Journal de bord

mardi 19 novembre 2013

Nicolas Demorand, Drama Queen

Je ne connais pas Nicolas Demorand, rédacteur en chef de Libération, mais à voir ses récentes prestations télévisées, le personnage semble infatué et grandiloquent, de cette caste de journalistes un peu trop imbus de l’importance de leur fonction qui ne souffrent que rarement d’un sentiment appelé humilité.

À l’écouter et à le lire, j’apprends donc que le quoditien, sanctuaire de la Démocratie, a eté “profané”, a été “victime d’une tragédie”, qu’une “liberté fondamentale a été grièvement blessée”, qu’un “acte d’une gravité incommensurable” a été commis, que “le monde commun, attaqué, meurtri, fragilisé par un tel acte” doit être protégé.

Libé ! Libé outragé ! Libé brisé ! Libé martyrisé !

Vous rajoutez une dose de corporatisme mêlée de panurgisme, et c’est l’enflure presque tous médias confondus.

Dans son édito du jour, Demorand a cette phrase sublime “Faire feu dans un journal, c’est attenter à la vie d’hommes et de femmes qui ne font que leur métier”. Quelle brutale évidence. Combien d’hommes et de femmes sont victimes de violences dans l’exercice de leur métier ? Pensez aux flics ou aux putes par exemple, des sans-grade qui feront au mieux que quelques lignes dans Libération. Pour les prostitué(e)s, je ne suis pas certain, mais pour la police, je suis bien sûr qu’elle est indispensable à l’ordre, et donc à l’exercice de la Démocratie. Je n’ai pas souvenir qu’à Libé ou ailleurs, on mette autant d’emphase à condamner les agressions de policiers. Ni même celles de bijoutiers, qui ne sont pas, je vous l’accorde, un pilier fondateur de la Démocratie. Il y a manifestement une démarcation entre le fait-divers et l’ébranlement de Démocratie.

Fabrice Rousselot, directeur de la rédaction, y va de concert dans un émouvant numéro de duettistes : “Quand on entre avec un fusil dans un journal, dans une démocratie, c’est très, très grave, quel que soit l’état mental de cette personne”.

Que s’est-il donc passé ? Un dingue, poliment appelé un “déséquilibré”, possiblement fraîchement sorti de prison, qui a visiblement des comptes à régler avec la société en général, a fait feu dans le hall d’accueil du journal. C’est sûr, la Démocratie vacille.

Quand l’élégante Madame Caillaux a tué Gaston Calmette, le directeur du Figaro, je ne me souviens pas qu’on ait dit que la démocratie était menacée. On aurait pu cependant, ce n’était pas une folle sortie d’asile, c’était l’épouse du ministre des Finances dans le gouvernement Doumergue.

Je n’ai pas trouvé d’article sur la vraie victime, pas même mention de son nom. Tout juste sait-on que c’est un photographe, mais rabaissé du qualificatif d’assistant. Encore un sans-grade.

1. Le 19 novembre 2013,
Mox Folder

Merci d’exprimer exactement ce que j’ai ressenti hier en lisant les réactions….

2. Le 19 novembre 2013,
flor

sans oublier, les commentaires des chroniqueurs de canal+ qui après une interview de demorand se moquaient, voire plutôt, s’outrageaient d’un tweet absolument scandaleux d’une personne se demandant si cet acte n’exprimait une certaine forme de ras-le-bol des français envers des médias trop partiaux… ça leur semblait une idée si folle qu’un quidam puisse être fâché avec les journalistes…

3. Le 19 novembre 2013,
Karedig

Emphase et corporatisme certes. Et même beaucoup. C’est comme lorsqu’un journaliste ou un animateur est viré d’un média, c’est comme si le socle de la démocratie avait vacillé, tandis que pour le vulgaire il faut quelques milliers de licenciements pour en faire la une.

Ceci étant dit, faire feu dans un journal ça n’est pas comme faire feu dans un commerce, dans une gare ou un hall d’hôtel, c’est choisir volontairement de frapper un média et la liberté des médias est un élément de notre démocratie. Faire feu dans un commissariat ou un tribunal serait aussi un acte symbolique fort. En ce sens, l’agression ratée de BFM TV puis celle sanglante de Libération n’est pas simplement un fait “divers”.

Quant à l’âne des jeunes UMP qui s’est fait taper sur les doigts pour avoir dit que cela pouvait exprimer le ras-le-bol de français face à des médias trop partiaux, il oublie aussi et entre-autres que ce n’est ni un journaliste, ni un salarié de Libé qui est dans le coma en ce moment…

4. Le 20 novembre 2013,
Sacrip'Anne

Je ne vais pas me jeter corps perdu dans la défense de Demorand qui mérite bien, en temps ordinaire, de se faire secouer un peu.

Juste, nuançons avec le choc d’un événement traumatisant (quant au nom du photographe, peut-être a-t-il été caché pour des questions de respect de l’anonymat ou dans l’attente d’informations ultérieures, on sait depuis que c’est un jeune César :) )

5. Le 20 novembre 2013,
Franck

“Faire feu dans un journal”

Moi, j’utilise plutôt un journal pour allumer du feu

….”possiblement fraîchement sorti de prison, qui a visiblement des comptes à régler avec la société en général”…

Très juste, je dirai même qu’il avait des comptes à régler avec la Société Générale…

6. Le 21 novembre 2013,
Le Parisien Libéral

Blah ? Touitter !