Journal de bord

mardi 15 novembre 2011

Une apparition de Jésus

jesus-anus-chien.

1. Le 16 novembre 2011,
padawan

Confondant.

2. Le 16 novembre 2011,
manu

Tu vas encore te faire des amis avec des billets comme celui là :)

3. Le 16 novembre 2011,
Jean

C’est pas dans le trou du cul d’un chat qu’on verrait une telle apparition.

4. Le 16 novembre 2011,
Gilles

Bah alors, on cède aux sirènes du Net en publiant ce qui tourne partout ? :)

Blah ? Touitter !

Made by hand

Made By Hand.

Cela me touche par effet de proximité. Cela me rassure de savoir qu’il y a encore des gens qui font la différence entre un couteau fait à la main et un couteau industriel, usiné par des robots.

De mon côté, je sacrifie mon temps, mon argent, à développer mon art. Interminables recherches.

Mais aussi, je doute. Je viens de parvenir à un bon procédé de tirage au platine sur papier baryté (je crois que les gens au travers le monde capables de faire ça se comptent sur les doigts d’une main). C’est bien sûr superbe. Mais qui ça peut intéresser ? Ce n’est plus même une niche mais un recoin de niche. Quand tout le monde n’a qu’à appuyer sur un bouton pour qu’une imprimante jet d’encre crache un tirage de qualité parfois stupéfiante ? J’ai le sentiment d’être parfaitement anachronique quand on me demande qu’elle est la différence entre mon travail (qui est finalement une technique photographique du XIXe siècle) et une impression au jet d’encre. Oui, quelle différence d’usage ? Comment expliquer le supplément d’âme ? Comment faire apprécier la subtilité des nuances ? Comment faire comprendre que l’on peut passer des heures à reproduire une photographie sur du papier ? Comment expliquer que chaque tirage est forcément unique, n’est pas parfaitement reproductible comme dans un process industriel ?

Parallèlement, à quoi bon s’acharner à utiliser des procédés anciens comme le Polaroid quand un Hipstamatic fait tout et plus encore sur votre iPhone ? À quoi bon quand le regard contemporain se trouble, perd ses repères dans une marmelade visuelle faite de manipulations numériques transgressives ?

Est-ce que l’homme a encore besoin du fait main ou cela relève-t-il d’un sentiment nostalgique et passéiste ? Et je parle pour ma chapelle de la 2D, mais avec ce qui arrive en impression 3D, on a de quoi d’être chaviré… L’avenir est-il fait de tout numérique avec des périphériques de reproduction 2D et 3D pour nous donner des objets manipulables lorsque le besoin s’en fait sentir ? Le physique est-il condamné au jetable ?

Ce qui me rappelle une anecdote personnelle alors que je travaillais au théâtre des Champs-Élysées lors de sa grande rénovation de 1986. Lors du chantier de rénovation, il s’est posé le problème du renouvellement des luminaires de Lalique qui étaient cassés. La société Lalique contactée à l’époque avait avoué son impuissance, ils avaient perdu le savoir-faire, notamment celui du refroidissement de si grandes pièces de pâte de verre (450 kg). Les luminaires manquants ont donc été remplacés par des copies en résine. Oh, mais c’est terrible, se lamentaient les amoureux du patrimoine. Mais, de fait, aucun spectateur du théâtre n’a jamais remarqué que certains luminaires étaient des faux en plastique. Cela ne changeait rien, ou presque.

(En 2008, les artisans de Lalique, peut-être blessés dans leur orgueil, ont enfin réussi à produire des répliques convaincantes.)

Bref, c’est quoi pour demain la valeur du fait-main, de l’unique avec ses imperfections ? Et aussi de ce qui est intrinsèque mais pas forcèment immédiatement visible ?

1. Le 16 novembre 2011,
padawan

Deux fort beaux témoignages, merci.

2. Le 16 novembre 2011,
Nicolas B.

Laurent,

Ma culture de la photographie est tellement mince qu’elle ne mérite même pas d’être mentionnée. J’ai pourtant déjà commandé chez toi et j’ai prévu de recommencer. Bien sûr, je pourrais chercher quelles image haute-définition et les imprimer ou les faire imprimer en ligne par un labo photo. Peut-être même que je ne verrais pas la différence avec ton travail, je l’avoue. Mais à chaque fois que je regarde un de tes tirages, je te vois le préparer, j’imagine le travail nécessaire, j’apprécie ce travail invisible, j’ai l’impression de le deviner, même si mon oeil non avisé peut se fourvoyer. Je me dis que j’ai là quelque chose de qualité, que je pourrai transmettre. Ce n’est pas un objet, c’est une part de patrimoine, et moi qui ne suis pas spécialement à l’aise avec ce concept de manière générale, il me plait quand il touche quelque chose dont la principale valeur est due au savoir-faire de son créateur. Alors ne t’inquiète pas trop, tant que des béotiens comme moi seront capables d’apprécier ton travail, celui-ci devrait continuer à être estimé.

Merci.

3. Le 16 novembre 2011,
Bosco

Au contraire je sens (re)venir comme une vague de fond l’artisanat de qualité, le bel ouvrage et le produit cher et de haute qualité. Quand les grandes enseignes de luxe vendent du made in china à un prix exorbitant, le sentiment de foutage de gueule m’emplit, et je ne crois pas être le seul. Alors oui je crois que ce genre de commerces va se développer, que l’on va revenir à l’objet manufacturé par quelqu’un qui a du metier. Un objet que l’on gardera toute une vie parce qu’il tiendra toute une vie et qu’il aura de la valeur à nos yeux.

C’est un sentiment normal, un rejet de la consommation de masse de nos parents. Le retour à l’analogique après un gavage de numérique. C’est le bonheur de voir apparaitre une image lorsque l’on plonge sa feuille dans le révélateur. Et savoir que ce morceau de papier nous survivra comme ont survécu à leurs modèles les tirages au charbon de mes ancêtres que j’ai retrouvé dans un état de conservation remarquable (120 ans).

Ou seront mes fichiers jpg dans 120 ans? Ou seront vos tirages au Pt dans 120 ans?

4. Le 16 novembre 2011,
Vicnent

+1 avec tout ce que dire Nicolas plus haut.

le supplément d’âme, c’est d’abord dans la tête, et c’est la richesse personnelle.

5. Le 16 novembre 2011,
Franck

Hier matin, en me promenant pas loin des quais, je me suis enfin approché d’un hangar/atelier que j’avais repéré depuis cet été en passant un jour devant en voiture. Il y avait dedans toute la structure en bois d’un chalutier (côtier) de fort belle facture.

Hier j’ai passé quelques minutes à observer les artisans présents (ils étaient une demi-douzaine) en train de préparer les planches pour finir de couvrir la coque. J’ai pris quelques photos, bien sûr, en me disant que c’était étonnant de voir encore ce ‘fait-à-la-mano-tout-en-bois’ de nos jours ! J’étais persuadé qu’il n’y avait plus que métal soudé ou coque moulée (d’ailleurs j’ai vu quelques moules en fibre de verre dans le port de Saint-Gué).

Tout ça pour dire que j’apprécie plus l’ouvrage d’art(isan) que celui des usines robotisées. Tout ça pour dire que j’apprécie plus tes tirages (il y en a quelques-uns accrochés au mur à la maison) que ceux qu’on peut sortir soi-même d’une imprimante à jet d’encre. Dans le premier cas, l’artisan signe son ouvrage, dans l’autre cas il reste commun.

6. Le 16 novembre 2011,
Coincoin

Dans le domaine de la musique, l’industrialisation permet la production d’instruments de très bonne qualité à “moindre” coût (ça reste horriblement cher). Le point négatif c’est que tous les instruments de telle marque, tel modèle, sonnent de la même façon.

Mon saxophone d’une marque française aujourd’hui disparue, fabriqué à la main dans les années 50, a certes une mécanique moins performante que celle des instruments haut-de-gamme actuels, mais il sonne comme aucun autre. Il a une personnalité, si j’ose dire.

+1 pour le supplément d’âme donc, voire pour “l’âme” tout court. Vive le fait-main, et le savoir-faire qui va avec!!!

7. Le 16 novembre 2011,
entropik

“développer mon art”…la voie sinueuse et sèche tu as pris, mais c’est la plus belle non ?

ton billet me trouble, je suis un peu(beaucoup) dégoûté de mon travail “numérique” tout en jet d’encre en ce moment (que les gens ne comprennent pas plus je te rassures…), et je tombe sur tes doutes…moi qui suis en pâmoison devant ton parcour obstiné et atypique avec ton aventure de tireur artisanal, à contre-courant total de l’air du temps, du fleuve médiocre…

je parlais de toi encore ce matin à un proche, pour dire que ce que tu faisais était exceptionnel (techniquement…et maintenant je lis que tu maîtrise le baryté, respect…), et je lui ai indiqué ton site pour qu’il découvre le platine-paladium.

voilà, c’est pas un éloge post-mortem non plus hein…juste un encouragement à continuer de développer ton art ! Le reste passera…

8. Le 20 novembre 2011,
Emmanuel Clément

Bref, c’est quoi pour demain la valeur du fait-main, de l’unique avec ses imperfections ?

Il y a quelques années nous cherchions deux caisses en osier à mettre dans un meuble. Autour de nous, rien d’autre que du made in China à bas prix, et à vrai dire rien en véritable osier non plus !

Nous avions visité quelques temps plus tôt un village des bords de Loire, Villaine. Un village d’artisans en vannerie http://www.vannerie.com/ Nous avons fait réaliser sur mesure nos deux caisses par ces artisans. Elles nous ont coûté cher, beaucoup plus que nombre de personne n’oseraient mettre dans ce genre d’objet, d’ailleurs étant donné le prix, nous avions fait de cet achat un cadeau mutuel. A l’heure où j’écris ces mots, ces vanneries sont à côté de moi. A chaque fois que je les regarde ou que je les manipule, je pense à ce village, à l’osier des bords de Loire qui a servi à les confectionner et dont j’ai vu les champs, à ces artisans qui les ont réalisés et à qui j’ai donné du travail, non loin de chez moi, et j’ai plaisir à éprouver la très bonne facture de ces objets du quotidien.

Alors c’est quoi pour demain la valeur du fait-main ?

9. Le 29 novembre 2011,
Karl, La Grange
10. Le 31 janvier 2012,
Jean

À voir en rediffusion sur Arte +7, un documentaire allemand sur la coutellerie d’Auvergne : Thiers et Laguiole. À côté de l’artisan qui forge du damas torsadé, ce type est un amateur. À noter que je ne dis pas ça pour déprécier son travail. C’est dans la série 360° - Géo : La guerre des couteaux.

Blah ? Touitter !