Vie privée, vie publique
Une nouvelle fois, il l’a appris par la presse. Leur rupture, qu’il ne songeait pas à annoncer, elle a choisi de la livrer à deux journalistes de l’AFP qui mettaient la dernière main à leur ouvrage, Ségolène Royal, les coulisses d’une défaite (L’Archipel). […] C’est donc par les agenciers, qui le joignent pour vérifier auprès de lui la nouvelle, qu’il apprend sa décision de rendre publique leur séparation.
[…] Sur France-Inter, lundi 18 juin, dans un entretien qui accompagne la sortie du livre, Ségolène Royal use des mêmes mots que ceux d’un président de la République signifiant sa démission à son premier ministre : “J’ai proposé à François Hollande de vivre sa vie de son côté, et il l’a accepté.” Dans le livre, les termes qu’elle emploie sont plus crus. “J’ai demandé à François Hollande de quitter le domicile, de vivre son histoire sentimentale de son côté”, suggérant ainsi volontairement qu’une infidélité a été commise.
[…] Jamais l’histoire française, pourtant imaginative, n’a connu un tel scénario. Jamais vies politiques n’ont été soumises aussi visiblement à de tels tourments privés, bousculant les certitudes journalistiques, les pudeurs partisanes, les engouements militants.
[…] Il est vrai que, depuis son investiture, elle ne lui a rien épargné. Elle a d’abord choisi pour porte-parole Arnaud Montebourg, un beau parleur […], mais aussi l’un des plus vifs adversaires du premier secrétaire. Les proches de François Hollande s’en sont offusqués. Ils n’avaient pas tort. Le 17 janvier, le député de Saône-et-Loire est l’invité de Canal+. “Quel est le plus gros défaut de la candidate ?”, lui demande-t-on. Le porte-parole réfléchit quelques secondes : “Ségolène Royal n’a qu’un seul défaut : son compagnon.” Montebourg ne fait que répéter tout haut ce qu’on murmure, toute la journée, au 282 boulevard Saint-Germain, siège de campagne de la candidate.
[…] Dès que l’occasion s’en présente, les proches les pressent de lever les doutes persistants. Dans un livre d’entretiens, Maintenant (Hachette littératures), la candidate affirme : “Oui, nous sommes toujours ensemble et oui, nous vivons toujours ensemble.”
[Le Monde, Raphaëlle Bacqué et Ariane Chemin : “Royal-Hollande Vie privée, vie publique”.]
Sur l’impact politique de cette révélation, on peut trouver à redire sur tout. C’est une information qui n’est pas banale, vu les positions politiques des deux protagonistes au sein du camp socialiste. Qu’ils marchent main dans la main ou pas, cela change quelque chose ! Couvrir cela du manteau de la “vie privée” est abusif. Le timing de la révélation est également très contestable, car cela fait longtemps que tout ceux qui gravitent dans ce milieu savent que le lien sentimental est rompu. Dès 2006, il n’y avait déjà plus rien entre François Hollande et Ségolène Royal. Cette dernière a quand même préféré conserver la fiction du couple uni, parce que cela servait ses intérêts politiques. Et dès la séquence électorale terminée, on annonce que le couple est brisé, que c’est fini, sans délai de décence ni de carence. Le pauvre François est viré sans préavis, prié d’aller vivre sa vie ailleurs. Il est vrai que ce compagnon étant devenu une gêne plus qu’un atout pour Ségolène Royal, elle s’en débarasse comme d’une vieille serviette. Plutôt brutal comme annonce de rupture. La crédibilité de Ségolène Royal est à mesurer à l’aune de ses déclarations pendant la campagne électorale sur la solidité de son couple !
[Authueil : “La séparation Hollande-Royal”.]
Un mot sur la rupture de Ségolène Royal et François Hollande ?
Je ne suis pas l’amant du dévoilement de la vie sentimentale. Mais si l’on estime que celle-ci a influencé la question politique, elle présente un intérêt pour le débat public et peut être révélée. En particulier lorsqu’elle fait l’objet d’opérations de communication.
Bref, je ne félicite pas les journalistes qui ont tu cette affaire alors qu’ils entendaient Ségolène Royal répondre à des questions sur la nature des relations politiques du couple en cas de victoire.
On ne sait d’ailleurs de quand date la rupture, mais il ne me désintéresse pas de savoir si la candidate a menti aux électeurs sur ce point.
[Diner’s Room : “Élections générales : rapides observations”.]
La réaction des médias français face à cette information a été… un black-out total. À en croire le bouquin de Bacqué et Chemin, la rupture date de plusieurs mois, pleut être plus d’un an. À en croire l’absence totale de surprise manifestée par les commentateurs, tout le monde était au courant depuis un moment. Ce matin, un des premiers liens de Google news pointait vers cet article du Corriere della Sera, aimablement relayé par Courrier International qui avoue candidement que ce n’était un secret pour personne. Et pourtant, personne n’a rien dit. Certains médias ont même continué à entretenir la fable de cette relation de couple alors qu’il est maintenant établi qu’ils savaient que c’était faux.
[…] Que nous disent nos médias sur cet incroyable black-out de plusieurs mois ? Rien. Ils ne le reconnaissent pas, n’en parlent pas, donc ne le critiquent pas. La blogosphère sent instinctivement que quelque chose ne va pas. Jules laisse ainsi paraître son agacement envers la désinvolture de nos journalistes. Car on a envie de comprendre. Comprendre ce qui s’est passé, comprendre par quel mécanisme l’ensemble des médias français a pu s’accorder à taire cette information.
Serait-ce par élégance ? L’ensemble des journalistes de France considérant que leur honneur leur interdisait d’étaler cette fange ? On aimerait s’en convaincre. Il ne manque (mal)heureusement pas en France de publications que n’étouffe pas le mauvais goût.
[…] Alors quoi ? Panurgisme ? Timidité ? Il y a aussi une dernière explication qui m’est venue à l’esprit en lisant la défense par Guy Birenbaum de l’anonymat du blogueur “François Mitterrand”. […] Il transparaît assez clairement que Birenbaum éprouve infiniment plus de plaisir à savoir qu’à révéler. En fait, ce n’est pas seulement savoir, c’est savoir tout en sachant que les autres ne savent pas. Et crier à la face du monde que lui sait ce que personne d’autre ne sait, voilà quelque chose dont il ne peut s’empêcher.
Alors, faut-il voir dans le mutisme généralisé de ceux dont la mission est d’informer ce plaisir narcissique, ce sentiment d’appartenance à une élite ?
[Koztoujours : “Le secret le mieux gardé de France”.]
Là, sitôt sa souffrance étalée comme de la confiture collante sur la tartine médiatique de la soirée électorale, nous avons aussitôt l’air d’imbéciles, tous autant que nous sommes, sur tous les plateaux et ce matin dans toute la presse et surtout à la une du “Monde” ce midi, dans le titre et le dessin de Plantu. Bien sûr, juste après, devant le tollé, suivant un scénario devenu classique arrive le “non, non, ce n’est pas moi qui ai voulu ça, on a fait exprès de mal comprendre, j’avais décidé d’en parlé à sept heures du matin et pas le soir à 23 heures” et ainsi de suite sur le mode victimaire bien connu. La semaine dernière c’était le même cirque avec le coup de téléphone à Bayrou et ainsi de suite pendant toute la campagne présidentielle. Questions: que devient la plainte contre les journalistes qui avaient soit disant “violé” sa vie privée en racontant déjà tout les tenants et aboutissants de cette histoire banale de couple? Et que faut-il penser de cette nouvelle forme de féminisme que l’on qualifierait de goujaterie nauséabonde si un homme la pratiquait à l’égard de sa compagne ? Que faut-il penser de cette façon de proclamer sans cesse vouloir “protéger “ma” famille” et “mes” enfants (l’homme étant là dedans l’accessoire que le pronom possessif exclut sans autre forme de respect) quand on étale sans cesse les avatars de sa vie privée la plus intime ? De toute façon les vedettes du Ségo-tour médiatique ont ausitôt re-déployé les moulins à prières qui fondent leur importance à proportion de l’espace médiatique que le cirque peut occuper. Attention, je risque le procès. Car pour avoir désigné ces personnes sans les nommer en les traitant de “groupies”, Daniel carton, un ancien journaliste du “Monde” a eu droit à une plainte en justice de la part des personnes concernées. Bref la pipolisation de la politique est toujours un naufrage pour les personnalités politiques, pour leurs idées comme pour les médias et les journalistes qui s’y abandonnent.
[Jean-Luc Mélenchon : “Le jour d’après”.]
François Hollande, ainsi, est le plus récent ajout à la série [des hommes politiques entretenant une relation intime avec une journaliste]. Les mauvaises langues l’avaient longtemps associé à une députée parisienne, mais le voici désormais apparié à la journaliste de Paris-Match couvrant l’actualité du PS. Il faut dire qu’il n’est pas le seul à avoir trouvé l’amour à la rubrique politique, Nicolas Sarkozy himself s’étant consolé du départ temporaire de son épouse auprès de la spécialiste de l’UMP du Figaro.
[…] On mesurera la profondeur du gap culturel entre le reporter US, qui considère que la prise de distance avec son sujet est consubstantielle à l’exercice de son métier, et l’atmosphère sympathique et informelle dans laquelle ses confrères français évoluent : on mange ensemble, on boit ensemble, on couche ensemble, même, mais n’allez pas y voir le moindre danger, la moindre possibilité d’une limitation de notre indépendance ! On imagine assez bien, d’ailleurs, la manière dont l’amie de cœur du Premier secrétaire du Parti socialiste s’est intéressée aux dessous de la campagne présidentielle ― son point de vue sur Ségolène étant nécessairement dépassionné…
[Commentaires et Vaticinations : “Sexe, journalisme et politique : la déontologie dans le boudoir”.]
MC
[Insulte censurée :-)]
Bob
Heu sinon ça serait bien de proposer votre propre opinion, non ?
Laurent
Si vous étiez un lecteur fidèle, vous l’auriez déjà lu ici, entre autres.
Bob
Le lecteur en question a bien évidement lu ce billet, mais ne constate ici qu’un agrégat de citations sans précisions. Un rappel du-dit billet ou un ajout de trackbacks aurait été plus élégant.
Laurent
Je vous remercie de vos leçons d’élegance.
Jean
Vrai que ça commence à bien faire toutes ces histoires de couples du PS qui font perdre les élections. Il y a peut-être un solution : La Bombe Gay. Peut-être en reste-il quelques bouteilles aerosol à racheter pour pas cher aux surplus de l’armée US ? Ça pourrait servir en 2012.
Eolas
@ Laurent : Un lecteur fidèle serait hors sujet.
Lancelot
@ Jean > j’hallucine comment Libé copie mon blog. J’ai été l’un des premiers (seuls) à parler de la Gay Bomb …
Yves
Excellent dessin de Chapatte sur la séparation de SR et FH : http://fr.news.yahoo.com/070619/340/5m349.html
Jean
@ Lancelot
Au moins Libé te lit :-)
Pour en revenir aux extraits de blogs que j’ai survolé d’un œil distrait, c’est Marianne et non Ségolène qui a vendu la mêche.
Briscard
“On mesurera la profondeur du gap culturel entre le reporter US, qui considère que la prise de distance avec son sujet est consubstantielle à l’exercice de son métier”.
Où l’on mesurera surtout la plus totale méconnaissance du monde du journalisme anglo saxon, témoignage navrant d’une croyance naïve (?) en l’indépendance de la presse américaine, croyance d’autant plus étrange qu’elle émane d’un journaliste…
Franchement, avant qu’elles ne soient dévoilées pour de solides raisons mercantiles, croyez-vous sérieusement que les frasques de Clinton aient été ignorées de l’élite plumitive et télévisuelle washingtonniène?… Et que nul “reporter” ne sait que G. Bush est “consubstantiellement” bête? Allons, allons, là-bas comme ici, le mensonge, la dissimulation et le cirage de pompes règnent chez les journaputes de tous bords. Et pour un Michael Moore ou un Pierre Carles , combien de… oh, et puis non,pas de noms: journapute c’est un peu une insulte, quand même, un peu …
Mais les clichés ont la vie dure: les “reporters” US, machoires carrées, Leica sur le ventre, et Nagra dans la poche, traquent la vérité en battle dress, tandis que leurs confrères français boivent de l’absinthe en compagnie de grisettes aux Ministères…
Enfin, c’est pas du temps de Giscard qu’on aurait vu toutes ces turpitudes étalées…
Dagrouik
@Lancelot : moi aussi j’ai lu ça, cela permet de relativiser certaines choses non ? qu’en pense tu ?
Vicnent
Overdose !
Ce qui commence à me faire mal au cul, c’est que finalement, le type sympa que tu es ne fait plus de son blog (blog du podium français…) qu’un immense fourre tout de 100% copier collé.
Tu vas nous pondre de temps en temps un article de ton cru ? Sur ce que tu aimes, ce que tu ressens, ce qui te faire hurler, de joie ou d’écoeurement ? Avec des arguments si possible, pas qu’avec des sources…
À ce train là, tu devrais être le premier blogueur aux 100 000 articles copié collé.
La grande classe.
Le capitaine, un OPML à lui tout seul ?
Laurent
Réclamations de lecteurs -> direction poubelle.
Dagrouik
@Vincent : attention, Poser les bonnes questions attire le debilotron :o)
MC
@Vicnent : C’est parce que je lui disais cela dans mon commentaire qu’il m’a censuré.
MamboJoel
Les mensonges sont manifestes mais ce qui est surprenant -en fait tellement révélateur de l’abandon du jugement propre qu’implique le militantisme- c’est qu’au fond le ressentiment bien humain que devraient avoir les militants PS envers ces deux acteurs de leur défaite n’atteint pas leur soutien à cette famille, ce qu’il en reste et surtout Ségolène Royal.
Pour ma part, je me sens un peu floué qu’une élection de la Vème République ait pu être biaisée par un tel phénomène, un tel personnage. un hold up démocratique en quelque sorte…
Laurent
@MamboJoel : “L’abandon du jugement propre qu’implique le militantisme”, c’est fort juste. Nous en avons de vivants exemples dans ce fil de commentaires, ils se reconnaîtront aisément…
Bob
@Lancelot : pas le premier ni le seul http://www.yazerty.net/page/3 ;)
MB
Bordel de merde ! Ma journée est gâchée : je suis d’accord avec Jean-Luc Mélenchon.
Celui
Coup de gueule : vous ne pouvez pas choisir des pseudos originaux ? En moins de 24H il y a eu un MC, un MB et un MQ.
MB
@ celui : courage, votre calvaire va bientôt finir. Il ne reste plus que MA, MD, ME, MF, MG, MH, MI, MJ, MK, ML, MM, MN, MO, MP, MR, MS, MT, MU, MV, MW, MX, MY et MZ.
Pouvez-vous me proposer un pseudo vu que je suis particulièrement peu imaginatif en la matière ?
Emmanuel
Bonjour. Le coté promotionnel évidemment. Mais moi j’explique plutot cette info étrange par une réaction de gamin surpris la main de la sac, de la part des journalistes.
A suivre sur www.elleestoulinfo.com
Marie
Bonjour, Je vais intervenir sans lien avec ce qui a été dit avant et je vous prie de m’en excuser. Il s’agit pour moi de vous faire découvrir un site récemment apparu sur lequel est présenté un photographe dont les portraits de dos m’émeuvent tant que je veux le dire à tout le monde. Allez voir sur http://philippemoraly.free.fr Une internaute.
Gasper
bonne note. belles envolées. Efficace dans sa longueur (2 paragraphes de moins et on tombait pas d’accord ;-)
auxi
Vachement intéressant ! Et d’une portée planétaire, pas moins ! Quand on pense à tous ces gauchos-bobos-etc. qui perdent leur temps en fariboles, du genre précarité, chômdu, sarko-fascisation de moins en moins rampante des esprits, SDF et saccage de la protection sociale, on en perd son latin, franchement ! L’adultère banalement bourgeois et les histoires de cul de Flamby-Ségo, principale préoccupation dans les files d’attente de l’Anpe ! Vivement que le PS crève, qu’on puisse enfin passer aux choses sérieuses, enfin débarrassés des socialos-collabos. (Je renifle comme une odeur de censure…)
anna
Pour avoir consulté le site http://philippemoraly.free.fr/ conseillé par Marie et présentant quelques photographies (trop peu) de Philippe Moraly, je peux dire aussi que ces images, ces portraits d’anonymes, de passants, vus de dos sous des abribus, sont singuliers, touchants, drôles. Ces photos datent des années 80 mais apparaissent hors du temps, ou plutôt, dans le temps propre à ces individus pris à leur insu… d’autant plus « là » qu’ils ne savent toujours pas qu’ils ont atterri tout en couleurs encore chaudes sur un site internet 20 ans après. Les polaroïds « retravaillés » confirment l’univers troublant de l’auteur. Les titres, subtiles et décalés sont indissociables des images. J’espère que l’ensemble de son œuvre sera bientôt visible dans une exposition ou un livre.
Blah ?