Citation du jour
Je reproche souvent aux carnetiers “influents” de crier aux loups sans y mettre la forme. C’est la même technique qu’adoptent les politiciens d’extrême droite pour déstabiliser un milieu. Quand on a une voix forte dans le monde du Web, on doit apprendre également à être responsable par rapport à cette voix. Il ne s’agit pas seulement d’écrire, parce-que l’on a envie de dire les choses, mais il faut également être prudent sur la portée des mots que l’on partage. Je suis persuadé que l’intention n’est pas forcément mauvaise, mais le manque de conscience y est certain. J’ai souvent failli arrêter d’écrire ici, car mes mots devenaient trop importants, non par leurs valeurs intrinsèques, mais par leurs valeurs données une fois collectivement lus.
En fait, plus vous êtes “connu” sur le Web, plus vous devez être “éthiquement responsable” de vos mots.
Je n’arrive pas à ne pas me sentir concerné (même si, grands dieux, je ne me compare pas à un pape de la blogosphère anglo comme un Mark Pilgrim cité dans le billet).
Ce qui donne l’envie d’avoir un blogue plus “privé”, plus intime et pas sous mon vrai nom, mais est-ce possible, et est-ce responsable ?
Le “éthiquement responsable” résonne dans mon crâne, d’un côté, je lui accorde une très grande valeur et tente de m’y tenir, de l’autre, il résonne avec auto-censure (voire avec politiquement correct). Ambivalence…
“J’ai souvent failli arrêter d’écrire ici, car mes mots devenaient trop importants, non par leurs valeurs intrinsèques, mais par leurs valeurs données une fois collectivement lus.” D’autant plus que l’on a pas le choix de son public, et aussi, que l’on peut parfois mal s’exprimer.
On prête trop aux blogueurs.
PS. Ha, le La Grange, c’est voulu…
karl
La Grange: aucun problème, je trouve cela drôle.
Ce qui est encore plus amusant, c’est que certains se sentent visés alors que je n’y avais même pas pensé. Et là je ne parle pas de toi Laurent. Comme quoi mon article « quand le pathos rejoint le Web » est toujours d’actualité.
En tout cas, c’est un gros problème les carnets Web quelque part, entre l’auto-censure, l’éthique, etc. C’est l’apprentissage de l’utilisation de notre parole face au publique, c’est l’apprentissage de la vie en collectivité aussi. On a beau se réfugier derrière son carnet isolé derrière son écran, il n’en reste pas moins que la parole publique est un acte collectif avec une certaine responsabilité.
Laurent
Je sais bien que tu ne parlais pas de moi, c’est juste entré en résonnance avec certaines de mes préoccupations.
Hoedic
> Ce qui donne lenvie davoir un blogue plus privé, plus intime
Je ne vais pas remonter dans tes archives mais est-ce que ce n’était pas le but d’Embruns par rapport au Navire ?
Enfin moi j’dis ça, j’dis rien…
karl
trop tard Hoedic, c’est dit et en public :p
Laurent
Hoedic >: Je me suis un peu écarté de ma feuille de route depuis.
Thomas
> On a beau se réfugier derrière son carnet isolé derrière son écran, il n’en reste pas moins que la parole publique est un acte collectif avec une certaine responsabilité.
Thomas
Comme c’est vrai… Pour référence : http://www.la-grange.net/2002/08/27.html
[la moitié de mon commentaire précédent a été emportée par une vague :-( ]
nicky
“On prête trop au blogueur” ou ce sont seulement les blogueurs qui prêtent trop aux autres blogueurs ? ou ce sont les blogueurs qui veulent être prêter aux autres (à grand renfort de coups de sirène dès qu’on y prette un peu attention) ?
Isabelle
Puis-je me permettre un long commentaire ici, plutôt qu’un billet ailleurs, pour rester dans le lieu du débat ? car il me semble Laurent, que tu es loin d’être le seul à te sentir concerné par cette question de responsabilité et d’anonymat :
La voix, la personnalité, lintimité sont une composante importante du blog. Lintérêt dun blog (à mes yeux) est dentendre le mouvement de la pensée. Pourtant, je suis d’accord avec Karl, lorsque cette parole devient publique, il faut se poser la question de la responsabilité. Sil faut se censurer sur un carnet et céder à la langue de bois, le blog en perd tout intérêt, pour l’auteur comme pour le lecteur.
Doù la tentation décrire sous un pseudo et de trouver des hébergments en sous location qui préservent lanonymat.
Je pense surtout quêtre libre sous une identité fictive, cest navoir gagné quune liberté fictive. Cette liberté là est fantasmatique, elle reste à construire dans le réel.
Un blog est intéressant par la tension quil crée entre ces deux pôles. La nécessité de penser librement loin des contraintes officielles et professionnelles, et leffort dexpression et dargumentation, qui font que cette pensée peut être raisonnablement assumée par lauteur, quil puisse un tant soit peu lincarner, la réaliser, la partager.
Sinon on verse dans un jeu débridé daffirmation de ses humeurs qui est parfaitement vain, y compris en tant quauto-thérapie. Le carnet qui devait être une quête, un espace de flottement et de doute bouillonnant où le sujet trouve une forme de ductilité, devient le lieu dune pseudo-liberté assénée, figée, déréalisante et schizophrénique (“ici je suis chez moi, je fais ce que je veux et je vous dis M….”).
Karl dit : “Jai souvent failli arrêter décrire ici, car mes mots devenaient trop importants, non par leurs valeurs intrinsèques, mais par leurs valeurs données une fois collectivement lus.”
et Laurent ajoute : “Dautant plus que lon a pas le choix de son public, et aussi, que lon peut parfois mal sexprimer. On prête trop aux blogueurs.”
La question de savoir qui lit ou ne lit pas rééellement un blog et de quel crédit ce blog jouit dans le public, est-elle si importante ? Publier en ligne, cest potentiellement être lu par nimporte qui.
Ce qui est important, cest de créer un espace qui admet la convention dune liberté raisonnée, cest à dire une liberté constamment négociée avec soi-même et avec les autres.
Certains carnetiers utilisent un alias sans pour autant barrer laccès au Whos, cest à dire au Nom qui les relie explicitement à la loi et à leur filiation biologique. Il me semble que cest une assez bonne solution pour désigner un “genre”.
Cest juste une façon de distinguer des registres. Cela permet de créer une petite distance, donner du mou à limagination, mais ne pas couper le corps de ce qui fait loi. Autrement, on renonce à exercer une quelconque influence sur le réél et sur la loi. Et ça cest le comble de laliénation!
Steph
Les grands esprits se rencontrent? Isabelle: ce que tu dis résonne à mon sens avec ce que j’écrivais pas plus tard que hier à propos de l’anonymat du blogueur. Je crois que je me trouve en tout point d’accord avec toi.
MGZA
:)
Damien Bonvillain
simplicité de ne pas être influent
Saturnin
Moi, je ne vois pas pourquoi on ne peut pas être à la fois anonyme, intimiste et responsable, comme je viens de m’en expliquer.
Blah ? Touitter !