On va peut-être me faire remarquer que je parle beaucoup du Québec ces temps-ci. C’est normal. Quand mon lapin est à Montréal (enfin à Laval pour être exact), je lis chaque matin Cyberpresse.ca, je regarde la météo (-23° C ce matin…), bref, je vis à l’heure québécoise.
J’ai trouvé ce matin un site qui est un tissu de contradictions et de bêtises à la maille vraiment très serrée : Le Québécois Libre. Cet organe porte sur la société un regard guidé par “la défense de la liberté individuelle, l’économie de marché et la coopération volontaire”. Pourquoi pas. Si ce n’est la confusion intellectuelle qui semble agiter ses auteurs.
Pour les situer pour un lecteur français, c’est un groupuscule ultra-madeliniste (!). C’est à dire, l’extrême de la “pensée” néo-libérale.
Le Québécois Libre défend le “libertarianisme”, mais pas de confusion : c’est l’antithèse du libertaire, et ce n’est pas non plus du libertinage. Le “libertarianisme” se veut le défendeur de la liberté individuelle à tout prix.
Les conséquences de cette philosophie du libre à tout prix, c’est qu’on est libre de se droguer autant que de s’engager dans des mouvements sectaires (c’est écrit noir sur blanc dans la profession de foi de Martin Masse). On lira aussi avec intérêt que les libertariens croient que la seule façon d’assurer la liberté individuelle est de garantir la propriété privée et de limiter le plus possible le rôle et les interventions de l’État (l’idéologie néo-libérale). La propriété privée comme socle des libertés individuelles, voilà une vision bien matérialiste de la Liberté (que de conneries on a écrites en ton nom…) et l’État peau-de-chagrin, c’est un avenir de jungle qu’on nous promet. Bien sûr, les libertariens haïssent les communistes et les socialistes (j’ai lu que l’Humanité était “un torchon” et que les socialistes étaient les “pionniers du facisme”), mais à regarder de plus près, les libertariens n’aiment pas grand chose à part la vision de leur nombril.
On apprendra aussi que le “nationalo-socialisme règne au Québec depuis la Révolution tranquille” (bigre, les animaux n’ont pas peur des mots…).
Le libertarianisme promeut aussi à mots couverts le communautarisme (il faut bien remplacer l’État). Vous en avez assez ? Moi aussi. Pourtant je pourrais vous en faire encore des pages sur ce salmigondis philosophico-politique.
Pour clore : les libertariens sont des gens dangereux. Si vous en croisez un dans la rue, changez de trottoir.
N. B. : texte corrigé le 01/02/2003, suites aux remarques de mon lapin.
Cf. texte Au stop, il y a le parking pour le shopping.
Quand je parle à des Français, surtout lorsque je suis en France, je fais toujours attention à ma manière de m’exprimer et à ma prononciation. Ça me semble logique, pour pouvoir communiquer avec quelqu’un qui n’est pas familier avec nos expressions. Certaines personnes, moins habituées à ces échanges internationaux, ne pensent pas à “ajuster” ainsi leur langue et ce sont parfois des français qui commettent ce petit crime.
Effectivement Martine, les Québécois en visite en France font comme toi des (louables) efforts et ajustent leur niveau de langue. Je n’ai jamais entendu un Québécois s’exprimer à Paris comme il le ferait à Montréal. Il est aussi possible que la majorité des Québécois qui choisissent la France comme destination touristique appartienne encore, d’une certaine façon, à une élite, et soit donc peu représentative. Les gens plus modestes voyagent peu à l’étranger (question de moyens et parfois d’envie) et s’ils voyagent quand même, ils ne privilégieront pas forcément une destination “culturelle” (et c’est pareil pour les Français). Bref, l’échantillon québécois auquel un hexagonal est confronté n’est pas représentatif et en plus il travestit sa langue pour privilégier l’échange (et aussi éviter les jugements). Un Québécois n’ira jamais dans un garage en France dire “Bonjour Monsieur, tu devrais voir mon char, il est tout magané, les brakes font du bruit, le bumper se décroche, le fan est en panne et il y a un tire qui est flat, sans oublier qu’il faut changer les wipers”. En caricaturant, les Québécois à Paris voudraient tous ressembler à des Louis-Bernard Robitaille.
Faites-moi discuter avec un jeune de la banlieue parisienne et je ne suis pas certaine de pouvoir tout comprendre ce qu’il me raconte, alors que j’ai pourtant été exposée à des dizaines de films français depuis mon enfance. Je pense que tous les membres de la francophonie ont de la difficulté à se comprendre entre eux, et pas seulement les québécois avec le reste, comme si tout le monde parlait un “bon français” sauf nous.
C’est vrai que le langage “des banlieues” est incompréhensible (moi-même, j’ai du mal), mais c’est une sous-culture de jeunes et on entend pas (encore ?) à la télé : “allez-voir ce film qui vous fera kiffer à mort, c’est trop de la balle”. Comme l’argot, le verlan, le louchébem, ce langage est propre à un groupe social (les jeunes issu de l’immigration africaine) et se veut volontairement cryptique pour le reste de la société. C’est un sabir, mélange de verlan et de mots arabes. Il est parfois très créatif, voir poétique, et sans doute certaines expressions passeront dans le langage populaire courant. Mais ce langage n’est en aucun cas représentatif de la langue telle qu’elle est parlée majoritairement dans la rue, dans les médias et dans les familles. C’est juste une sous-culture. Comme l’était le langage des apaches (les “mauvais garçons” et les truands) de l’entre-deux guerres.
Je pense que certains membres de la francophonie ont plus de mal à se faire comprendre que d’autres, et que certains font moins d’efforts que d’autres à la qualité de la langue enseignée et à la place qu’on accorde à son enseignement.
C’est vrai qu’il y a un grand malaise avec la langue au Québec. J’ai grandi dans un quartier ouvrier où il n’était pas bien vu de lire et d’utiliser des “grands mots”. C’était comme si on reniait ses origines modestes. Je lisais pourtant beaucoup mais je faisais attention de ne pas trop le laisser paraître dans mes discussions, ajustant encore une fois mon niveau de langue, cette fois-ci pour ne pas paraître prétentieuse. La situation s’est un peu améliorée depuis mais on a encore beaucoup de chemin à faire de ce côté!
Quant à ton dernier paragraphe, on y lit l’infinie tristesse de ce “petit peuple” qui s’auto-condamne à rester petit et s’en fait un honneur, ce fond populaire qui fait qu’esthète rime avec tapette. J’y reviendrai dans un prochain billet autour de quelques pages de Michel Tremblay, extraites de La duchesse et le roturier, la scène où Marcel traîne Albertine au magasin de pianos, une scène bouleversante, qui me tire à chaque lecture les larmes, qui illustre, si c’était nécessaire, que Tremblay est l’un des plus grands romanciers de notre époque, mais aussi ce Québec sombre et obscur où honte (plus que l’humilité) rime avec dignité, qui puise ses racines dans l’histoire et se développe toujours dans le subconscient de l’Homo Quebecus moderne.
Je me suis perdu dans le désert blanc, je n’ai pas trouvé la route de sa soie, le parfum de sa peau, la délicate chaleur de son corps. Ma peau habitée par l’envie de la toucher, le soleil des phares de voitures enneigés, le sable brûlant de froid qui vient toucher mon visage. J’imagine qu’elle est mon Eden, une femme allongée dans une mousseline légère aux couleurs chamarrées, sous son mahaleb bleu prête à l’extase. (…)
Je me replis in-douze dans les feuillets de mon histoire, me blottit contre mes mots et mon imagination et en oubliant la morsure de l’hiver, je parcoure de mes lèvres ses dunes abandonnées et offertes.
Karl Dubost est un vrai poète. Mais quelle place laissons-nous aujourd’hui aux poètes ?
Peut-être reviendra-t-il un jour le temps des cerises…
Il fait printanier icitte à Paris. Grand soleil, ciel bleu et 16.5 °C à la fenêtre (à l’ombre). Les fenêtres de l’appartement sont toutes ouvertes, et un air frais balaye les confinements de l’hiver.
Dire qu’il y a un petit lapin qui, à la même latitude que Bordeaux, va certes lui aussi bénéficier du soleil ce lundi, mais aussi d’un maximum de température de -17° C. Soit 33,5 ° C d’écart avec moi.
J’écris beaucoup pour un lundi, mais il faut savoir que je suis en RTT (réduction du temps de travail, les 35 heures). Ils foutent vraiment rien ces Français !
Tiens, je viens de me rendre compte que Movable Type enregistrait dans son journal d’activité les recherches effectuées par les lecteurs de mon site grâce au moteur de recherche intégré. C’est ainsi que j’ai découvert que presque toutes les recherches étaient les noms d’autres blogues. J’en déduis que la première réaction d’un blogueur à la découverte d’un nouveau blogue, c’est de vérifier fébrilement : “a-t-il déjà parlé de Moi ?”. J’imagine qu’en s’apercevant que non, je n’ai pas encore parlé d’eux, ils font “pff, pas intéressant ce blogue”. Je suis un gars gentil, je ne vais pas citer les noms de ces blogues. Sachez seulement qu’ils sont loin d’être inconnus dans la petite blogosphère francophone…
Question existentielle : mon blogue est-il réellement un blogue ? N’est-il pas plutôt un mélange d’éditorialisme vaguement polémique et de journal intime ? Bref, c’est quoi un blogue ? Ça y est, j’ai lâché la grande question récurrente sur tout blogue qui se respecte ! C’est donc que mon blogue est finalement peut-être un blogue. Sans blague…
Message perso : mon lapin, je veux bien que tu me ramènes le Québec 2003 de chez Fides (24 piastres et des brouettes). Sans vouloir te commander…
Post-scriptum : Je viens de redécouvrir un petit bonheur du jour en ne travaillant pas aujourd’hui. C’est d’entendre la gaie rumeur des enfants qui sortent de l’école, entre seize et seize heures trente. Un bruit fait de cris aigus et de cavalcades endiablées qui se répercutent sur les façades de pierre, la clameur de ces petits êtres débordants d’énergie enfin libérée après le coup de cloche tant attendu, la ville qui se retrouve soudainement saisie d’un maelström rieur. J’ai toujours aimé ce bruit, je ne sais pas pourquoi, peut-être les souvenirs de ma propre enfance.
Savez vous qu’il existe une librairie québécoise à Paris ? Et bien oui, elle existe et est sise au 35 de la rue Gay-Lussac dans le Ve arrondissement.
Un jour de fin janvier 1998, alors que je devais partir pour la première fois de ma vie au Québec pour des raisons amoureuses, je décidai de me rendre à cette librairie afin d’acheter un guide sur Montréal et un lexique du vocabulaire et expressions québécois.
Je connaissais vraiment peu de choses du Québec et ce pays n’avait jamais particulièrement attiré mon attention et mon intérêt. Comme tout bon Français, je me contentais de quelques vagues connaissances et de beaucoup de clichés. On parle si rarement du Québec ici. Mais les hasards de la vie (et de l’Internet) me projetaient dans ce pays que je n’avais en rien choisi. Je me faisais donc un devoir de me cultiver un peu sur le sujet. Et lire des livres avant le voyage, c’est déjà voyager.
C’est donc d’un pas décidé que j’entrai dans cette librairie du Québec à Paris. Je constatai immédiatement le souci d’intégration aux moeurs parisiennes des occupants de ce lieu en notant l’absence ostensible de tout accueil de la part du personnel, payé pour cela, et visiblement très loin du surmenage. Après avoir murmuré un bonjour de pure politesse, je commençai à feuilleter quelques nouveautés sur les tables. Que des auteurs parfaitement inconnus avec des titres franchement bizarres. Bon, je n’étais pas là pour la littérature. Je dirigeai alors mon regard le plus péremptoire vers ce qui me semblait un vendeur. Le jeune homme, pas des plus virils, mais pas laid non plus, s’approcha dédaigneusement. “Je peux vous aider ?”. Mon esprit fut soudainement traversé de la vision fulgurante d’une relation bucco-génitale. Mais peut-être ce n’eût pas été approprié pour le moment et ce n’était pas le but premier de ma visite. Je me ressaisis et demandai benoîtement “Je cherche un dictionnaire du québécois…”
Je n’eus pas le temps de finir ma phrase que je commencai à sentir mon interlocuteur se décomposer. Que n’avais-je dit ! Je vis le garçon s’empourprer et me déclarer de la façon la plus sèche et péremptoire possible : “Cela n’existe pas. On parle français au Québec”. Que répondre à tant de sens commerçant ? Mon esprit était maintenant traversé par la vision d’une relation ano-génitale des plus violentes. N’osant dire le fond de ma pensée dans des termes un peu crus (et finalement ne lui souhaitant pas autant de bonheur), je m’excusai de tant d’outrecuidance involontaire de ma part, tournai mes talons et me dirigeai vers la sortie avec ulcération contenue.
Je trouvai mon bonheur à la FNAC une heure après. Que dire d’autre ? Sinon que ce vendeur pétant plus haut que son cul, donneur de leçons, j’espère bien qu’il a changé de métier depuis.
Ah bien sûr, je n’ai jamais refoutu les pieds dans cette maudite librairie. Si vous avez besoin de livres du Québec, allez donc voir du côté de chez Amazon, vous n’aurez pas à supporter la morgue et la suffisance de petits cons.
Blah ? Touitter !