d’exploser sur sa passerelle qui disparaît sous la vague.

Le choc qu’il vient d’encaisser a du être terrible, il est littéralement enseveli ; nous retenons nos respirations.

Il en ressort dégueulant de tous ses sabords une eau verte et lourde et s’ébroue comme un chien furieux.

Son étrave s’élève sur la vague suivante, la coque déjauge jusqu’au milieu de sa longueur, puis il bascule lentement en avant et va se planter avec une violence qui nous glace, dans le bas ventre du monstre qui s’est levé devant lui.

Cette fois il ne se relèvera pas, l’angle d’attaque est tel que ses panneaux de cales vont exploser!

Effectivement il continue de plonger tandis que l’arrière se dresse dans le ciel, de plus en plus haut, son hélice brassant l’air à une hauteur que nous avons du mal à estimer.

JP a dégringolé l’échelle pour descendre à la radio, convaincu qu’il va sancir, c’est-à-dire passer cul par-dessus tête; je reste, les yeux rivés aux jumelles…

Et, alors que je m’attends à le voir faire sa culbute mortelle, les centaines de tonnes d’acier de sa coque retombent sur le flan dans une gerbe d’eau fantastique !

Couché sur tribord, travers à la mer, c’est une épave que la troisième vague, qui se prépare à frapper maintenant, va rouler soigneusement afin d’achever le travail de destruction préparé par ses deux sœurs.

Mais on ne vient à bout de navires et de marins norvégiens aussi facilement, en trois vagues bien rangées et organisées…

La coque se redresse doucement, l’étrave commence à déraper vers le phare, tandis que sa cheminée se met à cracher rageusement une épaisse fumée noire !

Et en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire il se retrouve presque à l’inverse de sa route précédente

Incroyable !

A la passerelle, non seulement il y a un homme vivant, mais celui ci a gardé assez de lucidité et de sang froid pour exploiter en une fraction de seconde l’opportunité offerte par la situation résultant de la cabriole insensée que vient de faire le bateau ; et cet homme manœuvre !

Il manœuvre bien !

Je frissonne d’une émotion glacée et je gueule ! …

Il n’y avait qu’une manoeuvre possible, il n’y avait qu’une seconde pour la faire !…

…La troisième vague vient déferler presque tendrement sur le couronnement du bateau maintenant en route dans le bon sens, indifférente à l’arrogance effrayée du Norvégien qui lui montre son cul en crachant furieusement son épaisse fumée!

Les tueuses du Fromveur n’ont pas d’état d’âme, c’est sans doute en cela qu’elles sont le plus effrayantes….

…Le petit cargo atteindra presque tranquillement la baie du Stiff où il restera plusieurs jours, le temps de panser les plaies du corps et de l’esprit des hommes ; les plaies du vaillant navire, aussi.

Quant à nous, tout en dégustant notre pot-au-feu, nous commenterons, sans vergogne, mais sans forfanterie excessive non plus, l’avantage de notre situation qui permet de vivre au milieu d’une tempête, en sécurité et au sec devant une soupe chaude, spectateurs privilégiés au premier rang de l’arène où d’anonymes marins mènent, face à cette belle nature trop sauvage, des combats dont personne ne parle.

Dans deux jours ce sera la relève…

Alors nous guetterons avec un peu d’angoisse et nettement plus d’humilité, le terrain de jeu de nos voisines, les tueuses vertes !

Phare de Kéréon, Janvier 1973.

4. Le 15 juillet 2008,
Damien B

Ce que ne comprendront jamais ceux qui font du blog comme ils parlent dans leurs micros

Ha, du podcasting bashing, ça faisait longtemps.

5. Le 15 juillet 2008,
Aranno

OffTopic > Merci.

6. Le 16 juillet 2008,
Off Topic

Aranno > Merci à toi :)

Blah ? Touitter !

Relayer

Jeune homme, 31 ans, journaliste/libraire, non fumeur, sérieux, bien sous tous rapports, cherche colocation ou chambre dans Paris, dans appartement assez grand et qui ne ressemble pas à une cave, avec un accès internet haut-débit sans fil. Spirituel, je sais cuisiner, laver les toilettes et être discret. [Le Roncier : “Petite annonce”.]

(Beau garçon plein de charme, dois-je ajouter… enfin, bon, il cherche une colocation, pas un amant.)

1. Le 15 juillet 2008,
Nicolas Bleusher

… et c’est ce qui fait toute la différence entre une cave et un appartement :)

2. Le 15 juillet 2008,
GreG

Je sais laver les toilettes : il a sûrement voulu dire “je tire toujours la chasse d’eau”

3. Le 15 juillet 2008,
Gaganymède

Il cherche pas un amant? Mais il va payer comment?!

4. Le 15 juillet 2008,
nicocerise

GreG je trouve ta remarque désobligeante. Savoir laver les toilettes est d’une grande importance dans le choix d’un colocataire : peu d’homme savent se servir du balai chiotte et encore moins savent détartrer un WC. Pour ma part j’ai atteint le niveau 2 : enlever les traces de caca mais pas encore le niveau 3 détartrage. J’ai aussi appris à baisser la lunette après usage. Quand à faire pipi droit là j’ai abdiqué.

Passionnant, non ?

5. Le 15 juillet 2008,
remi.myopenid.com

Et quand on attend le level 4 ? On sait maitriser quoi … Perso, je suis au level 2 1/2 … :|

6. Le 15 juillet 2008,
Patrick [level 3]

Fume-t-il ?

7. Le 15 juillet 2008,
GreG

@ Nicocerise : Ma remarque est “désobligeante” ? Ce n’était qu’une boutade sans intérêt.

Important aussi dans le choix du colocataire : le sens de l’humour :))

8. Le 16 juillet 2008,
le roncier

Ah ah ah, j’étais sûr que cette question de chiottes allait faire mouche :) Je suis expert chiottes niveau 4 : je nettoie aussi celles de mes amis. Hum. Et maintenant, je vais passer pour un weirdo avec un fantasme bizarre sur les cuvettes. Rassurez-vous, je déteste la vaisselle et je ne repasse jamais.

Merci Laurent pour le coup de pouce. Si je trouve grâce à toi, je t’envoie une photo dédicacée ;)

9. Le 16 juillet 2008,
coco

Je confirme, je loge leroncier temporairement et depuis qu’il est arrivé, mes chiottes sont impeccable de niveau 4, je savais pas que ça pouvait être blanc au fond. J’ai aussi un frigo toujours plein, des oeufs le matin, un défilé de beaux mecs de ses amis qui passent pour boire le thé, un réseau wifi qui fonctionne, 0 bouteilles sur le pallier en attente de recyclage, des plantes en bonne santé, toutes les saisons de toutes les séries, et mes boîtes de céréales sont rangées par ordre décroissant de teneur en fibre (ce n’est pas une blague).

10. Le 16 juillet 2008,
Laurent Gloaguen

@Coco : hmmm, c’est limite effrayant…

11. Le 16 juillet 2008,
Mr Peer

Ca dépend si c’est leroncier qui a fait tout ça seul

12. Le 16 juillet 2008,
le roncier

@Laurent : C’est vrai qu’à relire le commentaire de Coco, je me fais peur tout seul :) Heureusement que c’est de la publicité mensongère.

Blah ? Touitter !