Journal de bord

dimanche 30 janvier 2011

Conseil de barbons

Ce n’est pas tant, d’ailleurs que le Conseil se refuse à étendre le mariage aux couples de même sexe. Après tout, on peut faire valoir des arguments en ce sens. Mais c’est plutôt que sa motivation maigre et désinvolte semble traduire tout à la fois un désintérêt et une forme de mépris pour la complexité des questions qui lui sont soumises. Voici du droit d’adjudant chef, qui ne se donne même pas la peine des formes, et procède par aphorismes plus que par raisonnement.

Voyez à l’inverse, combien la Cour européenne des droits de l’homme s’efforce de faire valoir et respecter les arguments des parties qu’elle juge. En sorte qu’elle suscite elle-même, et à juste titre, le respect. Face à elle, le Conseil constitutionnel a des allures de barbon autoritaire et sourd.

Diner’s room : “Comment le Conseil constitutionnel a réfusé le mariage aux couples de même sexe”.

Il est toujours dommage d’éviter le débat de peur de le perdre. C’est comme ça qu’une société ne connaît plus à la longue que le rapport de force, qui s’auto-entretient avec la démonstration imparable du « il n’y a que cela qui marche ». La France a raté le train de la modernité en 1999 en votant un pis-aller qu’est le PaCS. Elle s’est faite dépasser par les Pays-Bas, la Belgique, et même l’Espagne. Elle peut se consoler en se disant qu’elle se mettra en règle avec l’Histoire avant le Vatican.

Journal d’un avocat : “De la constitutionnalité du mariage entre personnes du même sexe”.

1. Le 31 janvier 2011,
Jujupiter

Il était prévisible que le Conseil Constitutionnel dirait non, et je pense que c’est une bonne chose, et j’approuve tout à fait Eolas quand il dit qu’une belle victoire nécessite une belle bataille. Il ne faut pas reproduire la même erreur qu’en Californie.

Sinon, je ne pense pas que le PaCS soit un pis-aller. Il constitue une évolution importante des notions de couple, de famille et de mariage en France (même s’il s’agissait pour certains avant tout de donner un os à ronger aux homos). En réalité, le PaCS a même été très bien conçu. Au Royaume-Uni, il existe le pire des systèmes. Les homos britanniques ont droit au “civil partnership” qui leur donne tous les droits d’un mariage et qui n’est ouvert qu’aux homos (contrairement au PaCS qui est ouvert à tous). Donc c’est un mariage à part, qui ne veut pas dire son nom. Au moins en France, on fait bien la différence entre PaCS et mariage, et le combat LGBT préserve toute sa légitimité.

2. Le 4 février 2011,
Lionel

Vous l’admettez vous-même honnêtement : “on peut faire valoir des arguments” pour refuser d’étendre le mariage aux couples du même sexe. Et à mes yeux, votre premier propos ci-dessus est tout à fait recevable et légitime.

Seulement, nous vivons depuis quelques décennies avec différents régimes de “pensées uniques” qui, comme vous le dites, entretiennent et même tendent encore plus les rapports de force et défavorisent donc les rapports de raison et de coeur. Dans l’un de ces régimes, le mariage homosexuel est présenté comme un progrès évident sur tous les plans, qu’il faudrait être un être humain anormal pour ne pas admettre. Je retrouve dans votre second propos, nettement moins recevable pour moi, les traces de cette pensée unique, complétée d’un “argument” amusant que l’on retrouve régulièrement : l’analogie et le souci de la “performance”, d’être plutôt dans “les premiers” qu’en queue de peloton. En revanche, je n’ai pas vu là de lien vers un texte argumentant sérieusement, sur le fond, et répondant aux objections ou aux préoccupations de ceux qui ne sont pas (encore ?) de cet avis.

Sous un tel régime de pensée unique péjorativant de façon appuyée toute pensée différente, vous contribuez vous-même (ici personnellement et ailleurs collectivement pour ceux qui défendent la même cause) à raréfier les chances qu’on vous présente une contre-argumentation solide, intelligente et respectueuse. Ou en tout cas à en retarder l’apparition.

Comme le précédent commentateur, il me semble que le PaCS a été une bonne réponse à toute une série de demandes légitimes. Sur le plan du droit, il équivaut aux engagements emportés par le mariage.

Le débat ne porte donc plus que sur le symbolique. Et le coeur de ce symbolique-là, c’est que le mariage prône, institue, marque, célèbre, etc. une union entre deux êtres de sexe différent. La rencontre de l’autre différent de corps et de rôle social est une épreuve initiatique pleine de surprises, d’efforts et de récompenses spécifiques. On peut ainsi soutenir qu’il faut continuer à la privilégier, à la mettre plus en avant que les autres types d’unions.

C’est bien entendu cette argumentation qu’il faut développer et vous présenter. Comme je le disais, beaucoup ne doivent pas “oser” par peur de se prendre l’accusation “d’homophobie” dans la figure au premier mot non contrôlé à 100%. ;) De mon côté, je la bosse doucement depuis des années et elle sera probablement recevable et convaincante au moment où ce sera utile.

Bien cordialement, Lionel Lumbroso

Blah ? Touitter !

Verbe du jour

Je me sens un peu comme ça aujourd’hui. Je varnousse. Un peu de préparation de cours, beaucoup de lectures de blogues, une brassée de lavage et un début de ménage dans mon ex-bureau. C’est assez typique de ce temps de l’année, le bruit des fêtes se calme, la routine de la session s’engage. Pour tout dire je me sens un peu sur le neutre, sur l’erre d’aller.

Les dits du magoua : “Sur le neutre”.

Varnousser : aller d’une tâche, d’un sujet à un autre, se disperser, s’activer en tous sens, faire plusieurs choses en même temps, vaquer à ses occupations domestiques, bricoler, bizouner, mais aussi travailler sans trop d’ardeur, procrastiner et fureter, rôder, farfouiller.