Se refaire une virginité comme on s’achète un string. Au souk du coin, en moins de 5 minutes et pour moins de 300 DH [Dirhams marocains, 27 €]. Ce pourrait être une réclame, mais, surtout, devenir une réalité. L’hymen artificiel, produit chinois digne d’une boutique de farces et attrapes, risque de faire fureur sur le marché informel marocain. Kesako ? Une petite poche translucide de quelques centimètres de large contenant du liquide rouge, placée à l’intérieur du vagin, environ 20 minutes avant le rapport sexuel. Sous l’effet de la chaleur corporelle, la membrane se dilate et, lors de la pénétration, une sensation de défloration est ainsi recréée, le liquide rouge se dégage, imitant la rupture de l’hymen et tachant de quelques gouttes les draps. Et le tour est joué pour une somme modique.
Ce produit d’origine japonaise, conçu dans les années 1990 par un fabricant d’accessoires coquins, était proposé comme un sex-toy pour couple débridé. Mais la société chinoise Gigimo, qui propose une livraison dans le monde entier, sous pli discret, pour 30 dollars (230 DH), a saisi le potentiel commercial d’un tel produit dans les pays musulmans. “Ce kit est actuellement disponible en Asie du sud-est, en Asie du sud et dans les pays du Moyen-Orient”, détaille le distributeur sur son portail Internet. Bien décidé à pénétrer ces marchés, Gigimo s’est offert, fin septembre, une publicité -en arabe- sur les ondes égyptiennes. Stupeur dans les chaumières. La presse locale enfonce le clou en affirmant que le produit serait bientôt disponible sur le marché pour 83 livres égyptiennes (120 DH). Scandale dans le landerneau politique. Les députés conservateurs montent au créneau. Le cheikh Sayed Askar, membre des Frères musulmans et de la commission parlementaire des affaires religieuses, demande au gouvernement l’interdiction d’importer et de commercialiser ce produit “dangereux”, qui permettrait aux femmes de “succomber à la tentation du vice”. La polémique franchit vite les frontières et arrive au Maroc… avant même le produit incriminé.
[…] Il n’en fallait tout de même pas plus au Conseil des ouléma de Rabat. Fidèle à l’adage “mieux vaut prévenir que guérir”, il n’a pas attendu pour se prononcer sur le sujet. Sans suspense, il condamne cette “brèche ouverte” aux relations illégitimes. Dans une fatwa émise fin octobre, ces gardiens du temple religieux réaffirment que, selon le Coran, “l’hymen ne peut être recousu” et déclarent que l’utilisation d’un hymen artificiel est une “tricherie interdite”, qui porte “atteinte aux principes et valeurs de l’islam”. Les ouléma s’attaquent aux utilisatrices et aux vendeurs du gadget, qui portent préjudice aux maris. Mais les théologiens ou autres prédicateurs ne sont pas unanimes. Pour Abdelbari Zemzmi, député islamiste du Parti de la vertu et de la renaissance, l’hymen artificiel peut être licite pour les femmes victimes de viol ou en cas de perte accidentelle de la virginité. Et l’ancien imam d’ajouter qu’il n’existe pas d’obligation d’en informer l’époux. “Le mariage est souhaitable dans l’islam et tout moyen pour y parvenir est légitime”, a-t-il expliqué dans la presse.
TelQuel Magazine, Wafaa Lrhezzioui : “Like a Virgin…”.
Blah ? Touitter !