Lettre à Monsieur Crevier, président et éditeur de La Presse,
Christian Bégin au clavier. Comédien, auteur et citoyen, évidemment.
J’ai eu le plaisir de passer une soirée agréable en votre compagnie il y a deux ans maintenant. Peut-être vous en souvenez-vous. Échanges chaleureux, ludiques, éclairés; je vous trouvais sympathique et inspirant. Il y a de ces gens qu’on rencontre fugitivement et qui vous apparaissent intègres, qui vous inspirent spontanément confiance. Faut dire que je fais facilement confiance aux gens, que je suis souvent enthousiaste à l’idée d’aller à la rencontre, si brève soit-elle, de gens qui font dans la vie autre chose que moi et qui semblent le faire avec passion et sincérité.
En lisant votre journal depuis le début de cette crise étudiante, journal auquel je suis abonné depuis de nombreuses années, je ressens un malaise croissant avec la ligne éditoriale choisie par La Presse. J’y trouve une manipulation pernicieuse de l’information et un travail de propagande inquiétant. Samedi matin, le 19 mai 2012, vous atteignez des sommets de mauvaise foi et de détournement de l’opinion publique en faisant de votre première page un mensonge éhonté. Ce sondage tendancieux, dont la méthodologie est même contestée et expliquée plus précisément dans Le Soleil, laisse entendre que le Québec est massivement en faveur de la loi 78 et de la ligne dure choisie par ce gouvernement indigne et — c’est là que je considère que vous faites preuve d’une odieuse malhonnêteté — ce n’est que beaucoup plus loin dans l’article qu’on mentionne du bout des lèvres que ce sondage ne comporte aucune question relative au droit de manifester et qu’il a été tenu avant même que soit rendu public l’entièreté du contenu de la loi. De plus l’échantillonnage utilisé est fort contestable et ses résultats sont non probabilistes.
Je ne parle pas ici des éditoriaux de monsieur Pratte ou des commentaires de madame Gagnon et consorts qui sont désolants mais qui reflètent leur opinion que, vous aurez compris, je ne partage pas du tout et qui me découragent… et qui souvent me semblent dictées par de plus hautes instances… Mais bon… Ça se peut… C’est souvent dans l’ordre actuel des choses… malheureusement !
Vous comprendrez que je vous parle de manipulation volontaire de l’information. Je vous parle monsieur Crevier de DÉSINFORMATION et de propagande. Je vous parle d’un journal à la solde des puissants et qui outrepasse son droit à une ligne éditoriale en choisissant de trafiquer l’information.
Devant ce qui me semble odieux et malsain et pervers dans cet indicible détournement de l’opinion publique à des fins inqualifiables, je vous annonce monsieur Crevier que je me désabonne de votre journal et que je vais m’employer, de par l’image publique dont je jouis de par le métier que j’exerce et qui m’offre des fenêtres de visibilité une peu plus grandes, que je vais m’employer donc à inviter les gens tout aussi inquiets et en colère que moi devant ce manque de rigueur journalistique et d’honnêteté à en faire autant.
J’appellerai à un désabonnement massif de votre journal. Cela aura l’effet que ça aura et sûrement que ça ne vous inquiète pas beaucoup mais, vous comprendrez que je ne peux me taire devant cet affront fallacieux…
Nous vivons des temps sombres vous ne croyez pas ? Pourquoi contribuer si malhonnêtement à l’obscurantisme ambiant ?
Christian Bégin.
Blah ? Touitter !