Journal de bord

vendredi 25 juillet 2014

Bonnes vieilles méthodes

Un influent juge de la Cour d’appel fédérale des États-Unis a déclaré, jeudi, que la troisième exécution par injection létale bâclée en six mois soulignait l’importance d’en revenir aux pelotons d’exécution.

Dans une entrevue accordée jeudi à l’Associated Press, le juge en chef Alex Kozinski, de la Cour d’appel du 9e district, soutient que l’injection létale est une tentative «malhonnête» de dissimuler la nature brutale de la peine de mort.

[…] Selon M. Kozinski, un peloton d’exécution correctement entraîné est une façon «garantie» d’exécuter rapidement un condamné et d’éviter les complications entourant l’injection létale.

S’inscrivant en faux face à une décision rendue lundi pour suspendre l’exécution de Wood, mais qui a par la suite été renversée par la Cour suprême, le juge écrit qu’utiliser des médicaments destinés à traiter des problèmes de santé pour exécuter des condamnés est une «tentative malhabile» de dissimuler la «brutalité des exécutions» en les rendant «sereines et belles».

«Les exécutions sont pourtant brutales, ce sont des événements sauvages, et rien de ce qu’accomplit l’État ne peut cacher cette réalité, et nous ne devrions pas le faire. Si, en tant que société, nous voulons procéder à des exécutions, nous devrions accepter de faire face au fait que l’État commet un acte brutal horrible en notre nom.»

Disant n’avoir jamais aimé l’injection létale, une méthode grevée par des pénuries de substances d’injection et des contestations judiciaires, il affirme que les pelotons d’exécution ne seront jamais à court d’armes ou de balles.

Le magistrat dit être en faveur de la peine capitale, mais affirme que les États et le gouvernement fédéral devraient abandonner l’injection létale et adopter une méthode différente. Selon lui, la guillotine est une autre méthode «garantie», mais il a dit douter que le public accepte cette forme d’exécution.

M. Kozinski est un juge conservateur bien connu pour ses positions bien documentées et souvent provocatrices. Il a été nommé à la Cour d’appel du 9e district en 1985 par Ronald Reagan.

AP.

Je suis assez d’accord. Notamment avec le passage “Si, en tant que société, nous voulons procéder à des exécutions, nous devrions accepter de faire face au fait que l’État commet un acte brutal horrible en notre nom”.

P.S. En V.O., via.

[…] “Using drugs meant for individuals with medical needs to carry out executions is a misguided effort to mask the brutality of executions by making them look serene and beautiful — like something any one of us might experience in our final moments,” U.S. 9th Circuit Court Chief Judge Alex Kozinski wrote in a dissent in the Arizona death penalty case of Joseph Rudolph Wood III.

“But executions are, in fact, brutal, savage events, and nothing the state tries to do can mask that reality. Nor should we. If we as a society want to carry out executions, we should be willing to face the fact that the state is committing a horrendous brutality on our behalf.”

[…] In a telephone interview with the Los Angeles Times before Wood’s execution, Kozinski said he has voted in favor of capital punishment and remains “generally not opposed to the death penalty.” But he said states should scrap lethal injection protocols, which have flooded the federal courts with constitutional challenges.

“I personally think we should go to the guillotine, but shooting is probably the right way to go,” Kozinski said.

The guillotine was quick and “pretty much foolproof,” he said, but probably would not be accepted by the public. A firing squad would be “messy but effective.”

His dissent could be read as much as an indictment of capital punishment as a call for harsher methods, however. […]

In calling for firing squads, Kozinski said, “Eight or 10 large-caliber rifle bullets fired at close range can inflict massive damage, causing instant death every time.”

He said the public should not shield itself “from the reality we are shedding human blood.”

“If we as a society cannot stomach the splatter from an execution carried out by a firing squad, then we shouldn’t be carrying out executions at all.” […]

Devenir adulte

Il y a ceux qui parlent aux étoiles, illuminés en tout genre, capables du pire à seule fin de satisfaire les écritures qu’il vénèrent, et ceux qui parlent des étoiles, illuminés aussi d’ailleurs, mais d’une façon que je savoure quand je les entends nous raconter la vie.

Devenir adulte, c’est apprendre à vivre dans le doute et à développer, au travers des expériences, sa propre philosophie, sa propre morale. Éviter le «prêt-à-penser».

Hubert Reeves, Intimes convictions.

Je préfère la lumière à l’ombre…

Open Time : “Ceux qui parlent aux étoiles”.

Il y en a beaucoup qui restent enfants.

1. Le 30 juillet 2014,
Raveline

“Le secret, dans la vie, c’est qu’il n’y a pas de grandes personnes”.

Blah ? Touitter !

Googliser, verbe

Elle explique s’être toujours sentie fille. Mais à neuf ans, on lui a fait comprendre qu’il valait mieux mettre de côté les robes et les poupées qu’elle aimait tant. C’est à 13 ans, en googlisant « changement de sexe », qu’elle entrevoit son avenir.

Yagg, Xavier Héraud : “La mannequin Andreja Pejic fait son coming-out trans”.

Indicatif présent :

je googlise,
tu googlises,
il googlise,
nous googlisons,
vous googlisez,
ils googlisent
.

Passé simple : je googlisai, nous googlisâmes.

Imparfait : je googlisais, nous googlisions.

Futur simple : je googliserai, nous googliserons.

Passé composé : j’ai googlisé, nous avons googlisé.

Passé antérieur : j’eus googlisé, nous eûmes googlisé.

Conditionnel présent : je googliserais, nous googliserions.

Impératif : googlise, googlisons, googlisez.

Sujonctif présent : que je googlise, que nous googlisions.

Subjonctif imparfait : que je googlisasse, que nous googlisassions.

“Il trouvait normal que tu eusses googlisé son nom.” “Je tâchais de leur trouver la réponse sans qu’ils ne googlisassent à ma place.”

1. Le 25 juillet 2014,
Joachim

Alice ça googlisse ?

2. Le 25 juillet 2014,
Carlos Carmelo de Vasconcelos Motta

Surtout pourquoi en faire un de ces verbes du 3ème groupe (comme le caractérise le participe présent en googlisant du verbe googlir) à la conjugaison si pleine de chausses-trapes, alors que les verbes du 1er groupe sont tellement plus simples d’emploi (ce qui aurait donné : en googlant, du verbe googler) ?

Je suis désolé mais on reconnait là encore une fois une manifestation de cette vanité snob si propre aux Français, de tout compliquer pour faire chier les enfants et les étrangers.

3. Le 26 juillet 2014,
Patrice C.

@ CCVM : googler est l’usage au Québec. Peut-être M.Laferrière, nouvellement élu à l’Académie française, sauvera-t-il la France, les enfants et les étrangers?

4. Le 26 juillet 2014,
Carlos Carmelo de Vasconcelos Motta

@Patrice C. : call me Momo.

Les Québécois ont ce pragmatisme qui fait tant défaut aux Français. En France, il y a deux cimetières à littérateurs. L’Académie française, pour les morts-vivants. La Pléiade de Gallimard pour les tout morts (encore qu’on y trouve aussi des morts-vivants : v. M. Kundera et J. d’Ormesson). Siéger dans la même assemblée que Giscard, Bredin, Decaux, Carrère d’Encausse, Gallo, d’Ormesson, Rouart, etc. : faut pas être trop fier, d’un point de vue littéraire.

Blah ? Touitter !

Tranquille entre-soi littéraire

[…] Lors du Salon du livre de Paris en 2006, consacré aux écrivains francophones, Le Monde des livres m’a sollicité pour écrire un texte sur la littérature québécoise de langue française. J’ai vu dans cette invitation l’occasion de me pencher sur un sujet qui tracasse les écrivains québécois : pourquoi leurs œuvres n’ont pas de succès en France ?

Si j’ai posé la question, c’est que j’avais quelques ébauches de réponse. Il y a une quiétude, une domesticité dans la littérature québécoise qui n’arrivent pas à attirer le lecteur français. Une société tranquille produit une littérature tranquille. De plus, cette littérature ne bénéficie pas de la vague « post-colonialiste » qui a permis aux romanciers indiens et pakistanais, par exemple, de se frayer un joli chemin à Londres et à New York. Enfin, elle est insuffisamment appuyée par son marché premier, chez elle, car l’analphabétisme reste un problème de taille au Québec.

Étais-je naïf ? Une fois l’article paru, je ne m’attendais pas à une telle réaction. Dans le quotidien montréalais Le Devoir, on s’interrogeait : comment un étranger ose-t-il commenter la littérature nationale – qui plus est, un étranger de l’intérieur ? De quel droit et à partir de quelle perspective ? Concernant la question d’un public illettré, pourquoi avoir parlé de cette honte dans Le Monde ?

Le problème n’était pas tant ce que je disais, mais où je le disais – à Paris, dans Le Monde des livres. Ce n’est pas l’endroit où laver notre linge sale. Ça se fait en famille, une famille dont, en plus, tu ne fais même pas partie.

Un chroniqueur à La Presse, le plus grand quotidien montréalais, Marc Cassivi, a bien résumé les choses : « L’erreur de David Homel, (…) plus encore que d’avoir mis le doigt sur certains bobos, c’est d’avoir mal évalué l’importance du complexe d’infériorité de bien des auteurs québécois. Pour cela, il a risqué d’être exclu de la famille. »

Pendant cette polémique, qui dura plusieurs jours, je n’avais qu’un souhait : que tout se termine. Je me sentais comme un matelas dans une maison de passe. Je n’acceptais pas que mes détracteurs mettent en question mon droit à la parole, et soulignent ma non-appartenance au lieu où je vis depuis presque trente-cinq ans.

[…]

Au moment du Salon du livre de Montréal, en 2011, cinq ans après ma « révélation » sur l’analphabétisme, l’hebdomadaire Voir a fait la « une » avec une déclaration-choc : « 49 % des Québécois ne pourront pas lire ce journal. » Voir a été beaucoup plus sévère que moi : j’avais chiffré autour de 25 %. Mais Voir fait partie de la majorité blanche, canadienne-française, catholique. Donc, ses journalistes ont le droit de critiquer. De l’intérieur, pas de l’extérieur.

Le Monde, Christine Rousseau : “17 mars 2006 : David Homel provoque la colère au Québec”.

Via Momo la R’Touiture.

À Paris, ces jours-ci, une quarantaine d’écrivains québécois se retrouvent au Salon du livre, qui célèbre cette année les littératures francophones. Du Québec, on a rêvé l’événement comme une véritable fête. Il faut voir le stand Espace Québec, vaste et généreux de livres, pour saisir combien ont travaillé tous les organisateurs : l’Association nationale des éditeurs de livres, Québec Édition, libraires, dont la Librairie du Québec à Paris, et, bien sûr, critiques et écrivains, tous genres représentés.

Ce qui s’annonçait festif est en train de virer au cauchemar. Pourquoi ? Imaginez-vous que le journal Le Monde, dans son cahier des livres « Spécial Salon du livre 2006 », a cru bon de confier à un écrivain, David Homel, le soin de se prononcer sur le statut actuel de la littérature québécoise, institution, écrivains et écriture amalgamés. On ne sait pas pourquoi le choix de cet écrivain mineur. Ni pourquoi l’excellent quotidien a accepté son texte minable.

Son titre ? « La littérature québécoise n’est pas un produit exportable. » Je n’entrerai pas dans le détail du texte. Il s’agit d’une charge méprisante contre toute notre littérature, et chaque phrase y est fausse, non documentée et mal pensée.

J’accuse Le Monde de s’être fié, pour une analyse qui se voulait générale compte tenu du contexte du Salon du livre, à cet écrivain, à ce petit polémiste au parcours erratique. Jamais Le Monde n’aurait permis une condamnation globale d’une littérature nationale, qu’elle soit belge, antillaise, ivoirienne, maghrébine, libanaise ou n’importe laquelle des autres littératures francophones, toutes invitées d’honneur au Salon du livre de Paris. Jamais ! Et pourquoi le Québec ? On se le demande.

Moi, en tout cas, je demande à toutes les organisations préoccupées par la défense et l’illustration de la littérature québécoise de se regrouper dans un texte commun et de faire circuler une pétition sur Internet à l’attention du journal Le Monde.

[…] Il serait temps que cette histoire littéraire soit connue en France. Il ne faut donc pas confier ce travail à un inculte. Il est temps que la littérature québécoise soit accueillie partout sur la planète, à commencer par la France. Sinon, sans cette reconnaissance de l’extérieur, elle étouffera. Le temps de l’ignorance et du mépris est terminé. Il faut le dire et le répéter.

Le Devoir, Madeleine Gagnon, membre de l’Académie des lettres du Québec et de l’Union des écrivains québécois, 22 mars 2006 : “À la défense de la littérature québécoise”.

1. Le 25 juillet 2014,
Carlos Carmelo de Vasconcelos Motta

En même temps c’est pas évident de citer le nom d’un écrivain québecois contemporain comme ça au débotté sans réfléchir… Maria Chapdelaine ?

2. Le 25 juillet 2014,
karl, La Grange

@Carlos

  • Michel Tremblay
  • Mordecai Richler

Cependant, ce n’est déjà plus très contemporain, ce sont des classiques du XXe siècle.

Mais cela n’enlève rien à l’article initial. Il est vrai que l’échange littéraire entre le Québec et la France a une forte dissymétrie en faveur de la France. La littérature québécoise s’exporte mal. Le complexe d’infériorité québécois est aussi fort que n’est le complexe de supériorité français. C’est peut-être le manque dans son article.

Mais la société québécoise est « relativement » protégée comparée à de nombreuses autres sociétés dans le Monde où l’écriture de combats est un moyen d’expression. Quand un pays a de très forts enjeux de misères, de débats sociaux, etc, la littérature trouve un chemin.

En faisant une grossière caricature, lire à propos du truck Chevy et de la soirée hot-dog avec sa Molson après un match des Canadiens à Ville Saint-Laurent, cela rend peut-être difficile l’expression. Et pourtant, il y a de nombreux sujets à traiter dans la société québécoise.

3. Le 26 juillet 2014,
Carlos Carmelo de Vasconcelos Motta

@Karl : call me Momo.

Merci pour les références. Peut être des titres à conseiller ? En France, la misère sociale et morale n’est pas négligeable, mais elle n’inspire personne. Je ne pense pas qu’il soit injuste de constater que ce pays (un peu fatigué, ça ira mieux plus tard) ne produit plus de bonne littérature depuis pas mal de temps, grosso modo depuis le Journal d’un voleur. J’espère que les Québécois ne se laissent pas impressionner, quand même (Dites leur que ce que Le Monde des livres raconte, personne ne le prend vraiment au sérieux. Le Monde des livres cultive avec une constance remarquable sa réputation de plus mauvais supplément littéraire de la presse écrite française).

Blah ? Touitter !