Carrés de la violence
Notre ministre de la Culture, Christine Saint-Pierre, a déclaré que le carré rouge était un symbole de violence, d’intimidation… comprendre de “terrorisme”.
Elle n’a aucune originalité en la matière, puisqu’elle reprend les mots assénés jour après jour en Chambre par son maître, le Premier ministre Jean Charest, ainsi que par ces chroniclowns et foutres du Roi qui répètent en canon ad nauseam cette antienne frelatée. Des gens se sont cependant émus qu’elle l’eut fait à l’égard d’un poète échevelé et campagnard qui aurait probablement des difficultés à effrayer une souris grugeant les grains d’une grange de Mauricie.
Porter ce carré rouge est devenu un délit, tu peux te faire arrêter dans la rue par la police pour ce seul motif. Innocent carré de feutrine qui t’expose à te faire insulter, maltraiter, frapper, menotter, emprisonner. Tu peux même te méfier de ce voisin d’ordinaire si effacé, si placide, qui soudainement te cracheras dessus, t’arroseras de son mépris.
J’ai fermé mes yeux.
J’ai revu cette frêle jeune fille de ma rue, un genre de petit moineau qui, tout mouillé, ne doit pas peser plus qu’une brassée de linge, toute jolie juste vêtue d’une petite robe de cotonnade imprimée. Elle avait un carré rouge épinglé à hauteur de ses semblants de seins. J’ai eu peur, j’ai vu la violence et l’indimidation.
J’ai revu ce très vieil homme, sur le quai de la station Sherbrooke, assis, digne, immobile, dans un vieux costume propre bien qu’élimé. 80 ans sans doute, peut-être bien plus. Il avait un énorme carré rouge sur le revers de sa veste. J’ai eu peur, j’ai vu la violence et l’intimidation.
J’ai revu ce caissier au supermarché IGA sur Saint-Zotique, un grand jeune homme charmant, tout sourire, plein d’attention pour chaque client malgré le fort achalandage de fin d’après-midi. Il portait un carré rouge en boucle d’oreille, doublé d’un carré noir. J’ai eu peur, j’ai vu la violence et l’intimidation, sans compter le péril anarchiste.
De fait, je n’ose à peine sortir de chez moi… Ils sont partout.
Ces gens m’agressent à ainsi exposer leur carré rouge flamboyant dans des environnements d’ordinaire si gris, insignifiants et sécurisants.
Leurs carrés rouges me hurlent au visage qu’ils sont plein de vie et de sang, de sensibilité et d’altruisme. Leur foutu carré qui n’est en fait qu’un cœur masqué.
Oui, vos carrés rouges sont violents. Oui, vos carrés rouges m’intimident. Ils palpitent. Ils m’agressent. Ils me remuent les tripes et me donnent envie de pleurer.
Salauds de terroristes humains.
Blah ? Touitter !