Journal de bord

mercredi 23 mai 2012

Les casseroles de Montréal

Tous les soirs, à 20h, pendant 15 minutes, munissez-vous d’une casserole ou de tout autre objet pouvant faire du bruit et tapez dessus avec toute la rage que cette loi spéciale fait naître en vous !

Dans des circonstances où la dictature chilienne a limité les attroupements illégaux à tout regroupement de plus de 4 personnes, les citoyens chiliens ont utilisé ce moyen pour exprimer leur colère. Inspirons-nous d’eux !

Groupe Facebook : Nos casseroles contre la loi spéciale !

Le Globe, Annie Dubé : “Villeray, je suis tellement fière de toi”.

Mon conseil : le wok a une très belle sonorité.

1. Le 23 mai 2012,
VT

Et c’est ainsi que la loi du bâillon va faire le bonheur des prothésistes audio ! (…)

2. Le 23 mai 2012,
Laurent Gloaguen

Rire :-)

Blah ? Touitter !

Bilan des 100 jours

[…] Ça fait donc plus de 100 jours que ça dure. Des centaines de manifs; plus d’un millier d’arrestations; une entente bidon avortée; une ministre sacrifiée; une loi spéciale très dure adoptée dans la cohue, et puis quoi ? Rien. L’impasse. Le gouvernement en « mode menace ». La police en « mode anti-émeute ». Les étudiants grévistes en « mode manif ».

[…] Depuis plus de trois mois, ce gouvernement a tout faux. Malgré le ton grave et confiant de celui qui ne reculera pas, ce gouvernement est dépassé et inadéquat.

Au début, il a mal évalué l’ampleur du mouvement, qui allait rapidement s’essouffler, pensait-on à Québec. Puis, le gouvernement a cru que la grève prendrait fin à Pâques. Ensuite, les libéraux ont tenté de diaboliser Gabriel Nadeau-Dubois. En vain. Ils croyaient par ailleurs être capables de mettre fin au conflit avec une entente mal fagotée et farfelue et comme rien de tout ça n’a fonctionné, ils ont cru faire peur aux étudiants avec une loi spéciale.

Bien sûr, le gouvernement n’a pas tous les torts. Les représentants des étudiants ont fait preuve d’une sacrée intransigeance par moments, mais à la fin, en démocratie, c’est le gouvernement qui doit régler les crises et assurer la paix sociale. Il y arrive avec la FTQ, notamment, qui est nettement plus intimidante que ne le seront jamais les étudiants.

On a appris il y a quelques jours que la FECQ et la FEUQ ont offert de parler des droits de scolarité, mais que l’ex-ministre Beauchamp leur a alors dit que ce sujet n’était pas négociable.

Ce gouvernement n’a pas été capable d’en arriver à une solution négociée. Il est maintenant incapable de forcer la fin de la crise avec une loi matraque. Que lui reste-t-il comme crédibilité, comme légitimité ?

La ministre de l’Éducation, Michelle Courchesne, a dit hier que son cabinet tentait depuis jeudi de joindre les associations ! Come on ! Tous les étudiants ont des cellulaires (et boivent de la sangria à Outremont !), c’est bien connu ! Et puis, si la ligne est occupée, envoyez votre invitation formelle par l’entremise des médias, ce ne serait pas la première fois.

Au point où on en est, nous devrions enfermer tout ce beau monde dans une église (ça facilite le recueillement !) et ne les laisser en sortir que lorsque la fumée blanche du consensus s’échappera de la cheminée.

Il est peut-être trop tard, par contre. On se dirige peut-être vers 100 autres jours de grève, vers un trimestre définitivement foutu et vers un joyeux bordel en septembre.

Le principal problème, dans l’approche du gouvernement, c’est qu’elle est intransigeante, qu’elle est antagoniste. Vous portez le carré rouge ?  Vous êtes contre le gouvernement, contre le Québec même, et pour la violence; vous désobéissez ? Vous êtes un vandale ! Vous ne dénoncez pas la violence ? C’est donc que vous l’encouragez ! Vous n’acceptez pas la hausse ? Vous êtes contre le développement des universités !

Il y a un problème d’équilibre, de contrepoids dans l’approche de ce gouvernement. Ça commence au sommet de la hiérarchie, avec Jean Charest, qui a apparemment oublié qu’il est aussi ministre de la Jeunesse. Il a écouté la commission jeunesse de son parti, qui a produit de judicieuses recommandations au cours des dernières années, mais les leaders étudiants n’ont, semble-t-il, aucune légitimité à ses yeux.

Problème de contrepoids, aussi, à l’Éducation, qui est maintenant entre les mains de la présidente du Conseil du Trésor, dont le mandat premier est de réduire les dépenses de l’État.

Quant au ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil, il est d’abord ministre de la Police dans cette crise.

Que la police arrête et neutralise les casseurs et les têtes brûlées, soit, mais qui protège les victimes collatérales qui se font tabasser et poivrer si généreusement, comme le démontrent les vidéos du week-end ? Qui protège un photographe de presse dûment identifié qui se fait cogner la tête par une brute en uniforme? Qui protège un restaurateur ou un dramaturge injustement maltraités, insultés et arrêtés ?

« La déontologie », a dit hier M. Dutil.

Faites-moi rire…

La Presse, Vincent Marissal : “Un gouvernement dépassé et inadéquat | Vincent Marissal | ”.

1. Le 23 mai 2012,
Eolas

What the FEUQ ?

Blah ? Touitter !

La campagne des banquets

Louis-Philippe, sous des dehors bonshommes, est un homme autoritaire ; ses choix politiques se portent sur le maréchal Soult puis sur Guizot. La monarchie de Juillet a pris des mesures anti-ouvrières, telles que les interdictions du droit de grève et du droit d’association, et s’appuie essentiellement sur la haute bourgeoisie, dont les affaires se sont considérablement développées.

[…] En préparation de la session parlementaire de 1847-1848, Louis-Philippe Ier, roi des Français, interdit les réunions politiques de l’opposition libérale et démocrate. Bien que royalistes, les Libéraux et Démocrates ont une vision de l’État où le parlement serait plus fort et le roi plus discret.

[…] L’opposition de gauche dite « réformiste » se rencontre et s’organise systématiquement lors de ces « banquets » (débutant le 9 juillet 1847 à Paris), qui sont l’occasion, lors de ces discussions politiques, de militer pour une réforme de la loi électorale censitaire par un élargissement du droit de vote.

Cette campagne de grande ampleur (70 banquets et 17 000 convives de juillet à février dans tout le pays), passionnée, mais tolérée, est interdite le 25 décembre 1847, 3 jours avant la session parlementaire, au cours de laquelle le discours royal d’ouverture (28 décembre) et l’affirmation du refus de réformes relancent la Campagne des Banquets. Une adresse solennelle est adressée au roi. L’interdiction du banquet du 22 février 1848 et les débordements populaires qui suivront déclenchent la révolution de 1848, union populaire et révolutionnaire des démocrates royalistes et des républicains.

[…] Le déroulement des banquets est à peu près le même pour tous. Dans un premier temps un défilé, souvent accompagné d’un orchestre, s’opère dans les rues de la ville, ensuite les convives se livrent à un repas payant, pour finir sur de nombreux discours prononcés. Un banquet peut durer toute la journée. Ces banquets, sous des couverts festifs, ont un réel but politique. Les discours prononcés montrent le caractère réformateur de ces banquets. Les discours en question sont prononcés par des membres politiques influents et souvent partie prenante du parti du mouvement, soutenus le plus souvent par la petite bourgeoisie élue de l’époque.

Les banquets sont le lieu d’une opposition variée mais unie face au gouvernement de Guizot. De plus on compte parmi les orateurs principaux Odilon Barrot (orléaniste), Louis Blanc (socialiste), Alexandre Martin Albert (socialiste), François Arago (droite libérale), Ledru-Rollin (extrême gauche), Alphonse de Lamartine (centriste), Armand Marrast (orléaniste), Louis-Antoine Garnier-Pagès (extrême gauche), Jacques Pierre Abbatucci (ministre) (divers gauche). À l’origine les banquets sont une manifestation contre Guizot et sa politique; cependant la radicalisation du gouvernement entraîne dans ses banquets une radicalisation tout autre. En effet, dans le premier banquet, on voit la figure de Odilon Barrot, un orléaniste qui souhaite qu’un toast au roi soit porté dans chaque banquet ; or, dans les autres banquets, le discours se radicalise : non seulement la politique de Guizot est remise en cause, mais la légitimité du gouvernement aussi. Ainsi les figures comme Louis Blanc et Marrast dominent les banquets avec des discours républicains et sociaux.

La campagne des banquets a été un moyen de contourner les lois conservatrices, ce qui implique que d’autres mouvements, séduits par une telle initiative, l’ont imité. La Campagne des Banquets française de 1848 servit de modèle à l’opposition au Tsar Nicolas II. La campagne des banquets russe de 1904-1905, menée par les Libéraux et les Démocrates fut une des causes de la révolution russe de 1905.

Wikipédia : “Campagne des Banquets”.

Mystère danois

Plus d’imposition et plus de bonheur.

Le Danemark, nation du bonheur ? La félicité des 5,4 millions d’habitants de ce petit pays scandinave n’est plus un secret. Année après année, depuis 1973, toutes les enquêtes arrivent à la même conclusion : les Danois sont les plus heureux du monde. Peu importent les critères retenus. L’Anglais Adrian White, de l’université de Leicester, en a choisi cinq : la santé, la richesse, l’éducation, l’identité nationale et la beauté des paysages. Des chercheurs de l’université de Rotterdam en ont retenu 953. Chaque fois, le Danemark arrive en tête, la France devant se contenter d’une 62e place dans le premier classement et d’une 39e dans le second.

Libération, 15 septembre 2009 : “Le Danemark, royaume de la béatitude éternelle”.

Une large majorité de Danois est satisfaite du niveau d’imposition au Danemark, pourtant un des plus élevés au monde, selon un sondage publié mardi.

Seuls 20% des Danois trouvent qu’ils paient trop d’impôts, quand 66% jugent adéquat le niveau d’imposition et 12% trouvent même qu’ils n’en paient pas assez, selon cette enquête de Greens Analyseinstitut publiée par le quotidien économique Boersen.

Le Danemark arrive en tête, devant la Suède, la Belgique et la France, du classement des pays de l’Organisation de coopération de développement économiques (OCDE), avec un taux d’imposition de 48,3% du produit intérieur brut (PIB) en 2007.

Ce pays scandinave dépasse nettement la moyenne des pays développés membres de l’organisation (38%) et les Etats-Unis (26,9%).

AFP, 19 octobre 2010.

1. Le 23 mai 2012,
Guillermito

Dans ce genre de classement (bonheur, qualité de vie, etc…), les pays scandinaves arrivent presque toujours en tete. Dernier exemple en date : les meilleurs pays pour les femmes :

http://jezebel.com/5844395/the-best-and-worst-countries-for-women

  1. Iceland
  2. Sweden
  3. Canada
  4. Denmark
  5. Finland
  6. Switzerland
  7. Norway
  8. United States
  9. Australia
  10. Netherlands

Les meilleurs pays pour les enfants :

http://www.aneki.com/children.html

  1. Netherlands
  2. Sweden
  3. Denmark
  4. Finland
  5. Spain
  6. Switzerland
  7. Norway

Dans une autre vie, j’aurais aimé habiter en Scandinavie.

2. Le 23 mai 2012,
OffTopic

@Guillermito: n’as tu pas manqué d’être suédois ?

3. Le 23 mai 2012,
Benoît Granger

Guillermito : laisse tomber, tu ty ennuierais !

4. Le 23 mai 2012,
OlivierJ

Je reste perplexe face à ce genre d’étude. Si c’était incontestable, on devrait par exemple avoir une immigration bien plus importante vers les pays nordiques et beaucoup plus faible vers la France, vu son mauvais classement.

5. Le 23 mai 2012,
Deadbydawn

Votre tableau idyllique ne doit pas occulter une extrême droite très présente. http://www.monde-diplomatique.fr/cartes/ueextremesdroites. Généreux, mais entre eux…

6. Le 23 mai 2012,
padawan

L’étude ne factorise pas non plus la propension spécifiquement française à râler et broyer du noir en permanence, même quand tout va bien.

Voir également les taux de suicides comparés entre pays. Mieux vaut être un homme qu’une femme au royaume du Danemark.

OlivierJ : et on peut se demander aussi combien de gens ont envie d’aller se geler les miches au pôle Nord pour apprendre le danois.

7. Le 24 mai 2012,
Cédric

Voilà un an que j’ai quitté Paris pour Copenhague… Tout le monde paye des impôts, dès le 1er bulletin de salaire, employés comme chômeurs. Les petits payent un peu, les gros payent beaucoup et c’est normal aux yeux de tous. Tout repose sur votre numéro identifiant, numéro qui sert à tout et dont se servent toutes les administrations, banques, employeurs. Les fichiers sont croisés, on ne peut pas tricher. Anecdote pour la Suède, c’est tellement transparent que quiconque peut demander à voir la feuille d’imposition de son voisin…

8. Le 24 mai 2012,
padawan

Cédric, en France tu peux demander à connaître le montant de l’impôit de n’importe quel contribuable de ton département. Tu ne peux pas en faire état publiquement par contre.

9. Le 25 mai 2012,
OlivierJ

Padawan : en effet, le facteur climatique compte pour beaucoup je pense :) . J’ai visité une bonne partie du Danemark (îles et continent), il y a des endroits magnifiques, mais je crois que la France offre une encore plus grande variété. Et même en juin, la lumière n’est pas la même.

10. Le 25 mai 2012,
Cédric

@Padawan : merci pour la précision, je ne savais que cela était possible aussi en France.

11. Le 25 mai 2012,
padawan

Cédric, c’est peu connu et je pense qu’on n’en fait volontairement pas publicité. Quand j’ai découvert ça par hasard au centre des impôts, le gars m’a regardé comme si je venais de lui demander la clé de la backroom.

12. Le 25 mai 2012,
padawan

OlivierJ : joli pays que la France. Il ne tient qu’à ses habitants (et aux touristes) d’en profiter ;-).

Blah ? Touitter !

Complainte des chroniqueurs

Il y a des chroniqueurs au Québec pour déverser des torrents de merde sur les étudiants, encore aujourd’hui avec Lise Ravary au Journal de Montréal qui traite les étudiants contre la hausse de “demeurés”.

J’admets que traiter Sophie Durocher de “salope” n’est pas de la plus grande élégance, mais, franchement, je n’arrive pas à m’étonner de ce genre de réaction colérique, et qui demeure, il faut le souligner avec force, tout à fait isolée. Qui sème le vent, peut récolter la tempête… (Une observation jugée “pathétique” par l’intéressée.)

Entendons-nous bien, il est tout à fait condamnable de traiter Sophie Durocher de “salope” ou Richard Martineau de “mal baisé”, mais je comprends la frustration qui conduit à ce genre de débordements.

Quand on est une personne publique, on est exposé à tous types de commentaires, y compris les insultes gratuites. Quand on est une personne publique, dotée d’importantes tribunes médiatiques, qui fait état de positions politiques marquées et vigoureuses, on y est mille fois plus exposé que le blogueur en macramé. C’est juste inévitable. Il faut avoir le “cuir épais” pour s’engager dans ces carrières.

Sophie Durocher montre sur les grands chevaux de l’indignation : “C’est une attaque contre les femmes et le journalisme”. Une pancarte d’un hurluberlu dans une manifestation, et c’est soudain le féminisme et la liberté de la presse qui sont menacés, rien que ça. Mais ne soyons pas dupes, Mme Durocher monte en épingle cet incident pour encore asséner ses idées et accuse en totalité les étudiants contre la hausse : “Les carrés rouges (se) disent « étudiants et étudiantes » et se prétendent égalitaires, mais ils traitent de « christ de salope » une journaliste mariée avec un chroniqueur qui ne penche pas de leur bord.” Voilà, les salauds de rouges, tous derrière la pancarte, tous unanimes, tous complices.

Demain, reprenant les rhétoriques gouvernementales usées jusqu’à la corde, Mme Durocher va sans doute exiger que les Fédérations étudiantes condamnent unanimement cette pancarte si celles-ci ne veulent pas se voir dénoncer comme étant contre les femmes, contre la presse, contre la démocratie.

Je ne sais pas si Sophie Durocher est une salope — nous ne sommes pas intimes — mais je sais que Sophie Durocher n’a rien d’un conne… J’en vois pour preuve, si besoin était encore, son instrumentalisation à des fins idéologiques d’une petite pancarte insultante noyée au milieu d’une foule de dizaines de milliers de citoyens en colère…

Par ailleurs, cette même Lise Ravary nous décrit Sophie Durocher “une femme plutôt discrète, toute en retenue”. Hum… Ça se discute.

Gaétan Maudit pète sa coche

Le bruit des casseroles monte !

Grosse manifestation spontanée de casserolistes contre la loi 78 dans le quartier Villeray :

Casserolistes au carrefour Fleury-Saint-Hubert, quartier Ahuntsic :

Casserolistes au carrefour Jarry-Saint-Denis, quartier Villeray :

De mon côté, nous n’étions que quatre dans ma ruelle, mais ce fut une bonne occasion de rencontrer des voisins.

Conseil aux casserolistes : oubliez les cuillères en bois, ça casse… une bonne louche en métal, il y a rien de mieux.

« Ting ! Ting ! Ting ! » L’invitation à se joindre au mouvement « Nos casseroles contre la loi spéciale ! » s’est répandue au cours des derniers jours comme une traînée de poudre dans les réseaux sociaux, si bien que des dizaines de milliers d’indignés ont sorti hier soir leurs ustensiles, puis ont tapé… fort. Des personnes de tous âges — des tout-petits en pyjama enfreignant leur couvre-feu sous l’oeil complice de leurs parents aux mamies en bigoudis — s’en donnaient à coeur joie sur leur balcon ou dans la rue.

« On ne le prend pas, ce n’est pas compliqué ! », a fait valoir Linda Jolicoeur au coeur d’un attroupement de plus de 250 protestataires rassemblés à l’angle des rues Laurier et Fabre, à Montréal. La Loi permettant aux étudiants de recevoir l’enseignement dispensé par les établissements de niveau postsecondaire qu’ils fréquentent, adoptée la semaine dernière par l’Assemblée nationale du Québec — 68 pour, 48 contre, comme se plaît à le rappeler le premier ministre Jean Charest — restreint sévèrement les libertés de manifestations à leurs yeux. N’hésitant pas à la comparer à la Loi sur les mesures de guerre proclamée durant la Crise d’octobre, Mme Jolicoeur juge la législation « trop sévère », « inutile » et « contribuant à amplifier la rage des gens ». « Je suis sans mot devant l’attitude du gouvernement », a-t-elle ajouté tout en donnant des coups de cuiller de bois sur son ustensile de cuisson.

À 20 h tapantes, des milliers de personnes, comme Linda Jolicoeur, sont sorties à l’extérieur tenant fermement une casserole et une cuiller n’attendant qu’un voisin fasse résonner les premières notes pour à leur tour entrechoquer leurs ustensiles. D’autres « casseroles » se sont agglutinées par dizaines à des intersections animées afin de faire entendre leur grogne à l’égard du gouvernement libéral, avant de mettre le cap vers la 30e manifestation nocturne contre la hausse des droits de scolarité dans le centre-ville.

Du haut de ses six ans, Théo Pelletier et sa soeur cadette, Ève — surnommée affectueusement « Eille » pour sa personnalité affirmée —, ont aussi fait entendre leur mécontentement donnant consciencieusement des coups de cuiller sur leur bol. En milieu de soirée, ils se faisaient tranquillement à l’idée de se mettre au lit regardant avec envie des centaines de personnes défiler à proximité, dans la rue Masson. « Demain ! », a promis papa.

Le mouvement, né vendredi dernier dans les arrondissements Villeray, Saint-Michel, Parc-Extension, Rosemont, La Petite-Patrie, Mercier, Hochelaga-Maisonneuve et Le Plateau-Mont-Royal, embrassait hier soir Ahuntsic-Cartierville, le Sud-Ouest, Verdun et… Outremont, en plus de la Ville de Québec.

« Tapez dessus avec toute la rage que cette loi spéciale fait naître en vous ! », a lancé sur Facebook l’instigateur du mouvement de contestation, François-Olivier Chené. « J’ai lancé l’invitation sur Facebook dans la nuit de jeudi à vendredi au moment où il y avait les débats sur la loi spéciale. J’ai lancé la bouteille à la mer ne sachant pas qui allait répondre à l’appel », a-t-il expliqué.

Quelque 1000 personnes étaient associées publiquement sur le réseau social au groupe lorsque les premiers coups de casserole ont été donnés vendredi dernier à 20 h. Hier, ils étaient dix fois, vingt fois plus à participer à la démonstration de force aux quatre coins de la métropole.

M. Chené s’est dit « agréablement surpris » de l’engouement populaire suscité par son idée, mais du même souffle ne revendique pas le titre d’« organisateur » de ce tintamarre. « Ce n’est plus du tout de mon contrôle. J’ai lancé l’idée et tous ceux qui étaient intéressés l’ont reprise », a-t-il précisé. Le professeur de science politique au cégep de Saint-Hyacinthe — toujours en grève — a souligné le caractère « accessible » de cette action politique. « Ça permet à tous ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas participer aux manifs nocturnes… Parfois, ce n’est pas rassurant de voir ce qui s’y passe. »

Le Devoir, Marco Bélair-Cirino : “Grand tintamarre contre la loi 78”.