Journal de bord

mercredi 19 août 2015

Kįrrįnn o’lįč-įnn

Martín Gusinde, 1923

Martín Gusinde (1886-1969), originaire de Silésie, ordonné prêtre en 1911, souhaitait devenir missionnaire en Nouvelle-Guinée à la découverte de tribus exotiques, mais il est envoyé par ses supérieurs dans une école allemande de Santiago. C’est là qu’il découvre que le Chili a aussi ses peuplades sauvages, sur la Terre de Feu. Il va a leur rencontre de fin 1918 à 1924 et en ramène des témoignages photographiques. La Terre de Feu était celle des Selk’nams, peuple de chasseurs-cueilleurs semi-nomades. Vers 1880, des propriétaires d’estancias ont commencé à coloniser leurs terres ; la résistance des Selk’nams entraînera un génocide. Armés seulement d’arcs et de couteaux, il ne pouvaient lutter contre des milices dotées d’armes à feu. Famine et maladie aidant, leur population passa de 4000 en 1880 à quelques centaines de réfugiés autour de missions salésiennes en 1910. On se rappellera de l’ingénieur juif roumain Julius Popper (1857-1893), chasseur d’or sanguinaire, qui se voulait le moderne conquistador de la Terre de Feu, et qui organisa des parties de chasse au sauvage qui tenaient du pogrom, donnant des primes à qui rapporterait des oreilles ou des têtes de Selk’nams.

L’un des tout derniers des Selk’nams était une femme, née vers 1900, Ángela Loij ; elle est morte en 1974 et le langage de son peuple s’éteindra en 2014 avec son dernier locuteur, qui ne connaissait plus que quelques mots, une métisse de mère ona née dans à l’estancia Viamonte, Herminia Vera. Certains essaient toutefois de préserver la mémoire de la langue.

Selk’nam voudrait dire “égaux et séparés”.

Les photos de Gusinde sont souvent des reconstitutions, les nomades réfugiés dans des baraquements autour des missions se prêtant à recréer les scènes, costumes et rites de leur vie passée. Environ 1200 images ont été conservées, pour l’essentiel à l’institut Anthropos, et font l’objet d’un premier beau livre édité chez Xavier Barral.

En 1926, Gusinde obtient un doctorat d’anthropologie à Vienne et partira étudier les Pygmées du Congo. Un musée lui est dédié à Puerto Williams sur l’île Navarino.

L'esprit des hommes de la Terre de Feu, Selk'nam, Yamana, Kawésqar

Martín Gusinde, 1923

Martín Gusinde, 1923

Martín Gusinde, 1923

(Ángela Loij, denière des Selk’nams, figure au centre de cette photographie de 1923.)
1. Le 19 août 2015,
zelda

Vu sur le sujet une super expo photo aux rencontres de la photo d’Arles cette année. Je ne savais pas que c’étaient des reconstitutions, par contre.(pas lu tous les cartons non plus…-écrits tout petit, c’est pénible à nos âges…). Je recommande de venir voir les tirages, de beaux noirs et blanc, vraiment mieux que sur un écran (m’ont fait penser à “Dead man”). Merci pour ce complément d’informations, en plus je comptais retourner voir l’expo.

2. Le 20 août 2015,
lolosquared

Dieu sait si on se fait souvent chier à Arles, aux rencontres photographiques. Rien que cette expo, ça vaut le prix du billet (29 euros). Les photos sont bouleversantes et d’une incroyable qualité. Chapeau bas.

3. Le 20 août 2015,
boronali

Beau et poignant.

A quand le jour où un ‘étranger’ posera le même regard sur l’agonisante humanité ?

Allez, bientôt la quille (vu l’accumulation des désastres ‘faits maison’) !

4. Le 22 août 2015,
Cheese-eating surrender monkey

On a un peu l’impression que la dernière photo c’est juste pour donner le change.

Blah ? Touitter !