Mafia, béton et démocratie
Selon Radio Canada, 75% du montant des contrats de construction de la municipalité de Boisbriand, au cours des cinq dernières années, étaient attribués à la société Infrabec, présidée par Lino Zambito.
Selon ses propres dires, la société Infrabec remporte 95% de ses contrats dans le secteur public (municipal, provincial, fédéral). Il semblerait qu’elle soit peu concurrentielle dans le privé.
Au printemps dernier, Lino Zambito, Sylvie Saint-Jean, maire de Boisbriand, et les deux conseillers municipaux représentant l’opposition, Marlene Cordato et Patrick Thiffault, se sont rencontrés au restaurant (italien bien entendu, Ristorante Piatti à Rosemère). Lino Zambito et Sylvie Saint-Jean souhaitaient convaincre l’opposition de ne pas se présenter aux prochaines élections municipales et de laisser ainsi la maire à son poste.
Sylvie Saint-Jean, mise face aux faits indéniables que les trois quarts de ses contrats de construction sont attribués à une même société et que le président de cette société a manœuvré pour la voir rester en poste, nie farouchement que l’entreprise Infrabec ait reçu un traitement de faveur, “Tous nos contrats ont été attribués par appel de soumissions publiques, conformément à la loi”.
Effectivement, le gros contrat de l’usine d’épuration de la ville (28 millions de dollars) a été attribué au terme d’un appel d’offres public comme la loi l’exige. Environ 20 entreprises auraient demandé le cahier des charges, mais une seule aurait répondu en fin de compte, Infrabec. Il ne serait pas déraisonnable d’y voir le résultat d’une entente de type mafieux comme il s’est vu récemment sur les marchés des sociétés d’asphaltage, car Infrabec est très loin d’être la seule société à savoir construire une station d’épuration sur la région du grand Montréal…
Sylvie Saint-Jean a toutefois admis avoir soutenu la proposition de Lino Zambito lors du repas avec les conseillers d’opposition (elle ne pouvait faire autrement, la rencontre a été enregistrée par Marlene Cordato) en expliquant qu’elle souhaitait épargner aux citoyens de sa ville les frais d’une élection (300 000 $). Curieuse et économe conception de la démocratie.
Le mois dernier, Louis Kemp, époux de Marlene Cordato, a été passé à tabac par des inconnus à son domicile. Mais il semble que Marlene Cordato ait tenu bon malgré les intimidations puisqu’elle se présente aux élections du 1er novembre et que ses enregistrements se sont retrouvés entre les mains des journalistes de Radio Canada…
Détail amusant, déniché grâce à Google, Lino Zambito était président d’honneur des fêtes du 35e anniversaire de la fondation de la ville (anciennement Sainte-Thérèse-Ouest) le 29 août dernier.
Alain Gravel de Radio Canada pose la question “Mais où vivons-nous ? Au Québec ou en Sicile ?”.
Grâce à quelques journalistes et témoins courageux, chaque semaine livre de nouveaux scandales touchant les marchés publics, les entreprises de travaux publics et de construction, les syndicats du bâtiment et leurs liaisons avec la Mafia italienne ou encore les Hells Angels. Le gouvernement de M. Charest se refuse à une commission d’enquête globale et préfère laisser agir la police au cas par cas, ce qui en dit long sur sa volonté d’éradiquer la corruption de la vie publique québécoise. Aucune réforme en profondeur des processus d’attribution de marchés publics, si aisèment contournés aujourd’hui, n’est non plus évoquée.
Au Québec, construire un pont, une route, une école, coûte de 20 à 35% plus cher qu’ailleurs au Canada. Au Québec, les infractructures sont dans un état digne d’un pays du tiers monde, les routes sont des champs de trous et les pont s’écroulent.
Et Sylvie Saint-Jean n’a pas, à cette heure, démissionné.
Pendant ce temps, le citoyen apathique assiste au spectacle et se détourne de la vie démocratique, “tous pourris”.
Blah ? Touitter !