Le niveau baisse
Quelques exemples parmi d’autres : 87 % des élèves savaient à l’époque [1987] conjuguer le verbe tomber, ils ne sont que 63 % aujourd’hui. Quant à la conjugaison du verbe voir, le taux de réussite passent de 61 % à 44 %.
Pour enfoncer le clou sur cette baisse de niveau, l’association Sauvez les lettres a réalisé à la rentrée une dictée pour les élèves de seconde. Cette association de professeurs de lettres milite pour un retour à un enseignement plus traditionnel de la grammaire et de l’orthographe. Les enseignants ont soumis à un échantillon représentatif de 1 348 élèves de seconde une dictée d’une vingtaine de lignes. Conclusion : deux tiers des élèves ont eu zéro et à peine 14 % s’en tirent avec la moyenne ! Le barème était de deux points pour une faute de grammaire et un point pour une faute sur un mot.
[Le Figaro, Aude Sérès : “Zéro en dictée pour deux lycéens sur trois”.]
Christophe D.
Quelques remarques en vrac :
• Bienvenue à la génération « digital native », celle qui, parait-il va se jeter sur les sites d’info dans les prochaines années ;-)
• À quand une dictée à 20 ans d’intervalle chez les enseignants ?… juste pour voir ?
• La langue française est l’une de celles où l’on fait, de toute façon, le plus de fautes d’orthographe (moi en premier). Content de voir que les académiciens aussi se penchent sur le sujet, ce n’est pas trop tôt. Conserver une orthographe liée à sa culture historique, c’est intéressant, mais avoir une orthographe rationnelle, qui prennent en compte les usages et les conditions d’enseignement, ce n’est pas mal non plus. Une écriture un peu plus proche de la phonétique prendrait beaucoup moins de temps à être assimilée correctement.
• Un constat : ce sont les enfants socialement défavorisés qui écrivent le plus mal. Voila qui ne peut qu’apporter du grain à moudre aux histoires de soutien scolaire de Xavier Darcos, qui n’est pas mon ami.
• Grâce à internet, les enfants lisent et écrivent sans doute beaucoup plus aujourd’hui qu’en 1987. Ce n’est peut être pas très fun d’un point de vue strictement orthographique mais je pense que c’est très bien sur le plan de la Littératie, concept dont on parle trop peu dans les institutions et qui pour moi est fondamental pour l’avenir de ces enfants qui ne grandiront définitivement pas dans le même contexte que leurs ainés.
Christophe D.
Une précision concernant mon 3e point : notre écriture est essentiellement basée sur l’étymologie greco-latine. Hors, contrairement aux temps passés, les élèves n’apprennent quasiment plus ces langues (et à mon avis, ils ont bien raison de se concentrer sur l’anglais ou d’autres langues vivantes, car le monde moderne le nécessite). Il serait donc bon de lâcher du leste sur certaines (voire un gros paquet) de nos complexités orthographiques. N’oublions pas qu’avant d’être partie intégrante de notre culture, l’écriture est un outil (qui sert à transcrire la pensée), qui se doit par conséquent d’être le plus fonctionnel possible.
Gilles
Donc on écrit en SMS ?
eustazio
Ca reviendrait a dire que les SMS sont fonctionnels. personnellement j’ai du mal a y croire.
Ce qui est fascinant avec l’orthographe et que tout le monde samble oublier, avec une allegresse qui n’a d’egale que la puissance de leur cris de jouvencelle (oui bon je voulais ecrire jouvencelle, sue me), c’est que c’est du bete et simple apprentissage par coeur quand , comme le precise bien Christophe, ce n’est pas lie a une etymologie.
Qu’on ecrive pasteque, ou pasteke, il y a t il une perte de sens ? non. mais y’a bien un pelot dans l’assistance qui va venir dire “oui mais c’est parce que ca vient de l’espagnol pastequa qui veut dire *”. Sans passer par la case sens/origine du mot, la connaissance de l’orthographe est une connaissance purement formelle.
Et pareil pour les regles de conjugaison. Rendre au subjonctif c’est “rende”, mais prendre c’est “prenne”. “Prende” sonnerait super barbare mais en definitive est ce qu’il y a perte de sens ? Non. C’est juste une question d’usage. Rationaliser la conjugaison, pourquoi pas.
perso, j’ai rarement eu moins de 18 en dictee au cours de ma scolarite, c’est pas pour ca que j’ai l’impression d’etre plus malin pour autant… le seul truc que ca revele selon moi c’est que j’ai lu plus que certains de mes camarades de l’epoque ce qui lie directement reussite a la dictee et une certaine (basique, on peut apprendre l’orthographe avec odile weulersse) culture. Du coup je vois pas trop l’interet de la dictee, si ca mesure, qu’est ce que ca mesure ? 1/2 point de moins par faute, ca me semble tres sommaire comme jugement de fond.
Sinon pour le fait que les djeuns lisent plus qu’en 1987 grace a internet, j’approuve. Par contre il faut voir ce qu’ils lisent. A savoir si c’est juste pour se lire les uns les autres, on voit bien que l’emulation ne va pas forcement les pousser vers le haut.
JBL
Autant montrer le niveau lamentable peut être utile, et la dictée sert ce but, autant cantonner les causes à la méthode d’enseignement est stupide. Certes, l’abandon par certains enseignants du B-A-ba de la lecture/écriture au profit exclusif de la méthode “globale” a causé du tort. L’intégrisme pour l’une ou l’autre méthode ne fait rien progresser, là où une souplesse dans les outils aurait amélioré les résultats. Mais la course aux chiffres en a causé bien plus. Passage quasi systématique d’un élève au niveau supérieur, même s’il n’a pas le niveau requis. En conséquence, nivellement par le bas dans chacune des classes, puisque les cours doivent permettre même aux plus mauvais de réussir l’examen. Et finalement, s’il ne suffit pas de démotiver ainsi les plus capables en leur faisant supporter les “cours pour les nuls”, on abaisse le niveau des examens, pour ensuite se rengorger que “XX % d’une classe d’âge obtient tel examen, ce qui est X% de plus qu’en telle année”.
Pays de merde, pas même foutu de se préparer un avenir. Pays de l’égalitarisme dogmatique, inapte à l’adaptation. Pays du nombrilisme où personne n’envisage le bien commun autrement qu’à l’aune de ses propres problèmes.
Le Canada n’en est pas encore là. Mais peut-être y travaille-t-il.
Christophe D.
Gilles et Eustazio :
Le SMS est d’avantage une réponse fonctionnelle à la contrainte des claviers à 10 touches sur téléphones portables. À savoir : écrire un mot en moins de signes possibles pour éviter de passer des heures à faire défiler les lettres à saisir. Je n’utilise pas le langage SMS (ni même les SMS d’ailleurs), j’ai du mal à le lire, je ne le conseillerait pas à mes enfants s’il se mettent un jour à en abuser mais je comprends cet usage, car à l’origine, avant de devenir une mode chez les ados, c’est une « évolution » spontanée de l’écriture face à une contrainte donnée. De même que les lettres qui composent aujourd’hui notre alphabet ont évolué au fil des siècles, selon les outils d’écriture utilisés et l’évolution des langues (ajouts de lettres, de diacritiques, de conventions). D’ailleurs, quand on y réfléchit bien, les abréviations courantes (NDLR, PS, TF1, J. M. Dupont, etc.) n’ont pas grand chose à envier au SMS (tiens, encore une abréviation). C’est juste que nous y sommes habitués.
Au delà de l’usage d’un clavier à 10 touches, le langage SMS n’a effectivement plus de raisons d’être mais sans pour autant pousser jusqu’à cette forme extrême, on peut tout à fait imaginer une orthographe simplement plus rationnelle (notamment sur la conjugaison, comme le souligne Eustazio). Quels que soient les moyens mis en œuvre, je suis sûr qu’un élève de CM2 en Italie ou en Espagne fait déjà moins de fautes d’orthographe dans sa langue qu’un élève de 3e français, car ce sont des langues beaucoup plus proches de la phonétique à l’écrit. Je ne dis pas qu’il faut tout changer du jour au lendemain ou qu’il faut en arriver à une orthographe façon SMS mais des évolutions par petites touches régulières peuvent être intéressantes. Dans ce sens, les petits mouvements déjà effectués par l’Académie sont une bonne chose mais je pense qu’il y a encore beaucoup de boulot pour que le français soit aussi facile à écrire que la plupart des autres langues.
CaptNCook
Je suis d’accord avec Christophe D, la langue française est bien trop compliquée. Il faudrait réduire le nombre bien trop important d’exceptions.
Deeder
Si seulement il n’y avait qu’en français que le niveau baisse, mais il s’agit d’une baisse générale de la culture dans tous les domaines. Je suis étudiant en classe préparatoire aux grandes écoles (CPGE) plus communément appelée maths spé et même à ce niveau on constate des baisses incroyable de niveau au cours des années selon les dires de nos professeurs résignés. Nous voyons à bac +2 des notions qui autrefois étaient enseignées au lycée voire même pour certaines au collège. Les professeurs fatalistes face à la baisse de niveau des élèves du secondaire qui entrent dans leurs rangs sont obligés de revoir leurs ambitions à la baisse.
Nous ne savons plus apprendre par coeur puisqu’il suffit d’un peu de sens commun et de logique pour aujourd’hui réussir son bac. Résultat, les connaissances sont éphémères bien que la logique qui peut être acquise dans la construction de tels raisonnement puisse être réutilisés dans de plus nombreux domaines.
Les professeurs ne blâment pas les élèves, mais plutôt la baisse générale des exigences à un âge où la mémoire n’est que plus malléable que ce qu’elle ne peut l’être à 19 ou 20 ans. Cependant, malgré la chute du niveau moyen des élèves français, le niveau des exigences aux concours d’entrée aux grandes écoles ne baisse pas ce qui oblige à ingurgiter une quantité impressionnante de données et de méthodes en un temps record pour être prêt le jour J.
Il est même parfois étonnant de voir dans ces rangs quelques personnes aux limites de l’illettrisme ou avec de grosses lacunes dans une matière, qu’elle soit ou non littéraire. Certes, personne n’est parfait, mais il est à mon avis un minimum requis pour accéder à certaines fonctions qui n’est pas toujours respecté. Et bien entendu, certaines mauvaises habitudes comme l’utilisation de l’écriture SMS à tout va et l’abandon de la lecture par les jeunes de ma génération (et je suis le premier à en être victime) ne sont pas innocentes dans cette affaire.
Alors oui, le niveau baisse et pas seulement en orthographe et grammaire française et la réforme du secondaire qui nous a été proposée il y a peu risque de ne pas arranger grand chose, au contraire. Les professeurs sont inquiets face à une telle réforme. Il faut cependant faire quelque chose pour améliorer l’enseignement en France, mais quoi ? La question reste entière et malheureusement peu, pas ou mal débattue.
samantdi
Si on veut savoir si le niveau baisse, mieux vaut lire la chronique bien documentée de Philippe Watrelot qu’écouter les propos du Café du Commerce.
padawan
Je ne vois pas en quoi c’est un problème. La capacité à apprendre par cœur ne permet pas de mesurer autre chose qu’une capacité à recracher une leçon, qu’on l’ait comprise ou non. Certainement très utile dans l’esprit de l’encadrement typique à la française où l’on veut de braves petits robots qui exécutent leurs tâches sans trop réfléchir et dans un périmètre soigneusement délimité par leurs supérieurs hiérarchiques.
Pour ma part, et celle d’à peu près tous les autres pays civilisés, la seule chose qui compte est d’apprendre à apprendre, non pas par cœur, mais en comprenant. Dans un monde où la quantité d’informations disponible sans bouger de sa chaise est infiniment supérieure à celle dont nous disposions il n’y a même pas 20 ans, la capacité à mémoriser et recracher une quantité limitée d’informations n’a aucun intérêt. Par contre, un minimum de logique et de discernement sont indispensables.
Dire que les connaissances sont éphémères est un lieu commun du type « c’était mieux avant ». Les connaissances ne sont pas plus éphémères qu’avant, au contraire, et leur accessibilité est bien meilleure. C’est notre capacité à agir sur ces connaissances, à en faire quelque chose, qui compte. Et là je ne vois pas en quoi le “par cœur” va aider.
Blah ? Touitter !