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Nivellement québécois

[…] Il voyage beaucoup et traîne souvent ses deux fils, Jules et Joakim. « J’en profite avant qu’ils ne commencent à fréquenter l’école régulièrement », dit-il.

Il les emmène en Suisse, où ils ont commencé à faire du ski. « Ils sont doués. C’est extraordinaire pour eux. Ils me l’ont demandé. Je veux qu’ils découvrent le plus de choses possibles. Qu’ils s’ouvrent. Le ski, ça nous accompagne toute la vie. Et ça donne l’occasion de leur faire découvrir la compétition. Je veux qu’ils sachent que terminer premier ou deuxième, c’est différent. Ils ont déjà cet esprit compétitif et c’est sain. D’ailleurs, je n’ai pas l’intention de les faire étudier dans le système québécois. Je trouve qu’on nivelle par le bas et qu’on n’est pas assez exigeant. Je préfère le baccalauréat français. J’y suis passé et on sait ce qu’on vaut et où on se situe. Et les millions d’enfants qui y sont passés ne se sont pas suicidés. Ils ont appris à travailler pour réussir et à se mesurer. C’est ce que je souhaite pour mes enfants », dit-il.

[…] Il regarde aller les choses et fait la moue. Au moins, Bernie Ecclestone est encore en poste. On peut dire ce qu’on voudra de tonton Bernie, il a encore de la poigne: « Voyons! Sans Bernie, il n’y a plus de Formule 1! C’est un groupe d’enfants gâtés et tous ont besoin d’un grand-papa qui a de la poigne. Après Bernie, la F1 va aller dans toutes les directions », dit-il.

Dans le fond, c’est du Villeneuve tout craché. Un homme qui croit à la discipline, à un encadrement dans la société et à une ligne d’autorité.

Quitte, comme il l’a fait tant de fois, à défier l’encadrement et la ligne d’autorité.

La Presse, Réjean Tremblay : “Jacques Villeneuve: « Je vais mourir pilote »”.

Ah, charmant monde des riches où l’on peut choisir le pays pour élever ses enfants…

Jeunesse dorée

Jacques Villeneuve

[Photo Graham Hugues.]

La jeunesse dorée du fils à papa qui traite les étudiants québécois de fainéants…

[…] Chacun a droit à son opinion.

N’empêche, il est particulièrement fascinant de voir comment le débat entourant l’accessibilité aux études peut être perçu par quelqu’un qui a fréquenté le collège alpin Beau Soleil, en Suisse, qui est reconnu comme la maison d’enseignement la plus prestigieuse du monde.

Durant son passage dans cette école secondaire, Villeneuve a côtoyé des princes et des princesses ainsi que les héritiers des plus grandes fortunes d’Europe. De nos jours, les parents des quelque 180 élèves qui fréquentent cette école doivent débourser environ 97 000 $ par an pour assurer un enseignement de qualité à leurs enfants. Cela exclut bien sûr les dépenses reliées aux activités sportives et aux expéditions…

Puisqu’il est question d’expéditions, justement, pendant que les étudiants québécois protestaient dans les rues de Montréal et esquivaient les matraques à la mi-mai, les élèves de troisième secondaire du collège Beau Soleil pagayaient dans l’Ardèche, dans le sud de la France. Et en mars, au moment où les étudiants québécois commençaient à s’aventurer dans les rues pour protester contre la hausse de leurs droits de scolarité, huit élèves de Beau Soleil mettaient le cap sur l’Équateur pour faire l’ascension du volcan Cotopaxi.

De toute évidence, les élèves de Beau Soleil ne passent pas leur temps à se plaindre dans les rues. Mais on peut se demander si ce sont les étudiants québécois ou les étudiants de Beau Soleil qui se font le plus souvent dire non par leurs parents…

Les étudiants du collège Beau Soleil n’ont certainement pas de problèmes avec leurs prêts et bourses. Et il est permis de croire que les consoeurs et confrères de classe de Jacques n’ont pas eu à occuper deux ou trois petits boulots afin de se loger, se nourrir et payer les coûts de leurs études comme le font les fainéants du Québec.

Villeneuve a par ailleurs raison lorsqu’il prétend que les étudiants qui protestent aujourd’hui devront demain payer leur contribution à la société.

En effet, la plupart n’auront pas le choix de payer leur pleine contribution. Ils ne pourront pas s’installer à Monaco ou en Suisse par exemple (comme tant de pilotes de F1 le font) pour éviter de faire face à des taux d’imposition qu’ils jugent injustes et disproportionnés.

Radio Canada Sports, Martin Leclerc : “Le monde selon Jacques Villeneuve”.

L’avis de Jacques Villeneuve

Jacques Villeneuve

Que pensez-vous des manifestations étudiantes ?

Ben, qui… qui zarrêtent là. C’est le temps. Ça coûte une fortune à la ville. Heu. Ça a pas de bons sens. C’est tout. Ça a juste pas de bon sens. Ça coûte cher à tout le monde, et en plus, ce que je trouve un peu désolant, c’est qu’ils prônent la liberté, mais ce qu’ils se rendent pas compte, c’est qu’ils en enlèvent à beaucoup de gens. Donc, y a un manque d’équilibre qui se fait à ce niveau-là. Donc, faudrait peut-être… Je pense qu’ils ont passé leur jeunesse à grandir sans que leurs parents leur disent non. Jamais ! Et donc, c’est ça maintenant qu’on voit dans les rues. Ça passe son temps à se plaindre, et c’est tout.

[…] J’ai du mal à comprendre ce qui se passe. Il est temps que les gens se réveillent un petit peu, qui zarrêtent de faire les feignants là. Ça fait assez longtemps que ça dure, tout simplement !

Déclaration de Jacques Villeneuve à la presse, lors du cocktail “Le Grand Soir”.

Le grand soir

Grand Soir, Grand Prix du Canada, Montréal

Je me demande si les organisateurs de la F1 à Montréal sont des incultes ou des provocateurs… Je penche pour la première option.

Formule 1, fascisme et vulgarité

Et assez extraordinairement, il est en même temps parvenu à dénicher des politiciens assez serviles pour lui verser, en plus, un boni de 15 millions de dollars par année. « Le Grand Prix génère des retombées de plusieurs dizaines de millions. Il est donc normal de partager ces recettes avec Bernie Ecclestone », disent les politiciens comme le ministre québécois des Finances, Raymond Bachand.

Quand son contrat viendra à échéance en 2014, Ecclestone aura empoché 75 millions (dont une grande majorité provient des fonds publics) simplement parce que les politiciens trouvent « normal » de lui donner cet argent. Et cela, en surplus des millions de profits qu’il engrange avec l’organisation du Grand Prix!

C’était donc particulièrement comique cette semaine de lire qu’Ecclestone veut obtenir encore plus d’argent à compter de 2015 et qu’il exige, en plus, que 15 millions supplémentaires soient investis pour rénover les installations de l’île Notre-Dame.

Quand Normand Legault demandait de l’aide pour rehausser la qualité du site, les gouvernements lui répondaient de s’arranger tout seul. Mais quand Bernie lève le petit doigt, le ministre Bachand accourt aussitôt : « M. Ecclestone veut des installations en bon état et c’est normal. Il faut trouver une façon de financer cela », dit-il.

Bref, la paille de Bernie Ecclestone est plongée bien au fond de notre grand milk shake collectif. Et pour lui, de toute évidence, les coffres de l’État sont infiniment profonds.

Les chefs de file du mouvement étudiant peuvent aller se rhabiller. À leur place, Bernie Eccletone aurait depuis longtemps obtenu la gratuité scolaire. Et à titre de boni, Raymond Bachand aurait sans doute accepté, en plus, de verser un salaire à tous ceux qui fréquentent le cégep ou l’université.

Radio Canada, Martin Leclerc : “Qu’aurait fait Ecclestone à la tête du mouvement étudiant ?”.

Ecclestone, c’est aussi le type qui a dit que les femmes devraient s’habiller en blanc pour mieux ressembler à de l’électroménager, que Hitler était un type efficace, et que la démocratie était détestable.

À son image, la Formule 1 n’a rien d’un sport et tout de l’exhibitionnisme de la vulgarité ploutocrate, un bruyant et coûteux divertissement de douchebags. J’espère sincèrement que le Grand Prix de Montréal soit saboté et que les poules siliconées de la rue Crescent aillent se faire voir ailleurs.

Lire aussi cet article de Jean-François Nadeau dans le Devoir en 2009 : “Bernie Ecclestone - Attention, chauffard à droite !”.

Air pur à Montréal

Adieu combustibles polluants, adieu nuisances sonores, adieu touristes avinés en centre ville, adieu Formule 1 à Montréal.

Place aux oiseaux, écureuils et vrais sportifs sur l’île Notre-Dame !

Félicitations aux Turcs.