Journal de bord

vendredi 23 décembre 2005

Sarko-show

Libération : Est-ce que vous n’avez pas parfois honte de votre manière de réagir aux événements sans aucun recul, et parfois sans beaucoup de réflexion ?

Nicolas Sarkozy : Est-ce une question ou une déclaration militante ? Venant d’un journal dont le manque de recul est une caractéristique, je pourrais prendre votre question comme un hommage ! Pour le reste, je suis un républicain scrupuleux, sans doute moins sectaire que vous.

Libération : Vous êtes ministre, pas journaliste…

Nicolas Sarkozy : Le fait d’être ministre ne vous disqualifie pas en tant qu’être humain. Comment pouvez-vous dire une chose aussi outrancière ?

[…] Nicolas Sarkozy : Votre comportement est un comportement d’ayatollah. Je parle de cette pensée unique qui conduit un certain nombre de gens à l’exaspération. Mais le débat, ce n’est pas cela. Vous, vous pouvez vous complaire dans des alliances avec le Parti communiste, avec l’extrême gauche, donner la parole à tous les extrémistes de la création. Ça, c’est bien, puisque c’est la pensée unique ! On ne peut plus rien dire dans notre pays sans qu’immédiatement on soit accusé d’arrière-pensées nauséabondes ! C’est la pensée unique qui est intolérable. Et je pense que c’est vous qui êtes coupés des réalités et de l’aspiration des gens. En interdisant aux républicains de parler librement, vous faites en vérité le lit du Front national.

Libération : On ne vous interdit pas de parler, vous avez sans arrêt la parole…

Nicolas Sarkozy : Vous êtes sectaires ! C’est d’ailleurs une partie de vos problèmes que ce décalage total entre le côté systématique de votre pensée et l’aspiration du plus grand nombre. Si j’ai des bons sondages, si les gens se reconnaissent dans la façon dont j’ai géré les banlieues, ce serait donc parce que le peuple est stupide ? Vous, vous avez toujours raison et c’est le peuple qui se trompe ? C’est formidable : ou bien les Français ne me suivent pas, et dans ce cas-là j’ai tort, ou bien ils me suivent, et dans ce cas-là ce sont les Français qui ont tort. Mais vous, vous avez toujours raison. C’est exceptionnel ! Vous ne doutez donc jamais ?

[…] Libération : Vous parlez de Lilian Thuram ?

Nicolas Sarkozy : Non, de vous, Libération ! Quant à Thuram, je le plains de pouvoir être si caricatural. C’est un grand footballeur, ce n’est pas encore un maître à penser… Est-ce que vous n’êtes pas troublés que ces véhémentes dénonciations du FN n’ont abouti qu’à une seule chose : à enfler le phénomène du FN ? Est-ce que vous n’êtes pas troublés que la pensée unique dont vous êtes vous, comme d’autres, les porteurs, n’a conduit qu’à pousser à la désespérance un certain nombre de gens qui n’ont rien à voir avec le FN ? Est-ce que vous expliquez comment l’extrême droite a pu passer de 3 % au début des années 80 à 25 % sous François Mitterrand ? Est-ce que vous ne pensez pas qu’il convient que, les uns et les autres, on se remette en question dans notre façon de parler, de faire de la politique et de répondre aux angoisses des gens ? Ces questions, est-ce que vous ne vous les posez pas ? Est-ce que vous ne pensez pas, vous, qui perdez des lecteurs, qu’il y a un décalage entre la réalité et ce que vous écrivez ?

[Libération : Nicolas Sarkozy, entretien avec Thomas Lebègue, Dominique Simonnot et Patricia Tourancheau.]

1. Le 23 décembre 2005,
Draky

Entre rire ou pleurer, je choisis… de voter :)

2. Le 23 décembre 2005,
Hoedic

Diantre… l’entretien avec Loïc sera-t-il aussi endiablé ? :)

3. Le 23 décembre 2005,
Oli

C’est dommage que les interviews n’aient pas plus souvent cette allure. Ça change des “cet article a été relu et amendé par les services de Matignon” si fréquents dans Le Monde dès qu’un ministre parle. A quand ce genre d’interview franche et directe à la télé?

4. Le 23 décembre 2005,
dr Dave

Moi, ce qui me fait le plus mal à l’arrière-train dans cet article (outre le niveau assez pathétique de l’interview), c’est que je me découvre à opiner du chef à certains des arguments avancés par Iznogoud.

Qu’on s’entende bien: le personnage me débecte toujours autant pas ses méthodes que par une bonne partie du contenu de son programme… Mais de toutes les réflexions que je me fais sur la scène médiatico-politique française, celle de voir tout discours qui sort du supra-politiquement-correct invariablement rapporté aux extrêmes cela sous prétexte de “ne pas se compromettre”… L’impossibilité absolue de faire mention d’une frange entière de problèmes socio-économiques en des termes neutres sous peine d’être immédiatement étiqueté fascisant tendance mangeur d’enfant… C’est une des choses qui m’a le plus sauté au visage depuis quelques semaines…

Et ça m’énerve doublement que ça me fasse une opinion commune avec Nabot 1er.

Blah ? Touitter !

Rumeurs

Opera dément avoir été racheté par Microsoft. Dommage, avec Opera relooké IE7, Microsoft allait enfin avoir un bon successeur d’Internet Explorer.

Notes sur Loïc-Sarko

En général : L’objet vidéo qui nous est présenté a le cul entre deux chaises, ni vraiment pro, ni vraiment amateur.

Le fond : Pas mal, c’est du Sarko, un grand talent de la politique et de la communication, un Sarko qui vient de réussir à se faire prendre les pieds dans le tapis aux journalistes bien mal inspirés de Libération. Loïc semble à l’aise malgré les circonstances. Il a sa place de secrétaire d’État dans le premier gouvernement Sarko… ;-)

Technique : Les trois (!) caméras n’ont pas la même balance des blancs (et quand on connaît les extraordinaires possibilités d’étalonnage d’un Final Cut Pro 5 pour rattraper ça, c’est inexcusable…). Zooms inutiles et hésitants. Le montage, haché et à contre-temps, est mauvais. Ça ne fait pas vraiment pro, malgré la débauche de matériel. Heureusement, le son est correct et c’est là l’essentiel.

La question : Heu, baronne, ça se fait de serrer la main d’un huissier en gants blancs ?

Le détail : Virgin offre 10 euros de téléchargement aux députés, scandale. Loïc offre un I-Pod à Sarko (sur quel budget ?), personne ne réagit.

Creative Commons : ça ne veut rien dire si on ne précise pas la licence.

Franchement, j’aurai préféré un vrai “podcast” avec son Nokia. Plus de proximité, plus de chaleur, plus “podcast” quoi.

1. Le 24 décembre 2005,
¥€$

Tu veux sans doute parler de mon Nokia ?

2. Le 24 décembre 2005,
Remi Stranx

humm.. c’est sur qu’à l’heure de la convergence “tout numérique”, flatter le chef des polices doit provoquer un frisson certain en bas de l’échine (et j’aurais pas fait le malin à la place de Mr Le Meur). Ca pourrait à la limite excuser la déférence mielleuse et le cadeau en nature… Non, le truc c’est que j’ai jamais aimé les interview de Karl Zero, qui laisse penser que le tutoiement pousse à la confidence. Chez des athlétes politiques aussi experimentés que Mr Sarkozy, ça doit bien peu opérer. En revanche, ce tutoiement prive les interlocuteur de formules salutaires, du type “mais je vous emmerde !”, qui permettent avec le sourire, et un véritable respect de l’autre, d’évoluer en bonne intelligence.

3. Le 24 décembre 2005,
pauvresse de la technologie

sur les cadeaux je proteste énergiquement j’aimerai bien voir toutes les célébrités invitées dans les émissions tv refuser et déclarer qu’elles ont les moyens de s’offrir un bouquin à 150 euros ou un CD, voir un signe en faveur des démunis.

4. Le 24 décembre 2005,
torpedo

Sinon y’a ça aussi, ça serait dommage de passer à côté :

http://www.memoire-vive.org/archives/000886.php

Blah ? Touitter !

La déculotée

Entretien musclé, le terme est faible : c’est plutôt une énorme claque dans la gueule que Libé se fait à lui-même. La valeur médiatique de Sarko est-elle si forte qu’il faut triompher lorsqu’on a obtenu un entretien avec le Ministre de l’intérieur ? Et malgré cela, quelle idée de publier cette espèce de déroute en rase campagne où trois journalistes nullissimes, s’imaginant pointer les “amalgames”, sont réduits à lui servir la soupe et à compter les coups que Sarko leur colle à la gueule, sans être capables un instant de sortir de la posture morale vaine dans laquelle il a réussi à les coincer ! [Radical Chic : “La déculottée”.]

On ne saurait mieux dire. J’ai cependant un peu de pitié, les journalistes de Libération, nous n’en parlerons plus dans trois mois, après le dépôt de bilan…

1. Le 24 décembre 2005,
Morgan

Hier soir, en écoutant la fameux Podcast du Ministre de l’Intérieur, je me demandais qui, des journalistes de Libé ou de Loïc, a le plus servi la soupe à Nicolas Sarkozy. Notons toutefois que ce dernier n’est pas non plus particulièrement bon dans les deux exercices : il sert des arguments d’une généralité et démagogie incroyable (“les autres hommes politiques ne sont pas toujours compréhensibles, moi je le suis”, le soi-disant coup de pub que se font Jamel and co sur le dos des banlieues, etc.). Si les différents medias restent de ce niveau dans les mois à venir, nous sommes mal…

2. Le 24 décembre 2005,
Daniel Glazman

Déculottée, le mot est faible… Non seulement les trois se sont mis totalement minables, mais chaque nouvelle question les enfonçait plus encore. A la place de Sarkozy, je me serais fendu d’une très belle bafouille à Serge July pour remercier de l’interview. Bon, certes, ça n’arrange pas les finances de Libé mais on ne va pas tirer sur un corbillard hein ?-)

Côté presse écrite, décidément, personne n’a retenu la leçon de Rousselet virant son dessinateur d’Info-Matin. Ni July, ni Dassault et surtout pas Colombani. Marrant comme l’histoire de l’incompétence directoriale (sur la même racine, j’aurais pu choisir ’dirigiste’) est un éternel recommencement…

Mes amitiés à la dinde, mes meilleurs souvenirs aux foie gras.

3. Le 27 décembre 2005,
Stef

Bonjour bonjour

«A la place de Sarkozy, je me serais fendu d’une très belle bafouille à Serge July pour remercier de l’interview.» Pas besoin il bouffe surement avec…

Je me permets de vous citer, M. D.Glazman, pour introduire ce petit lien (les blogs francais en ont peut être déjà fait écho, ne lisant pas tout…désolé si cela fait redondant)

source: http://www.cequilfautdetruire.org/

Cordialement.

Merci pour l’espace Ô mon capitaine

Blah ? Touitter !