Groupuscule de 78 “juristes”
Alors que l’arrêt de la cour de cassation sur la légalité d’un mariage homosexuel franco-marocain sera rendu fin janvier, l’avocat du couple, maitre Didier Besson, répond aux 78 juristes qui avaient dénoncé, dans les colonnes du Figaro, cette union (liens ajoutés par mes soins) :
En ma qualité d’avocat du couple homosexuel franco-marocain qui s’est marié suite à la confirmation par la Cour d’Appel de Chambéry de la mainlevée de l’opposition à mariage prononcée par le Tribunal de Grande Instance de Chambéry, je me dois de constater que la tribune publiée le 15 décembre 2014 ne comporte aucun raisonnement juridique, mais est seulement constituée de contrevérités grossières, d’oublis volontaires et d’une méconnaissance totale du dossier et du droit.
Si cette tribune est signée par 78 juristes des plus disparates, il convient de ne pas se méprendre et la considérer pour ce qu’elle est : un acte de propagande de « la manif pour tous » qui avance désormais masquée et trompe l’opinion publique qu’elle prétend informer.
C’est ainsi qu’il convient de rappeler que l’association AHLUNA, citée dans cette tribune comme une association franco-marocaine dont l’objet est de veiller au respect des valeurs familiales de la société maghrébine, est en fait une boîte aux lettres vide montée de toute pièce dont les statuts ont été déposés cet été dans l’unique but de pouvoir conclure devant la Cour de Cassation pour faire entendre la voix de « la manif pour tous ».
Par contre, la tribune omet de citer dans les intervenants à la procédure le défenseur des droits qui, en l’espèce, en la personne de feu Dominique Baudis, a produit des observations le 9 avril 2014 pour conclure au caractère discriminatoire de l’opposition à mariage du procureur de la République selon la nationalité et l’orientation sexuelle des intéressés. Pour écarter l’application de la convention franco-marocaine, il faut que la loi sur le mariage pour tous ait modifié l’ordre public international français qui se définit comme les « principes de justice universels considérés dans l’opinion française comme doués de valeurs internationales absolues. »
Les rédacteurs de la tribune concluent que des millions (sic) de gens seraient descendus dans la rue pour contester la loi sur le mariage pour tous, ce qui ne permettrait pas de considérer cette nouvelle norme comme très largement acceptée par l’opinion française.
« C’est la société qui considère cette norme comme tellement essentielle à ses yeux que même l’autorité d’un accord international conclu avec un autre État ne saurait l’évincer ». Or, précisément, sur ce premier point, le représentant de la société au sein de la procédure n’est autre que le Ministère public qui vient dans ses conclusions de conclure au rejet du pourvoi. L’Avocat général près la Cour de Cassation, dans un avis, détaille un raisonnement juridique sans faille aux termes duquel il conclut que :
« La portée de la règle nouvelle posée par l’article 202-1 alinéa 2 du Code Civil est bien celle d’une modification de l’ordre public international français, à l’instar de ce que le droit belge a retenu dans une règle de conflit de loi aux allures de principes essentiels du droit en portant intervention de l’ordre public. La confirmation du jugement entrepris permet d’y puiser les motifs les plus pertinents d’un rejet certain du pourvoi. La loi du 17 mai 2013 a implicitement, mais nécessairement modifié l’ordre public international français de sorte qu’une discrimination à l’accès au mariage fondée sur le sexe justifie l’éviction de l’article 5 de la convention franco-marocaine du 10 août 1981. »
Contrairement à ce qui est également affirmé de manière tronquée dans le texte de la tribune du 15 décembre 2014, il ne s’agit pas en l’espèce d’imposer nos vues aux autres États amis de la France comme le Maroc, mais de permettre en France et non au Maroc l’exercice d’un droit au mariage plus étendu.
S’agissant de la valeur internationale du nouveau droit au mariage :
L’article 12 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme protège le droit de se marier.
Dans un arrêt récent que semblent ignorer les signataires de la tribune et contrairement à ce qu’ils écrivent, la Cour européenne des droits de l’homme, qui avait jusqu’alors une conception traditionnelle du droit au mariage, a fait évoluer sa jurisprudence vers une consécration d’un droit au mariage ouvert à tous. (SCHALK ET KOPF c. Autriche du 24 juin 2010 [n° 3014/04]), la Cour a estimé que le droit de se marier prévu par l’article 12 ne devait plus être considéré comme celui étant limité au mariage entre deux personnes de sexe opposé.
Il n’y a dans le fait de faire primer la loi sur le mariage pour tous qui a modifié l’ordre public international français aucune remise en cause de la parole de la France, mais une application stricte des règles tant du droit international que du droit interne.
Le lecteur, en conclusions, est invité à prendre la tribune précitée pour ce qu’elle est : non pas une analyse juridique, mais une opinion politique contre les dispositions de la loi sur le mariage pour tous.
Ce groupuscule des 78 n’a d’autre prétention que de promouvoir une discrimination à l’égard des homosexuels en fonction de leur nationalité ce qui est à la loi.
Le groupuscule de 78 “juristes” (qui sont en fait 80) proches de la Manif pour tous :
- Bertrand ANCEL, professeur émérite de droit privé, Université Paris 2 Panthéon-Assas
- Tanguy BARTHOUIL, avocat (Avignon)
- Guillaume BERNARD, maître de conférences en histoire du droit, ICES la Roche-sur-Yon
- Daniel BERRA, professeur émérite de droit privé, Université Aix-Marseille
- Françoise BESSON, avocat (Paris)
- Jean-René BINET, professeur de droit privé, Université de Franche-Comté
- Christine BOILLOT, maître de conférences en droit privé, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
- Georges BOLARD, professeur émérite de droit privé, Université de Bourgogne
- Damienne BONNAMY, maître de conférences de droit public, Université de Franche-Comté
- André BONNET, Ancien président des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel, avocat
- Claire BOUGLE-LE ROUX, maître de conférences en histoire du droit, Université de Versailles
- Roger BOUT, professeur émérite de droit privé, Université d’Aix-Marseille
- Monique BANDRAC, professeur honoraire de droit privé, Université Paris 12
- Bernard DE BOYSSON, Docteur en Droit, avocat (Lyon)
- Clotilde BRUNETTI-PONS, maître de conférences en droit privé, Université de Reims
- Stéphane CAPORAL, professeur de droit public, Université de Saint-Etienne
- Claude CHAMPAUD, professeur émérite de droit privé, Université Rennes 1
- Jocelyn CLERCKX, maître de conférences en droit public, Université du Havre
- Julien COUARD, maître de conférences en droit privé, Université du Sud Toulon-Var
- Christophe COURAGE, avocat (Paris)
- Marie-Yvonne CREPIN, professeur émérite d’histoire du droit, université de Rennes 1
- Pierre CROCQ, professeur de droit privé, Université Paris 2 Panthéon-Assas
- Françoise DEKEUWER-DEFOSSEZ, professeur émérite de droit privé, Université Lille 2
- Gregory DE MOULINS BEAUFORT, avocat (Paris)
- Geoffroy DE VRIES, avocat (Paris)
- André DECOCQ, professeur émérite de droit privé, Université Paris 2 Panthéon Assas
- Cécile DERAINS, avocat (Paris)
- Eric DESCHEEMAEKER, Lecturer in European Private Law (Université d’Edinburgh)
- Mélina DOUCHY-OUDOT, professeur de droit privé, Université du Sud Toulon-Var
- Cyrille DOUNOT, maître de conférences en histoire du droit, Université de Rouen
- Guillaume DRAGO, professeur agrégé des Facultés de droit
- Olivia DUJONCHAY, avocat (Paris)
- Gilles DUMONT, professeur de droit public, Université de Nantes
- Jean DUPONT-CARIOT, notaire (Paris)
- Thomas GENICON, professeur de droit privé, Université de Rennes 1
- Gérard GUYON, professeur émérite d’histoire du droit, Université de Bordeaux
- Jean-Louis HAROUEL, professeur d’histoire du droit, Université Paris 2 Panthéon Assas
- Joël HAUTEBERT, professeur d’histoire du droit, Université d’Angers
- Sophie HERREN, Docteur en droit, avocat (Paris)
- Blandine HERVOUET, maître de conférences en histoire du droit, Université de Caen
- Suzanne HOVASSE, professeur de droit privé, Université de Rennes 1
- André LAINGUI, professeur émérite d’histoire du droit, Université Paris 2 Panthéon Assas
- Gwendoline LARDEUX, professeur de Droit privé, Université d’Aix-Marseille
- Yves LASSARD, maître de conférences en histoire du droit, Université Grenoble 2 Pierre Mendès France
- Xavier LATOUR, professeur de droit public, Université de Rouen
- Jean Tugdual LE ROUX, notaire (Pleumeur-Bodou)
- Philippe LE TOURNEAU, professeur émérite de droit privé, Université Toulouse 1 Capitole
- Bertrand LIONEL-MARIE, avocat (Paris)
- Gaëlle LIONEL-MARIE, avocat (Paris)
- François-Xavier LUCAS, professeur de droit privé, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
- Martial MATHIEU, professeur d’histoire du droit, Université de Grenoble Pierre Mendès France
- Laurence MAUGER-VIELPEAU, professeur, Université du Havre
- Yves MAYAUD, professeur de droit privé, Université Paris 2 Panthéon Assas
- Gérard MEMETEAU, professeur de droit privé, Université de Poitiers
- Michel MENJUCQ, professeur de droit privé, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
- Jean MORANGE, professeur de droit public, Université de Limoges
- Anne MORINEAUX DE MARTEL, avocat honoraire
- Santiago MUZIO DE PLACE, avocat (Lyon)
- Jean PAILLOT, avocat (Strasbourg), expert au Conseil de l’Europe
- Bertrand PAUVERT, maître de conférences en droit public, Université de Haute-Alsace
- Armel PECHEUL, professeur de droit public, Université d’Angers
- Raphaël PEUCHOT, avocat (Lyon)
- Jean PRADEL, professeur émérite de l’Université de Poitiers
- Vincent PUECH, avocat (Avignon)
- Jean-Claude RICCI, professeur agrégé des Facultés de droit
- Yohann RIMOKH, avocat (Bruxelles et Lyon)
- Janick ROCHE DAHAN, maître de conférences en droit privé, Université du Sud Toulon-Var
- Gabriel ROUJOU de BOUBEE, professeur de droit privé émérite, Université de Toulouse 1 Capitole
- Marie-Eve ROUJOU de BOUBEE, Maitre de conférences honoraire en droit privé, Université de Toulouse 1 Capitole
- Solange SEGALA, maître de conférences en histoire du droit, Université de Valenciennes
- Daniel TARASCONI, avocat (Marseille)
- François-Guy TREBULLE, professeur de droit privé, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
- Olivier TOURNAFOND, professeur à l’Université de Paris Est
- François VALLANCON, maître de conférences honoraire en histoire du droit, Université Paris 2 Panthéon-Assas
- Raymonde VATINET, professeur de droit privé, Université Panthéon-Assas Paris 2
- Marie-France VERDIER, maître de conférences en droit public, Université Montesquieu Bordeaux 4
- Edouard VERNY, professeur de droit privé, Université Rennes 1
- Thierry VIGNAL, professeur de droit privé, Université de Cergy-Pontoise
- Ludovic DE VILLELE, professeur de droit privé associé, université d’Evry
- Michel DE VILLIERS, professeur émérite de droit public, Université de Nantes
Dave
Pourquoi ne suis-je pas surpris de voir le corps éducatif de cette université située dans une petite rue du 6è arrondissement parisien attenante au Jardin du Luxembourg, très, très bien représentée dans cette liste…
Blah ? Touitter !