Alors que tout le monde se demande ce que pourrait bien recouvrir le terme “Web 3.0”, pourrait-on déjà arrêter de tout appeler “Web 2.0” ? J’en ai tellement marre du Web 2.0 !
Le Web 2.0 est un mythe, le web 2.0 n’existe pas. C’est toujours le même web, avec plus de fonctions collaboratives, plus de tags, plus d’AJAX. Jusqu’à présent, le Web 2.0 n’a rien amené de bien spectaculaire. En plus, la plupart des applications web 2.0 qui inondent le marché auront disparu d’ici quelques années. A peu près n’importe qui peut mettre de l’AJAX dans une page, ajouter quelques tags et faire une belle interface. Mais ce n’est pas suffisant pour créer de la valeur sur le long terme.
J’ai déjà vécu ça, c’était il y a à peine 10 ans à l’époque de l’émergence des applets Java. J’en sais quelque chose, j’avais lancé http://www.gamelan.com, LE portail des applications Java. Hé bien devinez quoi, 10 ans plus tard que reste-t-il de ces applets Java ? Pas les centaines de milliers de petites applets que les gens avaient faites (bien que certaines étaient vraiment formidables). Non. Elles ont presque toutes disparues. Ce qui reste et qui continue à croître, c’est la plateforme Java elle-même, les grosses plateformes applicatives Java et les outils de développement. C’est ça la vraie valeur.
Il en va de même aujourd’hui. Nous touchons à la fin de la période de fascination pour AJAX et les technologies Web 2.0. Préparez-vous à des spasmes puis des morts violentes. Seules les plateformes robustes et les applications d’envergure survivront. Et devinez quoi ? Ces systèmes n’ont pas été créés en un week-end par 2 types avec un budget de 100 dollars. Ils ont nécessité des efforts importants, à long terme en termes d’investissement et de travail. On parle ici de dizaines si ce n’est de centaines de programmeurs. Le mythe perpétué du Web 2.0 de coûts extraordinairement réduits pour produire des logiciels de qualité se résume à ça : un mythe. Fabriquer un bon logiciel est toujours aussi compliqué, que vous utilisiez Ruby on Rails, C# ou Java, et ça vous coûte aussi le même prix. La possibilité de réutiliser du code open-source est intéressante, mais vous devrez toujours réussir à construire quelque chose de différenciant et de significatif par-dessus tout ça. Et ça, ça demande encore du travail. Et puis franchement, racomoder des petits bouts d’outils open-source parfois inaboutis ou buggués pour faire un système cohérent n’est pas aussi simple qu’il en paraît au départ.
En ce qui concerne les services en ligne, exception faite des coups d’éclat de ceux qui grossissent et se font racheter avant de dépenser vraiment de l’argent, la plupart des sites qui grossissent sont aussi une grosse source de dépense (parmi les coûts : dimensionnement, bande passante, service client, sécurité, maintenance, internationalisation, intégration, API, amendes, etc.). Il n’est en rien plus facile de lancer un site d’envergure aujourd’hui qu’il y a 10 ans. En fait, en faire une réussite commerciale est même plus compliquée : il y a plus d’utilisateurs, de compétiteurs et les attentes des utilisateurs sont plus élevées.
Beaucoup de gens m’ont dit cette semaine qu’ils ne trouvent pas le “Web 2.0” si impressionnant jusqu’à présent et qu’ils espèrent vraiment qu’un nouveau web se prépare, quelle que soit son appellation. La conférence Web 2.0 qui s’est tenue à San Francisco a été décrite comme une grande réussite, il s’est surtout agi d’une séance d’auto-congratulation entre grands noms (récemment rachetés) du secteur. Où est l’innovation ? Où sont les perspectives d’avenir ? Il en est ressorti une conférence centrée sur ce qui s’est passé l’an dernier, pas sur ce qui va survenir l’an prochain.
Mais ce qui s’est passé l’an dernier est déjà tellement dépassé. Et franchement, il manque beaucoup de choses au Web 2.0. Quand Tim Berners-Lee a pensé le Web Sémantique, c’était pour que le web libère son plein potentiel. Le Web 2.0 ne craint pas complètement, juste un peu. Il y a vraiment des idées utiles et apporte du sang neuf par rapport à ce que nous connaissions jusqu’à présent. Mais il pourrait faire tellement mieux !
Soyons francs, au bout du 500e site communautaire en AJAX bourré de tags, on se lasse un peu et on commence à se demander quelle sera la suite. Montrez-moi quelque chose de vraiment nouveau, pas quelque chose que j’ai déjà vu 500 fois. Si c’est si simple de créer une application Web 2.0, quel est vraiment leur intérêt ? La plupart de ces sites fonctionnent la curiosité, une fois passée, jamais nous n’y retournerons.
En ce qui concerne les technologies du Web 2.0, en dehors d’AJAX, de l’idée de mixer des applications (les mash-ups), de faire des widgets, quelle technologie réellement nouvelle est apparue ? Pas grand chose, vraiment. AJAX présentait un intérêt l’année ou elle est apparue, et il est toujours sympa de rendre les interfaces utilisateur plus riches. Mais les questions qui se posent maintenant sont les suivantes : que fait au juste cette belle application AJAX, en quoi est-elle différente de ses 500 concurrentes, est-elle vraiment utile ? L’emballement général pour AJAX est en train de s’essouffler. Nous savons maintenant tous que nous pouvons faire du drag’n’drop, bouger des widgets, réarranger du contenu. YOUPIIIII! Et maintenant ?
Le contenu généré par les utilisateurs, c’est super, et nous nous le répétons tous les soirs avant de nous coucher. Mission accomplie, grands gourous du logiciel communautaire ! RSS et ATOM sont également de merveilleux systèmes de notification et de syndication. Très bien, nous allons tous pouvoir intégrer cela dans nos applications et nos services maintenant. Ca, c’est fait. C’est tout ?
L’aspect collaboratif, c’est important et on aime tous ça. Mais à part pour trouver du travail, recruter ou faire des rencontres (parfois les 2 à la fois), en quoi est-ce VRAIMENT utile ?
Bloguer, c’est sympa et même parfois utile. Très bien, mais les blogs ce n’est que le début, pas le but ultime pour mettre mon contenu sur le web. La publication personnelle n’a pas encore atteint le niveau de sophistication de la bureautique façon 1989. Non seulement les outils d’édition sont primitifs, mais le formatage ou la mise en page des éléments relèvent du fantasme (le petit éditeur de texte où j’écris ne fait pas exception).
MySpace et Youtube sont des succès et des centaines de suiveurs essayent maintenant de les imiter. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais en quoi MySpace est-il différent de Geocities (un service tellement Web 1.0) ? Pour ce qui est de la vidéo, je ne vois pas la révolution à pouvoir voir une vidéo dans une fenêtre et pouvoir envoyer l’URL à mes amis. Certes, c’est joli, mais encore ? On pouvait faire tout ça en 1997. En quoi est-ce fondamentalement différent ou mieux aujourd’hui ? C’est hébergé quelque part ? C’est plus rapide ? Il n’y a pas de plugin à télécharger ? Il y a plus de contenu illégalement mis en ligne pour moi par des entreprises qui valent des milliards ? C’est plus simple à télécharger ? Rien de tout cela ne m’impresionne. On pourrait faire tellement plus avec la vidéo sur le web que de simplement la télécharger et la jouer.
En ce qui concerne le partage de photos, Flickr est super. Nous sommes tous d’accord. Ainsi les deux douzaines de sites de partages de photos. D’accord ? C’était super l’an dernier, et maintenant ?
Parlons des wikis, je les adore, je les utilise, mais j’espère vraiment qu’il ne s’agit pas du processus ultime de collaboration humaine, parce que c’est vraiment primitif et encore très technique (raison pour laquelle les entreprises promouvant les wikis n’ont pas encore réussi à les rendre grand public). Mais il n’y a pas que les wikis, aucune application Web 2.0 n’a réussi à atteindre le niveau d’adoption, de fonctionnalités, d’utilité que les bons vieux produits des années 1980/1990 tels que Lotus Notes. C’est pourquoi malgré un marché potentiel de 100 millions d’entreprises, même des outils comme BaseCamp (l’un de meilleurs outils collaboratifs 2.0) ne comptent qu’un million d’utilisateurs. Il y a encore du chemin à faire !
Regardons du côté de la vente en ligne. Le Web 2.0 a apporté très peu d’innovation. Ebay, Paypal et Amazon sont sensiblement les mêmes depuis des années. Le Web 2.0 n’a pas apporté grand chose au e-commerce d’après ce que j’en sais, à part rajouter un peu d’AJAX et des tags bien sûr. Oh, j’allais oublier, certains sites récupèrent des petites annonces sur plusieurs sites et les centralisent. Devinez quoi les amis, WhizBang! faisait ça dans les années 90. Rien de neuf de ce côté non plus.
J’en ai vraiment assez que le Web 2.0 (terme qui n’a jamais été clairement défini) soit considéré comme “cool”, juste parce que… c’est l’étape suivant le Web 1.0. J’ai déjà vu un nombre incalculable de fois toutes les astuces du Web 2.0, maintenant je voudrais voir quelque chose de fondamentalement différent. J’ai vu des multitudes de fonctionnalités simulant des applications et je peux vous prédire que la plupart d’entre elles vont disparaître. Mais quelle sera la valeur qui restera ? C’est ça qui m’intéresse. Il est vrai qu’il y a beaucoup de possibilités d’améliorer le Web 2.0, mais j’en vois déjà les limites et je m’intéresse à ce qu’il y a au-delà de ces limites.
Je veux arriver à une nouvelle frontière. Je veux des outils, des contenus plus intelligents, une expérience web plus riche, plus intégrée, plus unifiée, plus connectée. Un web plus intelligent. Je veux être en mesure de faire des choses que je ne peux pas faire maintenant, pas ce que je peux déjà faire avec quelques tags en plus. Je veux le prochain web, pas le web d’hier, pas toutes les applications “MoiAussi2.0”. Je veux le web de demain ou, mieux, le web d’après-demain quoi que vous l’appeliez (ou pas). Faites-moi une faveur, s’il vous plait. Quand le prochain web arrivera, vous ne voudrez peut-être pas l’appeler Web 3.0, mais au moins ne l’appelez pas Web 2.0.
Nébude
Je lis dans le texte de libé : “protester contre l’érection d’une statue géante du pape Jean Paul II dans la ville” … ça me donne très envie de contrepéter, dès le matin … Mais dans l’article, on apprend aussi que non seulement on érige une statue de 9 mètres d’un pape somme toute assez controversé chez les laïques, mais que c’est également un cadeau de la Russie à la France approuvé par le président Poutine.
Vraiment, ce sont deux personnalités rès sympathique qui viennent envahir ce petit village gaulois plein de menhirs … qui ferait effectivement bien de résister à l’envahisseur :-)
Blah ? Touitter !