“Miscellanées”

actus et opinions

Antisémitisme, la parole libérée

Je viens de voir le très beau et intéressant reportage d’Élie Chouraqui et Yves Azéroual, diffusé sur France 2, qui traite de la montée de l’antisémitisme chez les adolescents, au sein de cette jeunesse en quête de repères, en plein malaise identitaire, exclue et manipulée, que l’on peut notamment rencontrer dans les banlieues des grandes villes.

J’en ai retenu cette expression “la parole libérée”, comme si, effectivement, il était aujourd’hui, plus qu’hier, comme plus “autorisé”, mieux “bien-fondé”, de tenir des propos antisémites sous prétexte de conflit israélo-palestinien (qui est avant tout un conflit territorial, avant d’être manipulé par les extrémistes religieux des deux bords).

Il ne faut pas se voiler la face, l’antisémitisme a toujours existé. Après la guerre, il était plus ou moins caché, il était inavouable et ne pouvait qu’attirer l’opprobre. Cependant, il était là, et bien là, mais à couvert, au secret. Ce qui a changé aujourd’hui, c’est que la parole s’est libérée. Dans certains milieux, principalement issus de l’immigration maghrébine, elle est même devenue courante et socialement acceptable. Et à titre plus marginal, elle est toujours présente dans l’ensemble de la société.

Les paroles recueillies par Élie Chouraqui dans ce collège Paul Éluard de Montreuil, auprès de jeunes d’origine maghrébine, sont vraiment effrayantes. Entendre une jeune fille dire que la raison des violences est que “les Juifs sont nés pour être des victimes, que c’est comme ça”, et cette autre qui déclare “qu’elle en à rien à foutre” tant qu’elle n’est pas directement impliquée dans les rixes à la sortie des classes, cela fait un peu froid dans le dos. Et il faut savoir que France 2 a fait opérer des coupes sur les propos les plus violents [1].

Béatrice Leca, principale du collège Paul Éluard, a réagi vivement à ce reportage, qui stigmatise son établissement, et a dénoncé le silence sur les opérations menées depuis plusieurs années pour lutter contre le racisme et l’antisémitisme, d’avoir “passé sous silence le travail de rapprochement des deux établissements” (entre Paul Éluard et l’ORT, Organisation reconstruction travail, collège privé juif voisin) [2]. Mais ceci est un faux débat et ne fait que souligner l’insuffisance de ces actions. La volonté des réalisateurs n’était pas de condamner un établissement scolaire en particulier, mais d’illustrer un phénomène général qu’il serait vain de vouloir minorer. Paul Éluard n’est sans doute pas le pire, c’est un collège ordinaire comme tant d’autres, ce n’est pas une caricature, et c’est ce qui met encore plus en lumière l’ampleur du mal, diffus et généralisé.

Alors, il faudra apprendre aux jeunes Arabes que les Juifs sont leurs frères, et que les religieux d’entre eux partagent le même Dieu.

Il faut répéter que l’antisémitisme est inacceptable, et qu’il est la porte d’entrée à tous les autres racismes et xénophobies de tous genres, contre les arabes, les gitans, les homos ou encore les francs-maçons.

Et ne nous gorgeons pas de statistiques du Ministère de l’Intérieur, un seul acte raciste, et qui plus est antisémite, ce sera toujours un acte de trop.

Ce genre (trop rare) de reportage agit comme un signal d’alarme et nous invite tous à la vigilance au quotidien.

Le racisme, ce n’est pas une opinion, c’est une gangrène sociale, c’est un pourrissement moral, c’est un délit.

[1] “Ce n’est pas notre éthique qui est en jeu, précise Yves Azéroual (cosignataire du reportage), mais la loi qui interdit aux journalistes de relayer des propos racistes. Pourtant ce n’est pas en cassant le thermomètre qu’on fait tomber la fièvre.”

[2] En février 2002, une classe de l’ORT et une de Paul Éluard ont fait un voyage commun au camp d’Auschwitz. Les élèves de l’ORT en ont fait un film, ceux de Paul Éluard des photos. En 2003, des groupes des deux établissements ont fait des travaux d’écriture à partir du livre de Tahar Ben Jelloun, Le racisme expliqué à ma fille.
“ORT pour Organisation Reconstruction Travail. Ces établissements scolaires juifs, qu’on trouve dans une centaine de pays, ont été créés en Russie, en 1880, alors que le tsar venait d’interdire la fréquentation des écoles aux enfants juifs. Il s’agissait ainsi non de dispenser à ces derniers les enseignements théoriques auxquels avaient droit les non-juifs, mais de leur apprendre un métier. L’école est juive, mais non religieuse.” [Le Monde]

1. Le 16 avril 2004,
Pasfolle

Conflit territorial avant tout, je suis d’accord. Mais il y a des gens betes des deux cotes. Entendu au Texas, juste apres 9-11, alors que quelques Americains commencaient a se poser plein de questions sur la politique exterieure de leur pays, notamment, pourquoi le “droit a l’existance” d’Israel etait defendu si ardemment aux US. La reponse d’une dame juive:”Parce que Dieu l’a dit. Dieu a donne cette terre aux JUIFS et a personne d’autre.” Genre ce n’est pas aux hommes de remettre en question la volonte divine. Genre c’est pas ma faute si je fais partie du ’peuple elu’ et que le reste des hommes est moins important. C’est une raison souvent invoquee implicitement de ce cote de l’Atlantique je trouve. Voila, pour dire qu’autant l’antisemitisme est repugnant, autant je trouve toute forme de discrimination (inclus un espece de racisme envers tout ’goye’) detestable.

2. Le 16 avril 2004,
Damien Bonvillain

Elie Chouraqui était passé le matin même dans l’émission de J-M Morandini sur Europe 1. On peut noter plusieurs choses. 1) Le manque d’éducation de ces jeunes, laissés sur le bas côté. Ce n’est pas tant les programmes scolaires qui sont en cause que le manque de réaction des “encadrants” vis-à-vis des préjugés avec lesquels ils grandissent.

2) Ce reportage n’a pas vocation à illustrer un cas général mais à montrer à quelles extrêmités on est rendu aujourd’hui dans certains quartiers. E. Chouraqui a été clair là-dessus, le choix de l’établissement est tout sauf le fruit du hasard.

Note plus légère : Laurent oublie le racisme anti-clérical :-)

3. Le 16 avril 2004,
Laurent

L’anti-cléricalisme n’est pas un racisme ;-)

4. Le 17 avril 2004,
stephane

Il ne date pas d’aujourd’hui cet antisémitisme. Déjà dès 1992, certains profs se plaignaient de ces paroles émanant de certains jeunes. Que ce reportage soit récent ne signifie pas que cette question le soit.

5. Le 19 avril 2004,
bix

Il y a quand même quelque chose qui me gène dans tout ça, ce sont les témoignages concordants de profs, de parents d’élèves et d’élèves des deux établissements, qui disent que le reportage est tout de même biaisé. Des témoignages disant que Chouraqui s’est énervé des propos mesurés et modérés des ados pour qu’ils lui livrent quelque chose d’intéressant. Je ne dis évidemment pas que personne n’est antisémite en France ou dans les collèges, mais que des reportages comme celui d’Elie Chouraqui ne sont peut-être pas à prendre sans précaution (comme tout d’ailleurs). Il aura au moins eu le mérite de faire parler de l’antisémitisme (il va bien se trouver quelques FAF pour dire qu’on en parle trop, on parie ?)

Des gamines d’origine malienne et musulmane qui crient que les juifs sont leurs ennemis, je l’ai vécu, mais savaient-elles seulement ce qu’elles disaient ? En avaient-elles réellement conscience ? Qui leur avait inculqué ça bordel (ouais, c’est cette personne qu’il faut chopper) ? Ah ouais, ces jours-là l’aide aux devoirs c’était pas facile. :/

6. Le 21 avril 2004,
skoteinos

Ce qui m’a surpris, c’est le sang froid, la distance paisible et presque bienveillante de Chouraqui lorsque des gamines lui expliquent par A + B que les juifs sont prédéterminés à la souffrance (élus pour s’en prendre plein la gueule) et que les actes à leur encontre ne sont que la réalisation de cette prédétermination.

7. Le 9 mars 2005,
léa

Bien, je fais partie moi meme du collège Paul Eluard dont il a été question, je suis collègienne, et l’année dernière en 6eme. J’y suis donc je sais . M.Chouraqui, a interrogé des élèves de 3eme. J’ai lu des articles dans le journal hebdomadaire de Montreuil, que M. Chouraqui avait interrogé plusieurs élèves et beaucoup avaient des propos très interessant, et réfléchis, mais M.Chouraqui n’a pas tenu compte de ces avis là. Il n’a gardé les propos que des 2/3 personnes tenant des propos plus ou moin antisemites. Ces personnes là ont d’ailleurs eu un entretient avec Mme Lecas, la proviseur, et plusieurs proifesseurs leur ont parlé. M.Chouraqui les “poussait” a dire ce qu’il voulait entendre. et “manque d’éducation de ces jeunes, laissés sur le bas côté” par Damien Bonvillain (plus haut) avec vous vraiment l’expérience du a cette parole? De plus ce que je trouve assez “drole”, c’est que Monsieur Brar, Maire de Montreuil, a demandé suite au reportage de M.Chouraqui de quoi il parlait quand il disait aux jeunes “vous pouvez me parler, j’ai vecu ici, je sais ce que vous ressentez..ect” Et il lui a répondu qu’il avait vecu a Montreuil étant jeune, qu’il habitait a paris mais que sa mere l’envoyait jouer dans la rue de paris.Ce n’est pas pour autant qu’il en connait un rayon sur ce point …

Voila, je sais que nombre de gens ont vu, ou lu des articles, ou meme entendu, mais avant d’avoir des idées (vous n’étiez pas au courant) comme plus haut, je voulais dire ce qui était.Je suis d’accord qu’il y ai eu des propos raciste, mais si peu, meme nul a rapport aux jeunes qui parlaient franchement et qui parlait de choses justes, et réfléchies.

J’ai fait un long “discours” mais j’espère que ça fera réfléchir plus d’un.

Léa 5emeA au Collège Paul Eluard

8. Le 9 mars 2005,
marion

Je suis aussi au collège Paul Eluard, en 3ème, j’étais donc en 4ème quand M. Chouraqui a fait ce reportage. Je me souviens très bien du jour ou j’ai vu le reportage à la télévision, j’étais simplement sidérée.Quand j’ai vu que il avait laissé plusieurs minutes la parole à des jeunes, devant un portail, la nuit, et qu’il leur a laissé débiter leurs bêtises, sachant très bien que ce genre de personnes seraient prêtes à dire n’importe quoi pour passer à la télévision, alors qu’il a passé plusieurs heures à interroger des élèves qui avaient des choses à dire, qui ont dit des choses très intéressantes (j’ai vu la cassette originale) et Chouraqui à côté, qui poussait les élèves à dire ce qu’ils ne pensent pas “moi, je suis là pour entendre la vérité” a-t-il dit après une demi heure d’interview… Les élèves seraient-ils des menteurs? Au début de l’interview, il demande à tous les élèves leurs nationalités, il les classe déjà par communauté.

Une élève dans cette classe était juive, il l’a interviewée, elle a dit qu’elle n’avait jamais eu de problèmes avec quiconque… pourquoi n’a-t-il pas gardé son témoignage? après ce reportage, les élèves se sont sentis “trahis”, c’est vrai qu’il y a de quoi être déçu, quand on a été interviewé plusieurs heures, et que finalement, on ne voit de ça que quelques déclaration d’élèves fatigués de ces heures de parlotte. Je ne dis pas que ces élèves ont eu raison de dire ça, mais disons qu’ils ont des circonstances atténuantes. J’aimerai aussi ajouter que la directrice de l’O.R.T s’est joint à Mme Leca (principale de Paul Eluard) pour dénoncer les mensonges de ce reportage. Vraiment, je suis révoltée par ce reportage et par ce que vous en dites. De plus, mon père a été interrogé par M.Azeroual, car il est actif dans le quartier, il a aussi dénoncé des jeunes qui avaient commis des actes antisémites. Quand il lui a répondu que le quartier n’était pas tant touché par l’antisémitisme que ça, que l’on avait pas vu de bagarre depuis bien longtemps, M. Azeroual, très désagréable, a répondu “Alors vous allez me dire que c’est un îlot de tranquillité ici! c’est ça?”. Aparemment, ils étaient partis pour faire ce reportage, en sachant déjà ce qu’ils y mettraient. Je m’excuse qi quelques fautes d’orthographe ou de grammaire se sont glissées dans mon texte. Marion, 3èmeD au Collège Paul Eluard

9. Le 9 mars 2005,
Louise

Monsieur Chouraki a t-il vraiment aidé à lutter contre l’antisémitisme en enterrant un collège qui a pourtant mener campagne contre les violences entre ses élèves et ceux de l’ort.D’autant que ces violences n’ont surement pas de rapport avec de l’antisémitisme mais plutôt de la bêtise et de l’ignorance. Ses quelques éleves ont bien maintenant dix ans de plus ou ont été repéré par la police. Serais-ce vraiment mal de parler de toutes ces actions menées par une ville active? Evidemment le reportage n’en serait que moins attrayant je vous l’accorde… Louise véritable, car il ne suffit pas de le clamer, habitante de Montreuil…

10. Le 12 avril 2005,
meunier

je tiens a exprimer ma colere , que ce soit envers les juifs que les arabes . en effet je suis contre l antissemitisme et surtout contre la violence surtout au sein d un etablissement scolaire il est peut etre temps de donner des cours a ces jeunes enfants qui reagissent par rapport aux propos de papa et de maman, sans meme savoir les reeles probleme israelo palestiniens . il est temps d agir contre la violence en mettant meme si c est malheureux a dire des vigils pour un peu plus de surveillance pour que chaques eleves puissent sorti de son lycee sans craindre d etre agresser …. je crois que c est la solution premiere

11. Le 9 septembre 2005,
léa

Alors, pour répondre au commentaire juste avant, je voudrai vous demander, savez vous ce qui se passe au juste dans ce collège? je répondrai a votre place, non. JE suis au collège dont il est question, et pour vous répondre, nous avons travaillons sur le pacifisme depuis déjà plus de 5ans dans le secteur.Sur 500 élève 5 ont peut etre des propos racistes. Mais ceux là, les professeurs leur ont parlé, et leur ont expliqué. LE reportage n’a été tissé que sur le bon vouloir de chouraqui, il n’a tiré que ce qu’il voulait savoir,entendre et montrer! bref j’aimerai que cela soit clair, c’est vrai que cela n’a pas toujours été rose, mais tous les conflits ont été réglés, et il n’y a pas a revenir dessus pour les raviver.

Blah ?