Journal de bord

vendredi 5 décembre 2008

Bon grain encarté, ivraie électronique

Dans la rubrique “journalisme, citadelle assiégée, profession sans définition fixe ni compétences définies”…

Attendu :

  • que les nouveaux moyens de communication comme Internet permettent aux citoyens, entreprises et groupes de pression d’avoir un accès facile à la place publique
  • qu’il devient de plus en plus difficile pour le public de distinguer les journalistes professionnels des autres communicateurs
  • que le respect des règles de déontologie est la seule chose qui distingue les journalistes professionnels des citoyens et autres communicateurs
  • que l’information produite dans le respect des règles de déontologie des journalistes a davantage de valeur et de crédibilité
  • que la FPJQ a intérêt à s’afficher comme un exemple et un leader des meilleures pratiques professionnelles
  • que la FPJQ a intérêt à définir elle-même les balises de la pratique du journalisme professionnel plutôt que d’attendre que les pouvoirs publics ou d’autres instances le fassent à sa place
  • que les règlements généraux de la FPJQ reconnaissent que «la fonction de journaliste repose sur la vérification des faits, la rigueur du traitement et le respect de l’éthique et de la déontologie».

Il est proposé d’ajouter aux articles 2.01, 2.02 et 2.04 des Règlements généraux de la FPJQ un nouveau critère d’adhésion pour les membres :

Pour devenir membre de la FPJQ, un journaliste, ou une entreprise de presse, doit prendre un engagement moral à respecter le Guide de déontologie de la FPJQ. Cet engagement sera requis au moment de l’adhésion et/ou de son renouvellement.

[Fédération professionnelle des journalistes du Québec, “Résolution du conseil d’administration pour l’assemblée générale du 7 décembre 2008”.]

Traduction :

Attendu :

  • qu’Internet permet à n’importe quel quidam de diffuser des messages à grande échelle, sans autorisation préalable, sans filtre, ni même impératif de faire de l’audience et l’argent qui va avec, qu’il s’agit d’une concurrence déloyale,
  • que nous prenons le public pour des idiots qui ne sauraient pas identifier les émetteurs de messages, faute de labellisation claire, que certains communicateurs, heureusement encore rares, font un travail de meilleure qualité que la grande majorité de nos confrères,
  • que nous sommes bien incapables de trouver la moindre chose qui distingue les journalistes professionnels des citoyens et autres communicateurs, à part le fait que nous sommes salariés par une entreprise de presse,
  • que l’information produite par nos médias a de jour en jour de moins en moins de valeur et de crédibilité aux yeux du public,
  • que la FPJQ n’a pas intérêt à s’afficher comme un exemple et un leader des plus mauvaises pratiques professionnelles qui ont cours actuellement,
  • que la FPJQ déplore que les pouvoirs publics et autres instances n’engagent aucune mesure protectionniste pour nos culs,
  • que les règlements généraux de la FPJQ reconnaissent que « la fonction de journaliste repose sur la vérification des faits, la rigueur du traitement et le respect de l’éthique et de la déontologie », ce qui ne la différencie en rien d’autres communicateurs et citoyens,

Il est proposé d’ajouter aux articles 2.01, 2.02 et 2.04 des Règlements généraux de la FPJQ un nouveau critère d’adhésion pour les membres :

Pour devenir membre de la FPJQ, un journaliste, ou une entreprise de presse, doit prendre un engagement moral à respecter le Guide de déontologie de la FPJQ. Cet engagement sera requis au moment de l’adhésion et/ou de son renouvellement.

Le journaliste, à trop se parer d’éthique et de déontologie, joue un jeu dangereux… Les citoyens pourraient le juger à la hauteur de ses engagements, c’est à dire avec encore plus de sévérité qu’aujourd’hui. À trop brandir la tarte, on risque de se faire entarter.

On efface tout : […]

1 - Les blogueurs n’existent pas
Finissons-en: un blog est un format, pas un contenu ni un métier. On ne dit pas des gens qui écrivent sur un tableau noir qu’ils sont des “tableaunoireurs”, de ceux qui griffonnent dans un carnet à feuilles quadrillées qu’ils sont des “carnetàfeuillesquadrilleurs” ni même des gens qui travaillent à la télévision des “télévisionneurs”, etc., etc. On ne peut pas plus opposer un blogueur à un journaliste qu’un tableaunoireur à un docteur en ethnographie. Pas rapport. Pomme et orange, etc. Donc, de qui parle-t-on quand on parle de blogueurs? Ou plutôt, de qui parlez-vous? De chroniqueurs? De cueilleurs et diffuseurs d’information? De recherchistes? De sources de nouvelles? De synthétiseurs de tendances? Devant cet embarras de définition, la fpjq n’exclut pas nommément les blogueurs mais tente de les définir par la négative comme étant “tous ceux qui ne sont pas journalistes”. Ça tombe mal parce que, comme on le disait,

2 - Les journalistes n’existent pas non plus!
C’est écrit dans le premier des critères d’adhésion à la fpjq: “personne qui a (…) pour occupation principale, régulière et rétribuée l’exercice d’une fonction de journaliste pour le compte d’une ou de plusieurs entreprises de presse québécoises.” Pas la déontologie. Pas l’éthique. Le premier critère du titre de journaliste n’est pas d’adhérer à un credo mais d’être rétribué par une ou plusieurs entreprises de presse. Être journaliste n’est pas un état d’âme, ni un diplôme, ni une conviction, ni une compétence: on n’est journaliste que lorsqu’on est nommé comme tel par quelqu’un d’autre, un employeur d’un média d’information. Ce n’est pas l’éthique qui fait le journaliste, c’est l’employeur.

Exit la définition des journalistes par l’adhésion à la déontologie: sans objet. Pas rapport. Exit les espoirs des “blogueurs-reporters” d’entrer dans la citadelle en se drapant dans l’éthique: sans objet. Pas rapport.

Cqfd: l’éthique, en soi, n’est pas une tarte à la crème. C’est un engagement profond, sérieux, essentiel que l’on attend de tout professionnel de tout secteur. Mais, dans ce contexte, elle est seulement une tarte à la crème: déguisement, artifice, signe, mirage, illusion, signal, épouvantail, draperie, enveloppe, robe, camouflage, maquillage, uniforme, chapeau, miroir aux alouettes, alouette. Tarte à la crème.

[Bruno Boutot : “Bienvenue à la communauté des passionnés de l’information !”, via Mario Asselin.]

P.S. 6 décembre : Novövision, “Journalisme, déontologie, blogueurs et tartes à la crème”.

1. Le 5 décembre 2008,
Maxime

le respect des règles de déontologie est la seule chose qui distingue les journalistes professionnels des citoyens et autres communicateurs

Mince, ça viens d’exploser mon trollomètre.

C’est pas comme si j’étais témoin de réglèments de comptes entres grosses sociétés côtées à la Bourse de Paris par journaliste. Tel que l’une qui reproche à l’autre ce qu’elle fait elle-même. Et l’autre qui fait des rumeurs sur la première.

Ah, en fait, si.

Ce qui distingue le blogueur du journaliste, c’est qu’il n’y a pas encore de syndicat chez les blogueurs. Et puis le blogueur a appris a limiter les figures de style pour que ses articles soit plus faciles à retrouver sur google.

2. Le 5 décembre 2008,
narvic

Bien des journalistes français en sont hélas au même point et le barnum des Etats-généraux de la presse accouche exactement de la même recette de la tarte à la crème.

Pendant ce temps-là des blogueurs journalistes et des blogueurs pas journalistes coopèrent gentiment dans leur coin sur le même projet à expérimenter de nouvelles recettes de cuisine. Sans carte, mais avec déontologie bien sûr, comme tout les gens qui essayent d’être un peu responsables et de ne pas faire n’importe quoi…

La tarte à la crème, c’est que la question n’a jamais été d’avoir une déontologie ou pas. La question, c’est de la respecter quand on en affiche une.

Mais au fond, si tous ces journalistes transatlantiques n’ont plus que le mot de déontologie à la bouche, n’est-ce pas une sorte de gros aveux hypocrite ? S’il faut remettre à ce point de la déontologie dans le journalisme, serait-ce qu’il en manque cruellement aujourd’hui ?

Je ne connais pas l’avis des Québécois à ce sujet, mais je connais la réponse des Français :

Croyez-vous que les journalistes sont indépendants, c’est à dire qu’ils résistent :

  • Aux pressions des partis politiques et du pouvoir ? Non: 63%
  • Aux pressions de l’argent ? Non : 60%

(sondage TNS Sofres pour La Croix, février 2007).

Peut-être bien qu’il y a un petit problème de déontologie alors… Peut-être…

3. Le 5 décembre 2008,
marie-Hélène

Je dirais : gesticulations grotesques. Déontologie c’est tellement souvent le faux nez du corporatisme.

4. Le 5 décembre 2008,
bruno boutot

Merci de me citer dans ce beau site. Juste pour préciser le contexte: je suis moi-même journaliste et je pense qu’être journaliste salarié n’est pas un défaut. :-) Ce n’est pas un défaut non plus d’être conscient de la tempête du Web qui s’abat sur l’industrie de la presse. Ce n’est pas un défaut d’avoir des craintes sur le futur de la profession: c’est une tempête. Je pense seulement que l’exclusion, ce réflexe de protection des acquis, n’est pas un remède approprié pour sortir de la tempête. Je crois que les regroupements, les interconnections, les intérêts communs sont plus efficaces dans ce cas-ci que l’isolement. :-)

5. Le 9 décembre 2008,
Cecile Gladel

Attention, tous les journalistes ne sont pas syndiqués avec des conditions bétons. Vous oubliez les journalistes indépendants, qui souvent sont devenus des blogueurs ou vice versa. Qui a dit que ce n’était pas compatible? Je me reconnais de moins en moins dans la FPJQ….je parle du fameux congrès sur mon blogue…

6. Le 13 décembre 2008,
Pascal

Comme le disent Bruno et Cécile, tous les journalistes ne se reconnaissent pas dans cette résolution de la FPJQ. Mais ce n’est pas la première fois. Cette association a la fâcheuse habitude, depuis les années 1980, de s’enfarger dans les fleurs du tapis, pendant que les conditions de travail des non-membres (les pigistes, en particulier) se dégradent tout autour d’elle.

Ca part d’une bonne volonté: rien de plus normal pour une association que de définir qui peut être membre et qui ne peut pas l’être. Mais elle ne semble pas se rendre compte, et ce n’est pourtant pas faute d’avoir été critiquée là-dessus, que chaque fois, son image en sort amochée. Si au moins elle s’engageait dans des luttes qui feraient se sentir concernés blogueurs et pigistes.

Blah ? Touitter !

Systématique des couleurs

Conçu dans les années 1950 comme un outil d’aide à l’enquête par son créateur, l’inspecteur de police marseillais René Canonge, ce registre classait les auteurs d’infractions en quatre critères : “noir, blanc, jaune et arabe”. Mais la société a évolué. Informatisé en 1992, Canonge s’est perfectionné dans la description initiale en retenant douze catégories “ethno-raciales”, toujours en vigueur : “blanc (Caucasien), Méditerranéen, Gitan, Moyen-Oriental, Nord Africain, Asiatique Eurasien, Amérindien, Indien (Inde), Métis-Mulâtre, Noir, Polynésien, Mélanésien-Canaque”.

Mais là encore, la terminologie choque. “Gitan” ne correspond à aucune donnée objective. Et le principe même de la catégorisation par race et origine ethnique met toujours mal à l’aise.

En 2006, après d’âpres discussions, le “groupe fichiers” du ministère de l’Intérieur, déjà présidé par Bauer, avait proposé une légère modification du Canonge, en supprimant notamment le terme “Gitan” et en définissant dix “types”, de l’”Européen” au “Maghrébin”. La proposition s’est perdue dans les sables.

[Le Figaro, Jean-Marc Leclerc : “Polémique sur le fichage selon la couleur de peau”.]

Méfiez vous des travelos

Record avenue Montaigne :

Les vitrines ont été vidées et le butin est conséquent. Jeudi, vers 17 h 30, quatre individus armés — dont deux étaient des hommes déguisés en femmes — ont fait irruption dans la joaillerie de luxe, Harry Winston, située dans la prestigieuse avenue Montaigne à Paris (VIIIe) et ont fait main basse sur la presque totalité des bijoux exposés. De source proche de l’enquête, l’estimation des bijoux volés se situe entre 60 et 80 millions de dollars, soit de 47 à 62 millions d’euros. [Le Figaro.]

1. Le 5 décembre 2008,
Jujupiter

Tout le monde sait que les drag queens ont des gouts de luxe, et puis merde, c’est la recession, quoi!

Blah ? Touitter !

Joyeuses fêtes !

Aux États-Unis, 533 000 créations de chômeurs en novembre.

Reuters : “U.S. job losses worst since 1974 as recession bites”.

Radio Canada : “L’économie canadienne a perdu 71 000 emplois au cours du dernier mois”.

1. Le 5 décembre 2008,
Jujupiter

Oui, oui, bah c’est pareil ici. (C’est a qui aura la plus grosse maintenant…)

2. Le 5 décembre 2008,
OlivierJ

À force de parler de “crise”, on va finir par en avoir une vraie :-( . Ça sert à quoi d’avoir injecté des milliards et offert encore plus de milliards en garanties, si c’est pour faire comme si ça ne pouvait pas limiter la récession, voire la rendre quasi-nulle ?

Blah ? Touitter !

Quebec syndrome

There is a Quebec political syndrome. It inspired the decision of Stéphane Dion, Jack Layton and Gilles Duceppe to seize power, dumping the Conservatives.

Is it coincidence that all three are from Quebec? Even Mr. Layton was born and bred there, graduating from McGill University. His father was a Quebec MP in the Mulroney government.

The Quebec political syndrome includes a permanent resentment over past wrongs and past humiliations(*). It’s premised on being under existential threat in North America, where its language is different and outnumbered. It displays a fortress mentality. And the syndrome assumes that, whatever Quebec wants, it must get. Or it’s aggrieved. Quebec doesn’t accept give and take, just take. Reciprocity’s out, unilateralism’s in.

[…] And Quebec is hypersensitive to insult. Nationalists burned the Canadian flags routinely. But when expatriate Anglos trampled the Quebec flag in Brockville, all of Quebec was aroused. It was added to Quebec’s carefully tended list of historic slights.

[…] But our Quebec trio couldn’t forgive or forget. Mr. Harper must be destroyed. The revenge of the nerd for all past indignities would be terrible: Mr. Dion must become prime minister.

[The Globe and Mail, William Johnson: “Why the kingmaker can’t stop laughing”.]

[* De fait, la devise du Québec est “Je me souviens” (de quoi, c’est parfois flou)…]

1. Le 5 décembre 2008,
VinZ

The Quebec political syndrome includes a permanent resentment over past wrongs and past humiliations (…) whatever Quebec wants, it must get. Or it’s aggrieved. Quebec doesn’t accept give and take, just take. Reciprocity’s out, unilateralism’s in.

Les Québecois sont des Flamands ?

2. Le 5 décembre 2008,
Off Topic

Bedpost.

Les geeks n’ayant pas l’intention de se suicider sont invités à ne pas s’inscrire.

Blah ? Touitter !